L'enquête devra avoir des dents
Hockey jeudi, 10 mars 2011. 16:26 samedi, 14 déc. 2024. 08:07
Le courroux du public québécois n'est pas à la veille de s'apaiser. Le problème, c'est que la protestation actuelle se limite surtout au Québec. Ailleurs, on trouve absolument terrible ce qui est arrivé à Max Pacioretty qui, en ce moment, n'a probablement plus le même avenir dans le sport qu'il avait choisi d'exercer comme carrière.
D'un bout à l'autre de l'Amérique, on visionne sur toutes les chaînes les images horribles de l'agression qu'il a subie et on se dit qu'après tout, ce terrible accident est parfaitement en accord avec ce que la Ligue nationale est devenue. On baisse les bras en admettant que peu importe tout ce qu'on peut dire et écrire sur le sujet, rien n'y fera.
Si on a fermé les yeux quand le joueur le plus complet de la ligue, Sidney Crosby, a été perdu pour la saison, comment pourrait-on s'offusquer du fait qu'un jeune athlète sans nom quitte la patinoire sur une civière?
Pacioretty va s'en remettre, croit-on sans doute dans les bureaux de la ligue. Son agresseur, lui, va poursuivre ses assauts souvent démesurés qu'il tente toujours de déguiser en simples mises en échec.
Zdeno Chara sait qu'il est le plus grand, le gros lourd, le plus fort. Le problème, c'est qu'il ne se préoccupe pas de la taille des joueurs qu'il frappe. Généralement, les gros ne s'attaquent pas aux petits, une action plutôt gênante si le petit en sort amoché. Pas Chara, cependant, qui aime bien faire étalage de sa puissance en toutes circonstances. Ainsi, si tu fais dans les cinq pieds et sept pouces et que tu as le malheur de te retrouver dans le même coin de patinoire que lui, il va baisser ses longs bras pour être bien sûr de pouvoir te labourer la face de ses larges palettes. On appelle ça de la brutalité inutile et de l'intimidation.
Durant ce match qui risque de devenir tristement célèbre, il avait déjà cloué David Desharnais de toutes ses forces dans la bande. Comme s'il avait voulu le refouler dans la cinquième rangée des gradins. Du Chara tout craché, une brute auréolée d'un statut de superstar. Un statut qui lui vaut justement d'être bien protégé par la ligue.
Tout le Québec est courroucé de ce qui s'est passé. Croyez-vous un seul instant que cela dérange Bettman qui continue de fermer les yeux sur une violence répétée qui ternit l'image d'un très beau sport quand il est bien joué? Pour le commissaire du hockey, les Québécois sont d'éternels braillards. Il faut qu'ils le soient parce qu'ils sont généralement les seuls à protester ou à se plaindre. C'est ce qu'il pensait d'eux quand la presse d'ici appuyait Mario Lemieux dans sa démarche futile pour enrayer l'accrochage. Bettman s'était moqué des jérémiades de Lemieux, un peu comme il a ignoré sa récente remarque blâmant la ligue dans le cas de Crosby.
Si les médias et le public des 30 villes du circuit s'attaquaient massivement au manque de sérieux des têtes dirigeantes de la ligue, s'ils s'appliquaient à ternir l'image de Bettman, de Colin Campbell et de tous ceux qui se cachent derrière des règlements rarement appliqués pour rendre leurs sanctions et s'ils allaient même jusqu'à mettre subtilement en doute leur intégrité, peut-être auraient-ils plus de chance d'être entendus. Le simple fait que les hauts cris ne se limiteraient plus uniquement au Québec contribuerait peut-être à exercer sur eux une pression qui finirait par les étouffer et par les faire réagir. Je dis bien peut-être parce que ces gens-là ont une capacité assez étonnante de résister à la pression publique.
Si quelqu'un avait assommé un simple citoyen en lui poussant la tête contre un lampadaire, il serait déjà accusé de tentative de meurtre. Un geste identique survenu dans un sport rapide, où chacun doit cependant être responsable de ses actions, est resté totalement impuni. Bien sûr, dans le cas de Chara, c'est la faute au lampadaire.
À Boston, on n'est pas à court de compliments pour enjoliver le talent de Chara et pour excuser sa sauvagerie. Il n'est pas du genre à expédier des rivaux à l'infirmerie ou à l'hôpital, dit-on. Il joue dur, mais à l'intérieur des règles. Est-ce de sa faute s'il est plus gros et plus grand que tout le monde? Claude Julien, Patrice Bergeron et tous ceux qui ont donné leur opinion au sujet de cette tentative de meurtre sportive l'ont dit. Chara est un bon gars, un joueur étoile, un athlète de grand talent. Bien sûr. Diriez-vous autre chose d'un coéquipier qui vous fait grandir d'un pied chaque soir?
On lui trouve des excuses dans tout Boston. En contrepartie, souvenez-vous de la réaction québécoise après qu'on ait vu Patrice Bergeron étendu, totalement inanimé sur la patinoire, à la suite d'une mise en échec vicieuse administrée par derrière? On a craint pour lui, pour sa carrière et même pour sa vie quand il ne s'est pas relevé. On a ressenti un pincement au coeur quand il s'est présenté dans un point de presse quelques semaines plus tard, le regard perdu et la démarche incertaine. On s'est tous demandé s'il allait ressembler toute sa vie au quasi-paraplégique qu'on avait sous les yeux. Et on a protesté encore vainement contre cette autre démonstration de pure violence.
Bergeron était un Bruin, mais cela n'avait rien à voir. On avait sous les yeux un bel athlète dont la carrière semblait compromise et on souffrait avec lui et avec les membres de sa famille.
Que justice soit faite
Personnellement, je n'ai jamais approuvé que le bras de la justice s'immisce dans des causes sportives. À mes yeux, c'est à l'autorité du sport de prendre position quand un acte blâmable est posé. Bref, c'est à elle de faire le ménage dans sa propre cour. Pas cette fois, cependant. Cette fois, une enquête est inévitable.
Les 30 organisations de la Ligue nationale, qui ont une peur bleue de voir un ministère de la justice ou un procureur de la couronne venir régler leurs problèmes à leur place, savent sans doute qu'ils vivent sur du temps emprunté. Ce jour-là est peut-être arrivé.
Cette fois, je suis d'accord, comme une bonne partie du Québec l'est sans doute. Si la ligue refuse totalement de faire observer ses règlements, quelqu'un d'autre devra le faire.
J'espère sincèrement que personne ne viendra se placer en travers de l'enquête policière qui se prépare. J'espère sincèrement qu'un juge quelque part aura suffisamment de cran pour émettre autre chose que de simples recommandations. Il ne faut pas que cette enquête, qui pourrait coûter un million ou deux, comme c'est généralement le cas, ne débouchera pas sur une simple tape sur les doigts de la ligue ou de Chara. Cette enquête devra avoir des dents.
Que Colin Campbell, sous prétexte d'être en conflit d'intérêts parce que son fils porte le même chandail que Chara, laisse Mike Murphy rendre publique une décision qu'il a probablement prise lui-même, juge l'agression de Chara comme une simple mise en échec est inconcevable, risible et totalement dépourvue de jugement.
En étudiant la cause, on a volontairement escamoté l'historique de la saison entre les deux joueurs. On a feint d'ignorer le très visible projet de vengeance de Chara qui cherchait à remettre brutalement une simple poussée de Pacioretty à son endroit. On n'a pas tenu compte que le King Kong des Bruins lui courait après depuis deux matchs et que ce n'était qu'une question de temps avant qu'il ne transforme en coup de matraque le soufflet que lui avait servi le joueur du Canadien. C'était si évidemment que la tête de Pacioretty était mise à prix que dans la dernière minute du match à Boston, on le cherchait encore.
Et je vous pose une petite question comme ça, en passant. Est-ce le fruit de mon imagination ou si un joueur des Bruins a déverrouillé la porte du banc des joueurs au moment où Pacioretty allait être frappé, ce qui aurait pu lui occasionner une blessure plus grave encore?
Je suis étonné que personne n'ait soulevé cette possibilité. Revoyez le film de l'agression. Pourquoi la porte est-elle entrebâillée au moment où Chara pousse délibérément le joueur de 22 ans contre le poteau indiquant le début de la baie vitrée? Ce n'était certainement pour favoriser le retour au banc du gros défenseur qui avait visiblement autre chose en tête.
Si un joueur des Bruins a volontairement levé le loquet de la porte dans l'espoir de voir Pacioretty s'y engouffrer tête première, c'est mesquin, c'est cheap et c'est assurément débile.
Voilà un élément qui pourrait faire partie de l'enquête policière. Une enquête, souhaitons-le, qui mettra un peu de plomb dans la tête de ceux qui ont exonéré Chara de tout blâme.
D'un bout à l'autre de l'Amérique, on visionne sur toutes les chaînes les images horribles de l'agression qu'il a subie et on se dit qu'après tout, ce terrible accident est parfaitement en accord avec ce que la Ligue nationale est devenue. On baisse les bras en admettant que peu importe tout ce qu'on peut dire et écrire sur le sujet, rien n'y fera.
Si on a fermé les yeux quand le joueur le plus complet de la ligue, Sidney Crosby, a été perdu pour la saison, comment pourrait-on s'offusquer du fait qu'un jeune athlète sans nom quitte la patinoire sur une civière?
Pacioretty va s'en remettre, croit-on sans doute dans les bureaux de la ligue. Son agresseur, lui, va poursuivre ses assauts souvent démesurés qu'il tente toujours de déguiser en simples mises en échec.
Zdeno Chara sait qu'il est le plus grand, le gros lourd, le plus fort. Le problème, c'est qu'il ne se préoccupe pas de la taille des joueurs qu'il frappe. Généralement, les gros ne s'attaquent pas aux petits, une action plutôt gênante si le petit en sort amoché. Pas Chara, cependant, qui aime bien faire étalage de sa puissance en toutes circonstances. Ainsi, si tu fais dans les cinq pieds et sept pouces et que tu as le malheur de te retrouver dans le même coin de patinoire que lui, il va baisser ses longs bras pour être bien sûr de pouvoir te labourer la face de ses larges palettes. On appelle ça de la brutalité inutile et de l'intimidation.
Durant ce match qui risque de devenir tristement célèbre, il avait déjà cloué David Desharnais de toutes ses forces dans la bande. Comme s'il avait voulu le refouler dans la cinquième rangée des gradins. Du Chara tout craché, une brute auréolée d'un statut de superstar. Un statut qui lui vaut justement d'être bien protégé par la ligue.
Tout le Québec est courroucé de ce qui s'est passé. Croyez-vous un seul instant que cela dérange Bettman qui continue de fermer les yeux sur une violence répétée qui ternit l'image d'un très beau sport quand il est bien joué? Pour le commissaire du hockey, les Québécois sont d'éternels braillards. Il faut qu'ils le soient parce qu'ils sont généralement les seuls à protester ou à se plaindre. C'est ce qu'il pensait d'eux quand la presse d'ici appuyait Mario Lemieux dans sa démarche futile pour enrayer l'accrochage. Bettman s'était moqué des jérémiades de Lemieux, un peu comme il a ignoré sa récente remarque blâmant la ligue dans le cas de Crosby.
Si les médias et le public des 30 villes du circuit s'attaquaient massivement au manque de sérieux des têtes dirigeantes de la ligue, s'ils s'appliquaient à ternir l'image de Bettman, de Colin Campbell et de tous ceux qui se cachent derrière des règlements rarement appliqués pour rendre leurs sanctions et s'ils allaient même jusqu'à mettre subtilement en doute leur intégrité, peut-être auraient-ils plus de chance d'être entendus. Le simple fait que les hauts cris ne se limiteraient plus uniquement au Québec contribuerait peut-être à exercer sur eux une pression qui finirait par les étouffer et par les faire réagir. Je dis bien peut-être parce que ces gens-là ont une capacité assez étonnante de résister à la pression publique.
Si quelqu'un avait assommé un simple citoyen en lui poussant la tête contre un lampadaire, il serait déjà accusé de tentative de meurtre. Un geste identique survenu dans un sport rapide, où chacun doit cependant être responsable de ses actions, est resté totalement impuni. Bien sûr, dans le cas de Chara, c'est la faute au lampadaire.
À Boston, on n'est pas à court de compliments pour enjoliver le talent de Chara et pour excuser sa sauvagerie. Il n'est pas du genre à expédier des rivaux à l'infirmerie ou à l'hôpital, dit-on. Il joue dur, mais à l'intérieur des règles. Est-ce de sa faute s'il est plus gros et plus grand que tout le monde? Claude Julien, Patrice Bergeron et tous ceux qui ont donné leur opinion au sujet de cette tentative de meurtre sportive l'ont dit. Chara est un bon gars, un joueur étoile, un athlète de grand talent. Bien sûr. Diriez-vous autre chose d'un coéquipier qui vous fait grandir d'un pied chaque soir?
On lui trouve des excuses dans tout Boston. En contrepartie, souvenez-vous de la réaction québécoise après qu'on ait vu Patrice Bergeron étendu, totalement inanimé sur la patinoire, à la suite d'une mise en échec vicieuse administrée par derrière? On a craint pour lui, pour sa carrière et même pour sa vie quand il ne s'est pas relevé. On a ressenti un pincement au coeur quand il s'est présenté dans un point de presse quelques semaines plus tard, le regard perdu et la démarche incertaine. On s'est tous demandé s'il allait ressembler toute sa vie au quasi-paraplégique qu'on avait sous les yeux. Et on a protesté encore vainement contre cette autre démonstration de pure violence.
Bergeron était un Bruin, mais cela n'avait rien à voir. On avait sous les yeux un bel athlète dont la carrière semblait compromise et on souffrait avec lui et avec les membres de sa famille.
Que justice soit faite
Personnellement, je n'ai jamais approuvé que le bras de la justice s'immisce dans des causes sportives. À mes yeux, c'est à l'autorité du sport de prendre position quand un acte blâmable est posé. Bref, c'est à elle de faire le ménage dans sa propre cour. Pas cette fois, cependant. Cette fois, une enquête est inévitable.
Les 30 organisations de la Ligue nationale, qui ont une peur bleue de voir un ministère de la justice ou un procureur de la couronne venir régler leurs problèmes à leur place, savent sans doute qu'ils vivent sur du temps emprunté. Ce jour-là est peut-être arrivé.
Cette fois, je suis d'accord, comme une bonne partie du Québec l'est sans doute. Si la ligue refuse totalement de faire observer ses règlements, quelqu'un d'autre devra le faire.
J'espère sincèrement que personne ne viendra se placer en travers de l'enquête policière qui se prépare. J'espère sincèrement qu'un juge quelque part aura suffisamment de cran pour émettre autre chose que de simples recommandations. Il ne faut pas que cette enquête, qui pourrait coûter un million ou deux, comme c'est généralement le cas, ne débouchera pas sur une simple tape sur les doigts de la ligue ou de Chara. Cette enquête devra avoir des dents.
Que Colin Campbell, sous prétexte d'être en conflit d'intérêts parce que son fils porte le même chandail que Chara, laisse Mike Murphy rendre publique une décision qu'il a probablement prise lui-même, juge l'agression de Chara comme une simple mise en échec est inconcevable, risible et totalement dépourvue de jugement.
En étudiant la cause, on a volontairement escamoté l'historique de la saison entre les deux joueurs. On a feint d'ignorer le très visible projet de vengeance de Chara qui cherchait à remettre brutalement une simple poussée de Pacioretty à son endroit. On n'a pas tenu compte que le King Kong des Bruins lui courait après depuis deux matchs et que ce n'était qu'une question de temps avant qu'il ne transforme en coup de matraque le soufflet que lui avait servi le joueur du Canadien. C'était si évidemment que la tête de Pacioretty était mise à prix que dans la dernière minute du match à Boston, on le cherchait encore.
Et je vous pose une petite question comme ça, en passant. Est-ce le fruit de mon imagination ou si un joueur des Bruins a déverrouillé la porte du banc des joueurs au moment où Pacioretty allait être frappé, ce qui aurait pu lui occasionner une blessure plus grave encore?
Je suis étonné que personne n'ait soulevé cette possibilité. Revoyez le film de l'agression. Pourquoi la porte est-elle entrebâillée au moment où Chara pousse délibérément le joueur de 22 ans contre le poteau indiquant le début de la baie vitrée? Ce n'était certainement pour favoriser le retour au banc du gros défenseur qui avait visiblement autre chose en tête.
Si un joueur des Bruins a volontairement levé le loquet de la porte dans l'espoir de voir Pacioretty s'y engouffrer tête première, c'est mesquin, c'est cheap et c'est assurément débile.
Voilà un élément qui pourrait faire partie de l'enquête policière. Une enquête, souhaitons-le, qui mettra un peu de plomb dans la tête de ceux qui ont exonéré Chara de tout blâme.