Lorsqu'il a choisi de s'inscrire à l'Université McGill, Mathieu Darche ne se doutait pas qu'un jour, il disputerait plus de 250 matchs dans la Ligue nationale, dont plus de la moitié de ceux-ci dans l'uniforme des Canadiens de Montréal.

C'est qu'en mettant les pieds dans cette prestigieuse université canadienne, Darche savait très bien qu'il ne devait pas se faire de fausses idées quant à son avenir de hockeyeur professionnel.

« Lorsque l'on joue au niveau universitaire canadien, il faut se montrer réaliste », a expliqué le sympathique attaquant du Canadien. « Sans mentir, je dirais que pendant mes quatre années à McGill, jamais l'idée de jouer un jour dans la LNH ne m'a traversé l'esprit. Mes aspirations d'une carrière professionnelle avaient pris le bord et mes études étaient devenues ma première priorité. »

Heureusement, ce choix n'a pas empêché Darche de faire ce qu'il aimait le plus dans la vie. Au contraire, lors de son inscription à McGill, on lui a promis qu'il pourrait pratiquer ce sport qui a toujours fait partie de sa vie.

« J'ai joint l'équipe des Redmen pour le plaisir de jouer au hockey », a confié le Québécois maintenant âgé de 35 ans. « McGill représentait une des meilleures universités au Canada et je pouvais y jouer au hockey. Pour moi, c'était la combinaison parfaite. »

Chose certaine, ce passage sous les ordres de Martin Raymond a été bénéfique pour Darche. Il a pris énormément de maturité de sorte qu'après sa quatrième saison au sein des Redmen et surtout, après avoir obtenu son diplôme en administration avec une majeure en marketing, il a remis son avenir en question.

« Ma dernière saison a vraiment été bonne et agréable », a raconté celui qui a terminé au premier rang des pointeurs de son équipe avec 62 points en 26 matchs. « Je me suis dit qu'il serait intéressant de tenter ma chance au niveau professionnel. Mais la LNH était encore loin et je devais y aller une étape à la fois. »

« Avec mon diplôme, j'avais une pression de moins qui me permettait de l'essayer. Je savais que je pouvais avoir un plan B au cas où ça ne fonctionnerait pas. »

Darche se dit fier d'avoir emprunté ce chemin non conventionnel afin de réaliser son rêve de jouer un jour le circuit Bettman, surtout qu'il considère avoir passé les plus belles années de sa vie à McGill.

« Dans l'uniforme des Redmen, j'ai appris énormément. À chaque année, on s'améliorait », se rappelle-t-il. « Contrairement au hockey professionnel, tu passes quatre ans avec les mêmes gars (11 joueurs sont entrés en même temps que Darche). Une camaraderie n'a pas le choix de se développer. Tu passes la majorité de ton temps avec ces gars-là : dans les cours, sur la patinoire, dans les partys. J'ai eu énormément de plaisir et avec le recul, je me dis que je n'y changerais rien. »

Miser davantage sur les études

Selon le point de vue de Darche, le développement d'un hockeyeur devrait davantage passer par les écoles. D'ailleurs, Martin St-Louis et lui ont décidé de parrainer la ligue de hockey préparatoire scolaire, qui promeut le hockey sans délaisser pour autant les études.

« Le pourcentage des joueurs qui feront carrière dans la LNH un jour est très faible. Les jeunes ne doivent donc pas se ramasser avec rien devant eux. C'est pourquoi je crois que l'idée de pouvoir combiner les deux, c'est l'idéal. »

L'attaquant québécois aimerait que ça se déroule comme aux États-Unis, c'est-à-dire de faire de l'école un passage obligé avant de parvenir à une carrière sportive professionnelle. Il affirme qu'un tel système serait bénéfique pour préparer les jeunes Québécois à un futur plus certain. Par contre, il sait très bien que ça pourrait prendre un certain temps, ainsi qu'une volonté commune avant que ça survienne.

« Malheureusement, ce n'est pas la mentalité canadienne d'investir dans le sport dans les écoles et je crois que c'est déplorable. Je ne suis pas là pour dire que le hockey junior, ce n'est pas bon, au contraire. Les gars ont l'opportunité d'aller à l'école s'ils le veulent. Toutefois, c'est moins encadré qu'au niveau universitaire. »

« Lorsque tu joues pour ton école, il y a des standards académiques à respecter. Aux États-Unis, si tu ne remplis pas ces standards, tu ne peux pas jouer, point final. Ça prépare davantage les jeunes pour leur vie après le hockey. »

Des parcours similaires

Tout comme Mathieu Darche, les attaquants Dominic Moore et Martin St-Louis ont choisi de ne pas tout miser sur le hockey.

Moore, qui a fait ses études à Harvard avant d'atteindre la Ligue nationale, a fait savoir qu'il a toujours fait de la LNH sa priorité, mais après avoir étudié un certain temps.

« Je n'ai jamais cru que je sacrifiais quelque chose en allant à l'université », a expliqué le joueur des Sharks. « Les gens que tu rencontres sont extrêmement spéciaux. Je me compte très chanceux d'avoir pu étudier là-bas. »

Moore souligne que l'université est la place idéale pour se développer physiquement en vue d'une carrière de hockeyeur professionnel. Étant donné que les étudiants disputent très peu de matchs, ils ont l'opportunité de soulever des poids et d'acquérir une bonne masse musculaire. De telle sorte, ils atteignent la LNH alors lorsqu'ils sont matures, lorsqu'ils sont devenus des adultes.

« J'aimerais voir plus de jeunes passer par le réseau universitaire, canadien ou américain », a-t-il soutenu. La qualité du jeu est nettement améliorée et c'est une belle route à explorer pour les joueurs qui n'ont pas nécessairement le talent pour avoir une place assurée dans la Ligue nationale. »

De son côté, Martin St-Louis a opté pour l'université en raison de sa petite taille qui lui fermait beaucoup de portes chez les équipes du circuit Bettman.

« Dans ce temps-là, les petits joueurs ne trouvaient pas leur place facilement dans la Ligue nationale », se rappelle-t-il. « Au début des années 90, il n'y avait que quelques exceptions. Je voulais être sûr d'ouvrir mes horizons au cas où ça ne fonctionnerait pas. »

St-Louis abonde dans le même sens que Moore lorsqu'il mentionne que l'université lui a permis de se développer physiquement.

« C'est clair que ce passage-là m'a aidé. Quand je suis tombé au niveau professionnel, j'avais 22 ans et non 18 ans. J'avais bénéficié de quatre ans pour développer ma force physique. »

En somme, St-Louis juge qu'il a pris la bonne décision et il inciterait davantage les jeunes à fréquenter ces institutions.

« Que ce soit au niveau universitaire ou dans la LHJMQ, il faut que les jeunes aillent à l'école. Je sais que c'est difficile de trouver le temps quand t'es dans le junior, mais si tu as une bonne discipline personnelle, il n'y a pas de raison pour ne pas réussir ce qui est entrepris. »