Je vous le concède, le Canadien de Montréal n’est pas l’équipe la plus talentueuse de la Ligue nationale de hockey. Ce n’est pas l’équipe ayant le plus de profondeur, autant en attaque qu’en défense. Ce n’est pas  une équipe qui compte sur un ou deux surdoués à la Sidney Crosby, Auston Matthews, Connor McDavid, Erik Karlsson et compagnie. Je vous concède tout cela!

 

Mais le Canadien de Montréal a dans ses rangs des ressources de hautes qualités. L’équipe peut compter sur un gardien qui, en principe, se classe parmi les meilleurs au monde (Carey Price). Elle peut compter sur le 7e franc-tireur de la LNH au cours des trois dernières saisons (Max Pacioretty). Elle peut compter sur le 7e pointeur en supériorité numérique dans l’Association Est, la saison dernière (Jonathan Drouin). Elle compte aussi sur le 7e défenseur ayant amassé le plus de points dans le circuit, en supériorité, au cours de la même période (Shea Weber). Son entraîneur-chef est l’un des plus crédibles de la Ligue, avec une feuille de route éloquente de plus de 1000 matchs, plus de 500 victoires, une Coupe Stanley et deux finales, le trophée Jack-Adams en 2009 et quelques titres internationaux en tant qu’adjoint (Claude Julien).

 

D’où le titre de cette chronique : « Un non-sens » ! Honnêtement mes amis, je ne peux trouver une autre façon de qualifier ce début de saison horrible du Canadien, le pire de l’équipe depuis 1941! Un non-sens, une aberration, une grave erreur de parcours, un passage à vide complètement farfelu, un tremblement de terre impossible à prévoir, un mystère inexplicable, choisissez votre expression, cela ne change rien à la situation actuelle.

 

Certes, on peut décortiquer chacun des 8 matchs disputés jusqu’ici et trouver des points d’analyse précis. On peut établir un fil conducteur entre chaque défaite, comme le manque d’opportunisme en attaque, les erreurs mentales en défense, l’exécution brouillonne sur les relances, l’effort inconstant sur une base de 60 minutes. On peut souligner le rendement inquiétant de Price, la panne sèche de Pacioretty, l’invisibilité de Galchenyuk.

 

Mais tout cela fait partie d’un tout beaucoup plus obscur. Sur papier, le Canadien de Montréal édition 2017-2018 représente une équipe nettement capable de lutter adéquatement avec toutes les formations de la LNH, en particulier celles de sa section. Rien ne saurait justifier une position aussi gênante au classement. On ne parle pas ici de « garantie » de participer aux séries éliminatoires, bien sûr, mais on parle au minimum d’une formation compétitive capable de gagner sa part de rencontres et de donner espoir à ses partisans au moins pour une bonne partie de la saison.

 

Il ne saurait y avoir plus belle preuve que la deuxième période du match de vendredi à Anaheim. En déficit de 0-3, face à la perspective d’une autre humiliante défaite et surtout à celle de retrouver des partisans en furie dès mardi prochain, le Canadien édition 2017-2018 a complètement écrasé l’adversaire, comme le faisaient les éditions glorieuses des années 1950, 1960 et 1970. Pendant 20 minutes, il n’y avait qu’une équipe sur la patinoire du Honda Center, une équipe que l’adversaire ne pouvait même pas suivre des yeux! À un point tel qu’un record historique a été établi, celui du plus grand nombre de tirs au cours d’une seule période. Ce record d’équipe appartient donc maintenant à un groupe de joueurs qui pourtant, doit aussi assumer, en même temps, le pire rendement offensif de toute la LNH! Contradiction, dites-vous?

 

Je préfère encore la notion de non-sens!

 

La suite?

 

Le côté inexplicable du mauvais début de saison du Canadien de Montréal rend encore plus complexe le travail du directeur général Marc Bergevin, du moins, à court terme. Si on accepte le fait que cette formation est nettement capable de faire mieux, que ses joueurs les plus talentueux finiront bien par retrouver leur touche, si on accepte le fait que la saison est encore bien jeune et que le Tricolore retrouve son domicile pour 14 de ses 17 matchs entre le 7 novembre et le 14 décembre, la patience peut encore s’avérer justifiable pour le DG, même si celle de plusieurs partisans est déjà effritée. Une récolte de quatre ou cinq points lors des trois prochaines rencontres à domicile pourrait vraiment rehausser la confiance du Tricolore avant qu’il ne reprenne la route à nouveau pour un segment de quatre matchs.

 

Mon collègue Marc Denis raconte souvent qu’il a déjà évolué dans le passé pour des équipes qui étaient déjà « éliminées à l’Halloween » et même si le Canadien pourrait se retrouver en pareille position cette saison, il reste que les Blue Jackets de Columbus de l’époque étaient une formation d’expansion, qui n’avait pas le niveau de talent de ses rivaux, à ce moment. D’autres estiment, par ailleurs, que c’est autour de la Fête de l’Action de grâce américaine que se dessine le vrai portrait, aux deux tiers du mois de novembre. Personnellement,  je crois que la fenêtre d’évaluation doit s’étirer jusqu’au 15 décembre, à la veille du traditionnel long voyage du temps des Fêtes et au lendemain du long séjour à domicile du Canadien. L’équipe aura alors disputé 32 rencontres, dont 19 au Centre Bell. Elle aura joué exactement la moitié de ses matchs contre les équipes des deux associations, un excellent échantillon pour mesurer son potentiel réel. C’est alors qu’on pourra mieux connaître les perspectives d’avenir.

 

Car n’oublions pas une chose très importante, Marc Bergevin ne doit pas seulement penser à la saison en cours. Il doit penser à la suivante et à la suivante, et à la suivante et ce, dans le contexte étouffant du plafond salarial, des contrats à très long terme et des clauses de non-mouvement qui se retrouvent dans les ententes des joueurs d’impact. Il doit regarder le portrait de son équipe à court terme, trouver la façon d’améliorer les choses le plus rapidement possible, sans pour autant négliger le long terme. Ce n’est pas un exercice aussi facile qu’on le croit.

 

Apposer un jugement définitif sur la valeur compétitive du Canadien de Montréal dès maintenant m’apparaît fort périlleux. Le faire à la mi-décembre, dans le contexte décrit plus haut, me semble beaucoup plus prudent, sur les bases du court et du long terme.

 

Car je n’en démords pas. Pour moi, le début de saison du Canadien est un non-sens total!

 

Cela dit, si j’ai tort, si le temps prouve plutôt que cette équipe en est vraiment rendue là, hors de tout doute raisonnable, il faudra alors repartir à zéro et prendre les décisions courageuses qui s’imposeront alors.