MONTRÉAL – Pour bien des amateurs de hockey, même les plus geeks, même ceux de sa propre ville natale, Jeremy Davies n’est probablement qu’un nom dans la réponse à une question quiz.

En plus des deux choix de deuxième ronde inclus dans le troc, qui sont les deux joueurs que les Predators de Nashville ont obtenu dans la transaction qui a envoyé P.K. Subban au New Jersey? L’un d’eux est Steven Santini. Si vous n’avez pas encore compris qui est le deuxième, c’est peut-être l’heure de votre deuxième café.

Davies venait de terminer sa troisième saison à l’Université Northeastern quand les Devils l’ont utilisé comme monnaie d’échange afin d’acquérir celui qu’ils croyaient alors être leur prochain quart-arrière. Le jeune Montréalais avait déjà commencé à se monter un dossier fort intéressant à l’époque. Meilleur pointeur parmi tous les défenseurs de la Conférence Hockey East à sa deuxième saison dans la NCAA. Deuxième défenseur le plus productif sur le même territoire, derrière un certain Cale Makar, l’année suivante. Naturellement, les Predators avaient vu en lui un beau potentiel.

Dans sa nouvelle organisation, Davies a trouvé un environnement idéal pour faire la transition chez les professionnels. Les Admirals de Milwaukee formaient l’an dernier une équipe talentueuse et aguerrie, une équipe qui dominait outrageusement la Ligue américaine avant l’arrêt précoce de la saison. À 22 ans, leur nouvelle recrue a pu vivre ses premières expériences sans trop de pression et dans l’harmonie la plus totale.

Cette année, Davies en voulait un peu plus. Plus de temps de jeu, plus de responsabilités, plus de défis. Il a obtenu tout ça et il s’en acquitte très bien. Si bien que sans faire trop de bruit, le défenseur québécois est en train de s’imposer comme l’un des bons défenseurs de la LAH.

« J’ai un rôle un peu plus important dans cette équipe, discutait le natif de Ste-Anne-de-Bellevue dans un récent entretien avec RDS. Je suis vraiment content, je joue dans toutes les situations. J’essaie de m’impliquer offensivement, mais en même temps j’essaie de garder mon jeu défensif tight et jouer de la bonne façon dans la zone défensive parce que si je veux me rendre au prochain niveau, il faut que je sois solide dans les trois zones. Ça va bien à date. »

Offensivement, les chiffres affichés par Davies depuis le début de la saison sont dans la continuité de ce qu’il a toujours livré. Il a inscrit son nom à la feuille de pointage dans sept des neuf matchs de son équipe jusqu’ici. Avec neuf points au compteur, il est le troisième meilleur pointeur parmi les défenseurs de la LAH. Un seul défenseur a cadré plus de tirs que lui et son bilan défensif de +10 n’est égalé que par deux confrères.

Cette dernière statistique est certainement teintée par les succès offensifs de son équipe, qui maintient une moyenne de près de cinq buts par match depuis la relance du calendrier. Mais Davies croit qu’elle reflète aussi tout le temps qu’il investit pour éliminer les carences dans son jeu.    

« Le jeu offensif, c’est un peu plus naturel pour moi. J’ai joué beaucoup comme attaquant quand j’étais jeune et mon père organise des matchs de 3-contre-3 à Montréal. J’ai joué dans peut-être 3000 parties de 3-contre-3 ! Mais il y a tellement des bons joueurs offensifs dans cette ligue-là et c’est vraiment une technique sur laquelle il faut que tu travailles, défendre dans ta propre zone. Il y a des gars qui sont vraiment gros, vites et intelligents. Il faut vraiment que je regarde beaucoup de vidéo et que je travaille fort dans les pratiques. »  

Le matin de notre entrevue, Davies dit qu’il avait étudié des séquences vidéos pendant une trentaine de minutes avec Scott Ford, l’entraîneur des défenseurs des Admirals.

« Je veux vraiment travailler sur mon jeu défensif parce que pour se rendre au prochain niveau, tu ne peux pas être juste offensif. »

Une saison spéciale

On vous parlait il y a quelques semaines de la situation particulière dans laquelle se trouve cette année Benoît Groulx. Parce que l’incapacité d’accueillir des spectateurs a forcé quelques équipes de la LAH à suspendre temporairement leurs activités, l’entraîneur du club-école du Lightning de Tampa Bay a hérité d’une poignée d’espoirs des Panthers de la Floride.

Jeremy Davies se retrouve dans un contexte similaire. Quand la fermeture des guichets a mené à la capitulation des Admirals, il s’est retrouvé pendant un bref instant dans le néant, ne sachant trop ce qui allait lui arriver en 2021.

« On était à Nashville quand on a entendu que Milwaukee ne ferait pas la saison. On ne savait pas trop comment ça allait marcher. On s’est dit : ‘Si on n’est pas pour être ici à Nashville, où est-ce qu’on va être?’ »

Quelques jours plus tard, Davies était dans une voiture en direction de Chicago. Il y passera finalement l’année avec les Wolves, un club qui accueille aussi les espoirs des Hurricanes de la Caroline. L’équipe l’a installé dans une chambre d’hôtel de style appartement avec son coéquipier Tommy Novak, qui avait aussi été son cochambreur chez les juniors. Il y passera le reste de l’hiver.  

« C’était quand même un peu excitant parce qu’on a regardé les alignements des deux équipes et on s’est dit qu’on aurait vraiment une bonne équipe. Et c’est ça qui est arrivé. »

Quelque chose de spécial se passe effectivement chez les Wolves, où quatre joueurs d’âge junior cassent présentement la baraque. Seth Jarvis, qui vient d’avoir 19 ans, est le meilleur marqueur de la Ligue avec onze points en neuf matchs. Philip Tomasino, le choix de première ronde des Preds en 2019, a sept points en autant de matchs. Ryan Suzuki et Jamieson Rees, les 28e et 44e sélections de ce même repêchage, apportent aussi une contribution non-négligeable.

Grâce à cette infusion de talent, les Wolves n’ont subi qu’une seule défaite dans le dernier mois.

« Honnêtement, ça nous a quand même surpris au début, dit Davies. D’habitude la Ligue américaine, c’est dur pour les jeunes. Je sais c’est quoi, j’étais dans cette position-là l’année passée. Mais ils sont vraiment talentueux ceux qu’on a cette année, ils patinent vite et ils jouent vraiment hard. Après les avoir regardés en pratique, je ne suis pas vraiment pas surpris de voir ce qui se passe présentement. Nos deux groupes se sont bien fusionnés ensemble et au bout du compte, c’est presqu’une saison de hockey comme une autre. »