Quelques enfants exceptionnels, des jeunes surdoués du hockey comme Vincent Lecavalier et José Théodore, étaient déjà identifiés "Ligue nationale" vers 11 ou 12 ans. Ce n'était pas du tout le cas avec Martin Brodeur, qui aime bien rappeler qu'il a gagné son tout premier tournoi en 1995, à l'âge de 23 ans, quand il a mené les Devils à la conquête de leur première coupe Stanley.

Brodeur a grandi dans une famille de sportifs. Tout jeune, il suivait son père Denis, photographe au Canadien et aux Expos.

Après avoir effectué ses premiers pas à l'attaque, le petit dernier de la famille Brodeur décide de suivre les pas de son célèbre paternel en devenant gardien de but la saison suivante. Immédiatement, Martin se débrouille bien devant le filet, mais il est aussi très bon au baseball et au golf.

Les années passent et le jeune garçon se développe, pas plus vite et plus lentement que les autres jeunes joueurs de la région. Toutefois, au début de l'adolescence, arrivé dans les rangs bantam, son entraîneur le laisse injustement de côté pour quelques parties. Le plaisir n'est plus au rendez-vous. Martin quitte le hockey.

"Après quelques matchs, Martin a lâché le hockey pour le ski alpin. C'était réellement fini, se souvient Claude Brodeur. En tant que grand frère, on s'est assis et on a jasé."

"Une chance que Claude y a vu, a déclaré Denis Brodeur. Il lui a dit, 'Ça va faire là. Embarque dans l'auto pis je vais aller te conduire à ta pratique'."

"Je lui ai dis : 'Fais pas ce qui m'est arrivé avec le baseball, a ajouté Claude. À 30 ans, je me demandais si j'aurais pu réussir. Arrange-toi pas pour être assis dans le divan à 40 ans à te poser le même genre de questions'."

"Quand tu es bien encadré, tu écoutes les personnes qui vont t'aider, a soutenu le gardien des Devils. À ce moment-là, mon frère avait vu quelque chose en moi. Il ne pensait sûrement pas que j'allais un jour jouer dans la LNH. Il voulait me donner la chance de mettre ma tête comme du monde. Malheureusement, quand tu es jeune, tu n'écoutes plus toujours les personnes qui sont importantes dans ta vie. C'est important de suivre les personnes qui ont de l'expérience."

Que Claude soit intervenu de la sorte pendant que ses parents étaient au camp d'entraînement des Expos, ce n'est pas surprenant car la famille Brodeur, c'est un clan tissé serré. D'ailleurs, peu importe l'événement, Martin est rarement seul à le vivre, surtout quand c'est important.

"Mes frères et mon père ont toujours rêvé de vivre ce que je vis en ce moment. Toute ma carrière, j'ai pris le temps d'essayer de les incorporer dans mes activités en les amenant avec moi aux matchs des étoiles et à la remise des trophées de la LNH, notamment. On a vécu mon succès en famille, en gang."

Martin devrait avoir encore plusieurs beaux moments à partager avec sa famille d'ici à ce qu'il accroche ses jambières. Son frère Claude explique le secret de sa longévité alors que son père Denis, lui, se permet une prédiction pour ce record qu'il n'a pas fini d'améliorer.

"Son calme est assommant. Je l'ai vu en séries dans des matchs cruciaux qui étaient rendus en deuxième ou troisième prolongation. Dans les gradins, je me rongeais les ongles jusqu'au coude et lui il me regardait en riant de moi. Il n'a aucun nerf. Même lors d'un septième match de la coupe Stanley, il s'amuse comme s'il jouait dans la rues."

"Moi je pense qu'il devrait se rendre de 650 à 675 matchs", a déclaré son paternel.

Dans l'esprit de tous, le record de 2857 points amassés par Wayne Gretzky ne sera jamais menacé. Lorsque Martin Brodeur mettra un terme à sa carrière et qu'il se rendra directement au Temple de la Renommée, on dira sûrement la même chose en regardant la colonne de ses victoires.

D'après un reportage de Luc Gélinas