C’est comme un règlement de compte. Ou comme recevoir une facture avec un taux d’intérêt indécent! Épargné par les blessures et la maladie durant la grande majorité de la dernière saison, le Canadien ne pouvait subir deux coups plus durs au cours de la dernière semaine : la perte de son principal guerrier en attaque pour au moins six semaines et celle du meilleur gardien au monde pour une période semblable. Comme s’il devait payer très cher ce luxe d’avoir eu droit à une formation complète pendant une si longue période!

On se retrouve donc aujourd’hui devant une situation hautement délicate, nous sommes d’accord. Situation délicate, mais pas nécessairement catastrophique pour autant, mes amis. Regardons de plus près.

En reconnaissant que l’objectif principal du Canadien est de participer aux séries de fin de saison et d’y faire le parcours le plus long possible, il faut donc placer le mauvais sort du moment dans une juste perspective. Il est beaucoup plus acceptable, par exemple, de se passer des services de Brendan Gallagher et Carey Price à ce moment précis du calendrier régulier qu’à l’amorce des séries, en avril. Comme il est plus facile d’accepter la situation avec une fiche enviable de 18-4-3, 39 points au classement, le premier rang au classement général de la LNH et une avance de 10 points sur son plus proche rival de division!

Au cours des six prochaines semaines, le Canadien va disputer 18 rencontres. Ce ne sera pas un calendrier facile; il y aura le long segment traditionnel à l’étranger autour de la période des Fêtes, il y aura quatre fois deux matchs en deux soirs, il y aura la Classique hivernale le 1er janvier à Boston et un affrontement au sommet contre les Stars à Dallas le 20 décembre. Mais un simple calcul mathématique nous permet la constatation suivante : si le Canadien récolte à peine la moitié des points disponibles d’ici le retour au jeu de ses deux joueurs étoiles (en supposant que la durée de leur absence est juste), il pourrait encore très bien conserver le sommet de la section Atlantique durant tout le parcours! Les Sénateurs d’Ottawa devraient remporter autour de 15 victoires en 20 matchs pour rattraper un Tricolore présentant un rendement de ,500 d’ici là!

Condon et la confiance

En fait, en toute objectivité, tout porte à croire que le Canadien peut très bien conserver un rythme victorieux d’ici les premières semaines de 2016. Le même rythme que depuis le début de la saison? Peut-être pas. Mais un bon rythme quand même. Une grande partie de cette hypothèse repose, bien sûr, sur les épaules du gardien auxiliaire de l’équipe.

On est tous d’accord que Mike Condon n’est pas Carey Price et qu’il montre parfois des dignes d’essoufflements depuis quelques matchs. Mais il faut aussi reconnaître objectivement ce qui lui revient : le Canadien a récolté 19 points sur un potentiel de 26 lorsqu’il fut délégué devant le filet, ce qui est bien au-delà des attentes exprimées lors de l’annonce de la première absence de Price. Et comme le gardien substitut le disait lui-même, plus tôt lundi, chaque match lui apporte une nouvelle expérience, une nouvelle compréhension du jeu, une nouvelle maturité. Bref, plus il joue, plus il peut encore se développer et plus il peut avoir confiance en ses capacités.

Max Pacioretty disait de lui que son physique imposant, sa technique et son calme sont des atouts qui inspirent aussi confiance à toute l’équipe et il s’agit là d’un élément-clé dans la situation actuelle. Au moment d’entreprendre cette mission délicate qui les attend au cours du prochain mois et demi, les joueurs du Canadien peuvent se dire qu’ils ont réussi à maintenir une place dominante dans la LNH et qu’ils ont fait près de la moitié du chemin avec Mike Condon comme gardien principal. Ce n’est quand même pas rien!

Aux autres leaders de se lever!

Le capitaine du Canadien a aussi tenu un propos fort souhaitable de sa part, il y a quelques heures, après l’annonce de l’absence prolongée de Price. « On sait que Carey est notre meilleur joueur. On sait aussi qu’on a une excellente équipe. À nous de le prouver! »

Voilà, rien à ajouter! Cela résume parfaitement le défi qui se dresse d’ici la mi-janvier. Individuellement, chaque joueur doit faire son introspection et chercher à trouver la façon de rehausser son rendement pour le bien commun. « Rehausser son rendement », ça veut dire aussi prendre les bonnes décisions sur la patinoire, jauger le risque le mieux possible, être prêt à jouer dès la première mise en jeu, respecter les plans de matchs. Il faudra viser plus que jamais à marquer le premier but, à terminer la première période avec une avance sur l’adversaire. Ça veut dire bloquer des tirs, se replier en défense, jouer en unité de cinq…

Et le plus gros défi revient aux leaders de l’équipe. Pacioretty, Tomas Plekanec, P.K. Subban et Andreï Markov doivent prêcher par l’exemple et doivent surtout projeter une attitude positive et inspirante pour leurs coéquipiers. S’ils attendent de Condon qu’il leur inspire confiance, ils doivent exactement la même chose à leur gardien auxiliaire.

En terminant, il sera aussi intéressant de voir comment le personnel d’entraîneurs va s’adapter à la situation. Le Canadien cuvée 2015-2016 est fortement axé sur la vitesse et ce n’est pas pour rien qu’il affiche la meilleure attaque du circuit. Or, je suis convaincu que même s’il va demander à ses joueurs d’être encore plus « responsables » sur la patinoire, Michel Therrien voudra à tout prix que son équipe garde son identité. Il sera aussi fort intéressant de voir comment sera gérée l’utilisation des gardiens. Le premier programme double apparaît seulement au milieu de la semaine prochaine.

Ne dit-on pas souvent que c’est dans l’adversité que l’on distingue les grands champions? À n’en pas douter, le Canadien se retrouve, à court terme, devant une mission imposante. Mais l’occasion est belle de valider ce qu’il a accompli jusqu’ici.

Je parierais qu’il y parviendra!