Pour espérer rester au coeur de cette série, les joueurs du Canadien devaient se comporter comme s'il s'agissait d'un septième match puisqu'un second revers risquait de faire basculer la série. Il ne sont même pas passés près de disputer ce qui aurait pu ressembler à un match décisif.

On n'a jamais senti un sentiment d'urgence de leur part. C'est même tout le contraire qui s'est produit. Ils ont joué comme s'il s'agissait d'un match sans signification par une froide soirée de novembre. De l'indiscipline à revendre, une attaque à cinq qui frise le ridicule, une rare inefficacité en désavantage numérique et un jeu d'ensemble si désarticulé que Carey Price a été totalement abandonné à son sort.

ContentId(3.1133259):L'indiscipline du Canadien coûte cher
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« Arrange-toi avec tes troubles, Carey. On se reverra à Tampa. » Tout a foutu le camp durant ce match : la défense est devenue une passoire, les unités spéciales ont été ridiculisées et l'indiscipline a porté un dur coup aux chances du Canadien de revenir dans cette série. Bref, un comportement général gênant dans les circonstances.

Ginette Reno, qui cherchait à serrer des mains après avoir interprété l'hymne national, a choisi Brandon Prust. La poignée de mains de la malédiction, pourrait-on conclure à la lumière de ce qui s'est passé. Prust est celui qui a brisé le rythme que l'équipe s'était donnée en première période quand il a écopé d'une pénalité mineure à laquelle on en a collé une seconde pour conduite anti-sportive après son implication dans un échange de propos acerbes avec l'arbitre Brad Watson. Quand il a révélé devant la presse ce que Watson lui avait dit - il l'aurait traité de notamment de fils de p…- il a peut-être placé toute l'équipe dans une situation délicate face aux officiels en vue des prochains matchs car une loi non écrite veut que ce qui se raconte sur la glace doit rester sur la glace. Les arbitres, c'est comme la police. Comme tu ne peux jamais gagner avec eux, aussi bien se la fermer.

Le Canadien a connu une soirée de misère. Sa conduite a été inacceptable dans un match qu'il ne fallait pas perdre. Il a été si indiscipliné qu'il a rendu la tâche relativement facile au Lightning.

Avant la rencontre, on était en présence de deux des attaques massives les plus improductives dans les séries 2015. Le Canadien (un but en 23) et le Lightning (deux buts en 34) n'avaient sûrement pas accédé à une deuxième série grâce à cette unité spéciale. Dans le camp du Canadien, peut-être qu'on s'est dit que ce n'était pas une pénalité ou deux qui pouvaient placer l'équipe en difficulté. On sait maintenant que c'est très dangereux de se rendre au banc des pénalités contre cette machine offensive bien huilée qui s'était endormie, on ne sait trop pourquoi, dans ce genre de situation.

L'attaque massive de Tampa a tourbillonné autour de la défense du Canadien avec une facilité étonnante. Une fois les défenseurs étourdis, on s'est appliqué à faire déplacer Price, qui ne savait plus où donner de la tête.

Selon son habitude, Michel Therrien n'a montré personne du doigt. Il a parlé d'un geste d'indiscipline commis en fin de première période. Il faisait allusion à la taloche à la tête que P.K. Subban a servie à un attaquant du Lightning alors que le jeu était arrêté. Subban, comme Prust l'avait fait plus tôt, s'est fait plaisir au détriment de l'équipe. Le Canadien menait 1-0 à ce moment-là. Valtteri Filppula a nivelé les chances durant l'absence du défenseur. On n'a plus revu le Canadien par la suite. Cinq buts consécutifs des visiteurs ont donné l'impression que le match était subitement joué à huis-clos tellement c'est devenu silencieux dans la place.

Qui sait ce qu'en pense Price?

Autant le Canadien a été impressionnant cette saison, autant il cause de l'inquiétude en séries où il ne ressemble plus à la formation déterminée, dotée d'un caractère à toute épreuve, qui a accumulé un total assez étonnant de 110 points. Une récolte qui a faussement laissé croire aux joueurs que tous les espoirs seraient permis en séries.

On va se dire les vraies affaires, le Canadien peut se compter chanceux d'être impliqué dans une seconde série. Il doit sa présence contre Tampa au fait qu'il ait pris les Sénateurs par surprise avec trois victoires consécutives durant la série précédente. Et là encore, la troisième victoire a été rendue possible grâce aux deux buts d'un homme de service, Dale Weise, dont le second en prolongation. À la suite de cette partie, le Canadien est parvenu à éliminer Ottawa malgré trois maigres buts dans les trois parties suivantes. Pensez-y, trois buts en trois matchs pour éliminer un adversaire coriace et accéder à la ronde suivante.

L'équipe de Therrien n'a touché les cordages que huit fois au cours des six dernières parties, dont un but inscrit dans un filet désert. Et comme si son attaque n'était pas déjà suffisamment anémique, les deux buts d'hier soir ont été obtenus par des défenseurs.

Depuis le début des séries, le Canadien a marqué 15 buts en huit matchs, dont quatre par des défenseurs, deux par les membres du quatrième trio et deux par Dale Weise, qu'on ne sait pas trop où situer dans la formation. Ça ne laisse pas beaucoup de buts pour ceux qui sont supposés charrier l'équipe. En ce moment, Price se pose peut-être la même question que nous tous: « Mais où sont-ils tous passés? »

Prust, dont on ne parle jamais de la production anémique, n'a pas marqué depuis 39 parties. Devante Smith-Pelly n'a qu'un but en 27 matchs depuis son arrivée à Montréal. Alex Galchenyuk, deux buts en 26. Pierre-Alexandre Parenteau, un but ses 15 derniers. Jacob De La Rose, un but en 18. David Desharnais, absent hier soir, un but en 15. Pour ces six attaquants, le Canadien a obtenu six buts sur l'équivalent de 140 parties. Et vous pensez que l'équipe peut sérieusement envisager une remontée avec cela?

Price ne le dira jamais, mais il s'interroge peut-être sur le degré de gratitude de ses coéquipiers quand ils lui font dans les mains comme cela vient de se produire. S'ils ont présentement la chance de se battre pour la coupe Stanley, c'est à leur gardien qu'ils le doivent. C'est lui qui les a amenés là où ils sont en ce moment.

Price peut sans doute comprendre qu'il n'est pas facile de marquer des buts en séries alors que tous les systèmes défensifs sont resserrés. C'est acceptable qu'il y ait des soirs plus difficiles que d'autres. Ce qui est inacceptable, cependant, c'est le relâchement et le manque total de discipline dans un affrontement d'une telle importance.

ContentId(3.1133276):Stamkos déculotte Price
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Hier, ils ont laissé tomber celui qui contribue à les rendre meilleurs. On devait assister à une série de gardiens de but dont Price, en vertu des prestigieux trophées Vézina, Hart  et Ted Lindsay (attribué aux joueurs de l'année par ses pairs) qu'il s'apprête à gagner, devait normalement sortir gagnant. La différence jusqu'ici, c'est que son vis-à-vis a été mieux secondé par des attaquants plus talentueux et plus efficaces quand ça compte. Une belle équipe dont le capitaine, Steven Stamkos, s'est finalement levé pour faire une différence.

Quand Stamkos s'est faufilé entre les défenseurs Tom Gilbert et Andrei Markov pour se présenter seul devant Price et le déjouer grâce à une feinte magistrale, on a senti les spectateurs s'enfoncer dans leurs fauteuils. Peut-être a-t-on été assommé de la même façon sur le banc? On venait d'assister à une confrontation entre les deux joueurs étoiles de cette série et l'ennemi avait facilement battu le héros local. Même s'il était encore très tôt dans la soirée, ce fut le début de la fin.

La suite pas très encourageante dans trois jours.