L'AVANT-MATCH

 

Finalement, depuis le début de ces étranges séries éliminatoires, j’ai l’impression que le CH a toujours le dos collé au mur; que le club survit grâce à un respirateur artificiel. En effet, on ne lui laissait pas beaucoup d’espoirs contre Pittsburgh.

 

Crosby, Malkin, Letang et les autres joueurs des Penguins ne devaient faire qu’une bouchée de Montréal... Mais l’esprit d’équipe et les efforts acharnés en ont décidé autrement. Montréal a choisi de profiter au maximum de cette fameuse deuxième chance qu’elle a obtenue.

 

Avant que ne s’amorce la série contre les Flyers les commentaires étaient encore plus vitrioliques. La vague qui avait porté le club contre les Penguins allait s’aplatir et ramener le CH à son rôle de petit club de milieu de peloton qui n’ira pas bien loin. Et c’est peut-être ce qui arrive. Naturellement, il faut probablement oublier le second match où les joueurs ont montré une ardeur, une hargne et une énergie incroyable en écrasant les Flyers. Bien entendu, l’hospitalisation de Claude Julien n’était pas étrangère à ce déploiement d’énergie. Les joueurs ont semblé y avoir puisé une volonté de gagner qui n’aura peut-être été qu’un mirage.

 

Bref, l’étincelle que l’équipe a trouvée dans l’absence de son entraîneur n’a manifestement pas suffi à relancer la machine. Philadelphie regroupe des joueurs talentueux, déterminés, conscients de leurs forces, tout en étant extrêmement bien dirigé. Il fallait s’attendre à les voir revenir en force; ce qui a été fait.

 

Par ailleurs, il est étonnant de constater que bien des joueurs du Canadien ne semblent pas jouer avec cette urgence de gagner. Des éléments clés de cette formation sont invisibles depuis trop longtemps. Qu’est-ce qui peut expliquer ce détachement?

 

Il faudra procéder à une analyse plus spécifique, mais le confinement obligatoire et très strict, qui enferme les joueurs entre l’hôtel et l’aréna, influence certainement bien des joueurs jusqu’à un niveau insoupçonné. L’éloignement et la solitude entraînent des répercussions différentes selon les personnalités. Certains l’acceptent plus facilement que d’autres qui, à un moment donné, ne réussissent plus à penser à autre chose. C’est peut-être ce qui est arrivé à Tuukka Rask, gardien des Bruins, qui a pris cette importante décision de retourner à la maison. Certains le critiqueront, mais il est désormais évident que le hockey n’est plus la seule priorité au monde des joueurs modernes.

 

D’autres laissent entendre que de jouer sans spectateurs procure des matchs ternes et sans émotion. Les professionnels de tous les sports sont habitués de carburer à l’énergie de la foule qui les porte à aller plus loin, à travailler plus fort. Quand cette stimulation est soudainement absente, il manque ce feu qui alimente la passion.

 

Vous me direz que tous les joueurs se retrouvent dans les mêmes conditions et que ça ne devrait pas les influencer. Toutefois, ces jeunes restent des êtres humains, animés par leurs émotions, par leurs incertitudes et leurs doutes. Comme chacun de nous. Le salaire ou le statut ne font pas foi de tout. Cependant, pour un joueur professionnel, quand l’incertitude nous fait hésiter et réfléchir, plus rien ne va. La machine coince et se grippe. Les bons gestes, les bonnes passes, les meilleurs lancés n’arrivent plus. Plus on s’interroge et plus on rate nos chances; plus on doute et plus on bousille d’autres occasions. 

 

Cela dit, la saison n’est peut-être pas encore terminée. Le CH peut vendre chèrement sa peau. Si les joueurs retrouvent cette motivation, s’ils entrent sur la glace avec le couteau entre les dents, ils peuvent retarder le verdict. Plus que jamais ils doivent jouer dans le moment présent, ne penser qu’à leur présence sur la glace, et puiser au fond de leurs ressources. 

 

Le CH a montré qu’il pouvait parfois réaliser de grandes choses. Battre les Penguins en est une, comme l’écrasante victoire de 5-0 face au Flyers en est une autre. Tant que Carey Price leur donnera une chance de rester dans le match, tout est possible. Au moins pour ce soir. Ensuite... on verra!

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