Guy Carbonneau ne rate jamais une occasion pour consulter le sommaire des matchs des Stars de Dallas. Mercredi dernier, à New York, il s'est attardé longuement sur le résultat de l'affontement entre son ancienne équipe du Texas et les Kings de Los Angeles. Une dégelée de 8-0, les amis.

«Il faut que j'appelle Brett…» Brett Hull, vous aurez deviné, et Carbonneau se sont liés d'amitiés au fil des ans. Tout d'abord, les deux hommes ont évolué à St. Louis puis à Dallas. Carbo ne cache pas que sous la carapace de ce joueur controversé, d'un joueur qui y va parfois de déclarations incendiaires, se cache un compétiteur, un joueur qui n'accepte pas la défaite.

«C'est un guerrier et un vrai à part ça.»

Est-ce que Brett a dévoilé des choses intéressantes à son bon ami?
«Disons que ce ne fut pas une longue conversation…»

Loin et près de Dallas

Carbo a beau être à plusieurs centaines de kilomètres de Dallas, il sait très bien ce qui se passe à l'intérieur de l'équipe. Il n'ignore pas que les méthodes de Ken Hitchcock ne font plus l'unanimité. Il reconnaît qu'un entraineur ayant passé cinq ans avec la même équipe doit inévitablement changer de décor.

«On n'y peut rien, c'est ainsi que ça se passe dans le monde du sport», déclarait-il hier matin. Pourtant, Carbonneau n'est-il pas justement en train d'amorcer une carrière dans un monde sans pitié. Dans un monde où les entraineurs, en bout de ligne, n'ont jamais le dernier mot.
Pourquoi alors s'embarquer dans une telle galère?

«Sans doute parce qu'on aime ça.»

Si jamais les Stars se retrouvent dans une situation corsée, si jamais Bob Gainey devait en arriver à prendre des décisions draconiennes pour secouer une équipe qui connaît une saison en dents de scie, le nom de Carbonneau alimenterait sûrement les rumeurs. Et pourquoi pas? On parle d'un ex-joueur qui a connu une brillante carrière dans un rôle bien particulier. On parle d'un observateur averti, d'un ex-joueur qui ne craignait pas d'émettre ses opinions ou encore d'engueuler un coéquipier quand il n'enfonçait pas la pédale dans le plancher.

Dans la peau de l'entraineur

«C'est ça le plus difficile, enlever son chandail puis passer à autres choses. A mes débuts derrière le banc, je pensais encore comme un joueur. Je réfléchissais tout haut et je disais des choses blessantes. Comme joueur, tu peux dire à un défenseur ou à un attaquant qu'il a été pourri, qu'à sa prochaine présence, il devra jouer avec ses tripes.

«Comme entraineur ou entraineur-adjoint, oups, c'est pas la même chose.»

Si Michel Therrien accomplit un boulot sans bavure avec le Canadien, c'est tout simplement parce qu'il tire profit de l'expérience de ses deux adjoints, Rick Green et Carbo. «Mais, ça va aussi de l'autre côté. Il y a quelques semaines, Michel m'a dit de faire attention dans mes remarques à un joueur qui revient d'une séquence pas très convaincante.

«Sois prudent, m'a-t-il dit, l'an dernier, je réagissais comme toi et j'ai failli être au centre d'une mutilerie. Michel a raison. Tu ne peux pas tenir les mêmes propos dans la peau d'un entraineur. Les encouragements sont beaucoup plus importants que les remarques sévères et parfois cruelles. Dans un sens, si un joueur commet une gaffe dans la couverture défensive, il le sait. Alors, un entraineur doit garder ses énergies pour multiplier les encouragements. Si un joueur fait un bon coup, tu lui dis. S'il fait un mauvais coup, tu le laisses réfléchir, quitte à lui rappeler sa bévue le lendemain à l'entrainement.»

A-t-il finalement fait la transition?

«Ça s'en vient. En tous les cas, je suis plus calme, plus détendu. Rick Green aussi. On se complète bien. On sait que Michel absorbe toute la pression, aussi il arrive pendant un match, quand ça va bien, je vais lui faire une blague…»

Carbonneau apprend sur le tas, il se prépare intelligemment à une carrière qui n'est pas de tout repos. Une carrière encore plus exigeante que celle du hockeyeur, un carrière qui demande beaucoup de patience, beaucoup de doigté dans les rapports avec les joueurs. Une carrière qui met solidement à l'épreuve l'égo du pilote.

Mais, il y a des côtés valorisants, surtout quand, pendant toute sa carrière, on a goûté au leadership. Et ça, ça n'a pas de prix… même si on sait très bien que les joueurs décident de ton sort à tout moment. Comme ce fut le cas pour cinq entraineurs cette saison, comme ça risque d'être le cas pour Hitchcock.