Nikolai Vakurov n’est pas connu du grand public montréalais. Il a pourtant joué un rôle important au sein du Club de hockey Canadien de 1997 à 2010. Le Russe a occupé le poste d’éclaireur européen pour l’organisation.

« J’ai commencé à travailler pour le Canadien en novembre 1997. J’ai participé à tous les encans amateurs du club de 1999 à 2010. Je n’ai pas assisté au repêchage de 1998. C’est celui où nous avons repêché Andrei Markov. »

En juin 1998, Markov a été repêché en sixième ronde. Un peu plus tard cette même journée, le Canadien a aussi choisi Andrei Kruchinin. Le défenseur du Lada de Togliatti n’a toutefois jamais joué dans la LNH. Vakurov n’a peut-être pas assisté à ce repêchage de 1998, mais il a joué un rôle important dans la sélection du général à la ligne bleue du Tricolore.

Montreal_MarkovAndrei_490187873.jpg« J’ai recommandé la sélection de Markov à Antonin Routa, l’éclaireur en chef du club en Europe. C’était ma première année, je n’ai donc pas joué un rôle de premier plan dans ce choix. Pierre Dorion a pris la décision finale. Il était très enthousiaste à l’idée de le sélectionner. Je n’étais pas le seul à l’avoir vu jouer. Plusieurs autres éclaireurs de l’époque en faisaient le suivi. Cela inclut nos collègues nord-américains au sein de l’organisation. »

Avec Pavel Datsyuk et Henrik Zetterberg, Andrei Markov fait partie des plus grands vols des années 90. Aujourd’hui, le numéro 79 du Canadien est toujours un des plus grands défenseurs offensifs du globe. Nikolai Vakurov explique qu’en 1998, les choses ne sont toutefois pas aussi simples à prévoir.

« Nous avons été chanceux. Markov était connu des autres clubs. Au sein du Khimik de Voskresensk, il était un joueur de centre. Tous les éclaireurs savaient qu’il avait une bonne vision du jeu. Avant le repêchage, son entraîneur l’a transféré à la défense. À ce poste, à l’époque, il était facile à contourner. Je crois que cela a découragé plusieurs clubs de la LNH. Nous avons donc pu le repêcher tard et l’histoire nous a donné raison. »

Un autre défenseur fait la fierté de Vakurov. L’ancien éclaireur du Canadien devient enthousiaste lorsqu’il parle d’Alexei Emelin.

« Alexei jouait à Samara. Il était déjà au deuxième échelon russe de hockey senior à l’âge de 17 ans. Il frappait déjà tout ce qui bouge. Tous ses adversaires le détestaient et ils essayaient de le frapper en retour. Il n’avait aucun complexe par rapport à cela. C’était sa manière de jouer. Il n’en connaissait pas d’autres. Un peu comme Vladimir Konstantinov. »

Emelin a traversé l’Atlantique à l’âge de 25 ans. Avant de rejoindre le Canadien, le natif de Togliatti a remporté deux Coupes Gagarine avec l’Ak Bars de Kazan. Vakurov a une hypothèse expliquant l’arrivée tardive de l’actuel défenseur du Canadien dans la LNH.

« Ils auraient dû le mettre sous contrat plus tôt durant la saison. Ils essayaient de s’entendre avec lui durant le mois de mai. C’était trop tard. L’Ak Bars s’entendait avec lui plus tôt durant l’année. »

La filiale biélorusse

À l’époque, le territoire de Nikolai Vakurov s’étend sur toute l’ex-URSS. Cela inclut le Bélarus. L’arrivée des frères Kostitsyn est donc directement liée à son expertise.

Cette année-là, en 2003, je crois qu’Andrei était le meilleur joueur disponible. Nous l’avions vu jouer avec le Club de l’Armée rouge et l’équipe nationale du Bélarus. C’est un joueur très talentueux. Il se peut que son épilepsie ait joué sur son rang de sélection. Cela dit, les clubs savaient qu’un traitement adéquat contrôlerait la situation. »

Vakurov a aussi appuyé la sélection de Sergei. Il avoue toutefois que c’était surtout le choix de Trevor Timmins.

« Timmins adorait Sergei Kostitsyn. Je crois que le club a profité de ce choix de septième ronde. Sergei avait beaucoup de talent. Il a une excellente vision du jeu. Lorsque nous l’avons vu à Minsk, nous l’avons tout de suite mis sur notre liste. Il jouait pour le HC Gomel à l’époque. Nous avions déjà Andrei. Ça a joué un rôle dans notre sélection. En général, c’est une bonne formule de garder deux frères au sein d’une même formation. »Mikhail Grabovski

Les Kostitsyn ne sont pas les seuls Biélorusses à avoir été repêchés par le Canadien au début des années 2000. Lors de l’encan amateur de 2004, le club a sélectionné Mikhail Grabovski en quatrième ronde. Vakurov avoue qu’il a été surpris par la longévité de la carrière de l’actuel joueur de centre des Islanders.

« Pierre Gauthier voulait absolument le prendre. À l’époque, Grabovski était petit et il manquait de puissance. Il travaillait toutefois très fort. Il avait eu une excellente saison avec le Neftekhimik de Nijnekamsk dans la Superliga russe. Je l’ai revu quelques années après sa sélection et il avait gagné de la masse musculaire. Le secret de Mikhail, c’est son caractère. Il n’avait pas autant de talent que les Kostitsyn, mais il avait beaucoup de caractère. Je pense que c’est la raison pour laquelle Grabovski a eu plus de succès que les Kostitsyn. Les deux frères, à mon avis, ne sont pas allés jusqu’au bout de leur talent. »

D’éclaireurs à directeur sportif

Après avoir été licencié par le Canadien, en 2011, Vakurov a travaillé à titre d’éclaireur des Red Wings de Detroit. À l’été 2014, le Russe a ouvert un nouveau chapitre dans sa carrière en devenant le directeur sportif du HC Sochi.

« Pavel Bure et Viatcheslav Butsaev m’ont approché pour travailler avec le nouveau club. Nous avions travaillé ensemble au sein du Club de l‘Armée rouge, ce fut donc une transition facile pour moi. C’est une expérience extraordinaire. C’est un aspect du hockey que je n’avais pas encore vécu. Il faut recruter les joueurs et négocier pour signer des contrats. C’est très intéressant. »

Dans la KHL, peu de directeurs généraux ont travaillé pour les clubs de la LNH. Outre Nikolai Vakurov, on trouve Leonid Vaysfeld. Ce dernier a aussi travaillé à titre d’éclaireur, mais pour les Rangers de New York et les Maple Leafs de Toronto. Vakurov avoue que son bagage d’éclaireur de la LNH l’aide beaucoup dans son travail.

« Ça permet de bien connaître les joueurs. On est apte à mieux analyser le calibre de ces derniers. Il est important de recruter les joueurs en fonction d’accumuler des victoires. Comprendre comment leur rapidité et leur agilité peuvent aider l’équipe. »

Le club de Sotchi a été fondé à l’été 2014. Il joue ses matchs dans le Bolchoi Arena où se sont tenues les joutes du tournoi olympique. Le club a connu des difficultés financières durant les dernières années. Vakurov avoue que cela peut représenter un obstacle dans son travail de recrutement.

« La plus grande difficulté d’un directeur sportif, c’est de trouver de bons joueurs. C’est le problème de tous les directeurs généraux de la LNH et aussi de la KHL. C’est certain que les retards de salaires n’aident pas l’équipe dans cette tâche, mais nous réussissons à bien nous en sortir. Les joueurs savent que nous avons toujours réussi à verser les salaires dans leur entièreté. »

Le club s’est effectivement bien débrouillé depuis son entrée dans la KHL. Le HC Sotchi a participé aux séries éliminatoires à ses deux premières saisons et il se bat pour une place en séries encore cette saison. Sotchi est actuellement la seule équipe en deçà de la huitième place de l’Association de l’Ouest à encore pouvoir obtenir un billet pour les séries. Tout cela malgré une petite masse salariale. Il faut croire que l’ancien du Canadien n’a pas perdu la touche.

Andrei Kostitsyn Parmi les joueurs recrutés, on trouve un visage connu. L’actuel capitaine de l’équipe est Andrei Kostitsyn. L’ancien du Canadien en est à sa troisième saison au sein de la formation du Caucase. Nikolai Vakurov est bien content de l’avoir rapatrié dans les rangs de son club.

« Oui, je le connais bien, mais ce n’est pas la seule raison pour laquelle j’ai réussi à le recruter. Lorsqu’il est revenu de la LNH, tous les directeurs sportifs savaient qu’Andrei est un joueur extraordinaire. Lorsqu’il a été libéré du Traktor, ce fut un choix facile à faire. L’équipe avait besoin d’un joueur offensif. Nous l’avons donc invité et il a accepté. »

Nikolai Vakorov est toujours bien en selle dans le monde du hockey professionnel. Plusieurs journalistes russes le voient comme un des meilleurs directeurs sportifs de la KHL et le Hc Sochi semble tenir à ses services. Humble, l’homme de 47 ans cherche encore à partager la responsabilité de ses succès.

« J’ai travaillé pendant 17 ans avec le Canadien et ce fut un grand honneur pour moi. J’ai travaillé pour plusieurs directeurs généraux et avec beaucoup d’éclaireurs différents. Je leur suis tous très reconnaissant. Grâce à l’expérience qu’ils m’ont transmise, je suis aujourd’hui apte à travailler avec le HC Sotchi. »