MONTRÉAL –Marc Bergevin qui a failli à son mandat, Michel Therrien qui ne favorise pas la relance de ses joueurs et Max Pacioretty qui manque d’émotions. Les réflexions du jury des analystes et des partisans n’épargnent personne dans l’organisation du Canadien.

Étant donné que la chute vertigineuse du Canadien se poursuit au classement de la LNH, Guy Carbonneau, Denis Gauthier et Éric Bélanger n’ont pas été tendres envers le club montréalais, mais ils ont ciblé des coupables différents quand ils ont été consultés par le RDS.ca.

De plus en plus, le verdict se rapproche de la conclusion que l’organisation montréalaise manque tout simplement de ressources ce qui se veut une flèche à l’endroit de Bergevin, le directeur général qui est rendu à l’an quatre de son plan quinquennal.

« Tu peux compenser des choses avec un meilleur effort, mais tu ne peux pas compenser pour un manque de talent naturel. Les habiletés ne sont pas suffisantes et c’est de plus en plus apparent. On ne peut pas mettre tous les joueurs dans le même panier parce que le Canadien mise sur quelques éléments talentueux, mais la plupart des buts du Canadien sont marqués en bûchant », a reproché Gauthier.

« Même quand Carey sera de retour, le Canadien aura besoin de plus de talent », a-t-il soutenu.

L’ancien défenseur de la LNH considère donc que la plus grande partie de la besogne à abattre actuellement repose sur le bureau de Bergevin.

« Présentement, je dirais oui. Michel compose avec les éléments à sa disposition. Je ne pense pas que Michel possède les outils pour avoir un club gagnant. L’équipe n’est pas aussi mauvaise que sa fiche depuis une vingtaine de matchs, mais elle ne peut pas prétendre à la coupe Stanley », a résumé Gauthier.

Cette version de la situation est partagée par Carbonneau qui a dénoncé un manque d’action de la part des dirigeants.

« L’équipe avait des problèmes par le passé qui n’ont pas été réglés parce qu’elle misait sur Carey Price. Ça remonte des années qu’on dénonce l’absence d’un centre numéro un et d’un ailier droit numéro un », a rappelé l’ancien capitaine et entraîneur du CH.

Malgré l’addition de ces jugements, Michel Therrien ne s’en tire pas aussi facilement.

Il se retrouve visé par quelques critiques acerbes dont celles d’Éric Bélanger qui a joué sous ses ordres en 1997-98 avec les Canadiens de Fredericton.

« J’espère qu’il a changé, mais quand il tombe sur le dos d’un joueur c’est très difficile d’en sortir », a ajouté Bélanger en entrevue à 30 minutes chrono avec Martin Lemay

Bélanger y est allé de cette déclaration puisqu’il se demande pourquoi autant de ses troupiers se retrouvent dans une panne sèche.

« Est-ce qu’il a été étouffé par Michel, c’est la question que je me pose », a lancé Bélanger à propos de Jarred Tinordi échangé récemment aux Coyotes de l’Arizona.

Chose certaine, Guy Carbonneau ne partage pas du tout l’avis de Bélanger et il ne le considère pas trop exigeant envers ses protégés.

« Je ne suis pas d’accord, l’entraîneur est là pour ça. Il essaie de soutirer le maximum de ses joueurs », a réagi Carbonneau qui aurait voulu assister à l'acquisition d'un gardien établi quand Price est tombé au combat.

Une erreur de s'en prendre aux partisans

« Une équipe de hockey, c’est comme une famille. Il y a des enfants qui ne vont pas toujours dans le bon sens et tu peux décider de ne rien faire et espérer qu’ils vont comprendre. C’est la même chose avec les joueurs. Michel ne peut pas tout le temps dire que tout le monde est bon et fin. Sinon, tu viens de donner une excuse au joueur qui n’a pas de caractère. Après, celui-ci ira manger au restaurant avec des coéquipiers et il commencera à se plaindre sur l’entraîneur. C’est comme ça que la dissension commence dans une équipe », a-t-il détaillé.

Ayant subi le couperet par le passé, Carbonneau a plaidé en faveur d’une clémence pour Therrien.

« Michel mérite d’aller jusqu’au bout pour voir ce qu’il peut faire », a souhaité l’ancien entraîneur du Tricolore.

Inquiets pour Therrien et pour le Canadien

Les trois intervenants sondés n’ont pas exprimé une once de positivisme pour la suite des choses à moins d’un changement d’importance.

« J’étais inquiet il y a trois ou quatre semaines, mais le monde me disait de me calmer. Finalement, on est rendu là et on avait raison de s’inquiéter. Il doit se produire quelque chose rapidement sinon ça risque d’être trop tard dans une dizaine de jours », a jugé Gauthier.

L’inquiétude de Carbonneau se situe surtout autour de l’avenir de Therrien étant donné que le calendrier allégé et favorable des prochains matchs pourrait convaincre l’état-major du Tricolore de passer à l’action.

« C’est ce qui me fait le plus peur pour Michel. Tu ne changes pas d’entraîneur quand tu vas affronter Chicago ou d’autres puissances de la LNH. Claude Julien, Alain et Michel sont passés par là. J’espère que l’organisation ne fera pas ce changement », a évalué Carbonneau.

La fidélité démontrée par Bergevin envers Therrien depuis leur arrivée en poste pourrait laisser croire que le directeur général optera pour la patience. Cependant, le dernier mot risque de revenir au propriétaire Geoff Molson qui tire ultimement les ficelles.

« C’est lui qui va dire que le geste doit arriver sinon ce sera à Marc de payer. Mais le blâme ne se rend jamais jusqu’au vestiaire, il arrête au bureau du directeur général ou au niveau des entraîneurs. Les propriétaires et les joueurs ne changent jamais », a déploré l’analyste à RDS.

Max PaciorettyUn leadership à développer

Une spirale négative aussi longue que celle traversée par le Canadien n’est pas facile à freiner. À ce propos, Carbonneau, Gauthier et Bélanger s’entendent pour dire qu’un leadership plus aguerri et influent aurait favorisé une relance.

Selon eux, le capitaine de l’équipe n’est pas arrivé à son sommet ce qui n’aide pas la cause.

« Max me décourage après les matchs, il n’a pas d’émotions. C’est pour ça que le Canadien ne peut pas s’en sortir, l’équipe manque d’émotions », a protesté Bélanger.

« C’est nouveau pour lui d’avoir le micro dans la face tous les jours et de devoir tirer son club au quotidien. Je ne dis pas qu’il est un mauvais capitaine, mais il sera meilleur avec de l’apprentissage », a convenu Gauthier.

En raison du contexte actuel, les mots ne sont pas doux et Andrei Markov a également été la cible de plusieurs blâmes. À ce sujet, Gauthier ne croit pas uniquement aux signes de l’âge.

« Ce n’est pas vrai qu’il n’est plus bon parce qu’il a vieilli d’un an. Je présume qu’il y a quelque chose qui le chicote présentement. Ça peut être un aspect mental ou physique ou bien une situation à l’extérieur de la glace. Je serais tenté de creuser dans cette direction si j’étais parmi les dirigeants du Canadien même s’il faut lui accorder quelques jours de répit », a proposé Gauthier.

Absent ou présent, tout repose sur Price

Les joueurs du Canadien ont bien pu s’époumoner à prétendre que leur équipe ne se limitait pas à Carey Price, mais tous les événements de la saison présente démontrent le contraire.

Lorsque Price était à son poste, le CH avait des airs des futurs champions de la coupe Stanley alors que la débâcle s’éternise sans lui. Patrice Bergeron

« Je sais que beaucoup de gens ont parlé de l’importance de Carey dans les relances, mais c’est crucial à mon avis. Ça fait longtemps que les défenseurs du Canadien n’ont pas eu à aller chercher des rondelles profondément dans leur territoire par eux-mêmes. Ils étaient habitués de voir Carey effectuer la première passe. Si tu peux partir de manière fluide de ton territoire, ça te donne le temps de faire une bonne passe à tes attaquants en mouvement pour ensuite traverser la zone neutre avec vitesse, ce qui était une grande force du Canadien dans sa bonne période », a élaboré Gauthier.

L’enjeu sur l’état de santé de Price influence également la direction à emprunter au niveau administratif.

« Tout dépend de savoir s’il y a des risques qu’il ne revienne pas au jeu cette saison. C’est peut-être pourquoi le Canadien ne fait pas de transaction majeure en pensant agir plutôt cet été. Mais s’ils disposent de cette information, pourquoi ne pas la partager question d’enlever un peu de panique dans les médias. Ça changerait les attentes des partisans et les commentaires envers l’équipe », a commenté Gauthier.

« Les gars patinent dans le beurre, la confiance n’est plus là. La question qu’il faut se poser c’est : est-ce que le Canadien une bonne équipe? Les gens pensent qu’ils peuvent être en première place. Je suis désolé, mais il faut arrêter », a évalué Bélanger puisque la valeur du club chute considérablement sans Price.

Même si Price a été limité à une participation à 12 parties cette saison, Therrien n’a pas encore perdu sa patience publiquement. Ce qui peut avoir l’air d’un rare point positif ne l’est peut-être pas autant qu’on peut le croire.

« Je trouve ça extraordinaire que Michel soit encore tranquille. Il a appris du passé et ça l’incite probablement à ne pas se fâcher puisqu’il ne veut pas se mettre des joueurs à dos. Mais peut-être que quelques joueurs dans l’équipe auraient besoin d’un petit réveil pourtant », a conclu Carbonneau.