Un battement d'ailes à la fois, le Phoenix de Sherbrooke prend son envol.

« Ç'a parti très rough. On n'a pas seulement subi une série de défaites, on en a mangé des sincères. Heureusement, ça va mieux », relève l'entraîneur-chef Judes Vallée, en entrevue au RDS.ca.

9-2, 6-0, 5-0, 7-4… Surclassé, le Phoenix a d'abord encaissé les raclées. S'inclinant à ses huit premiers matchs, la formation des Cantons de l'Est a alors connu le pire début de saison de l'histoire de la LHJMQ pour une équipe d'expansion.

« J'ai toujours cru que plus une série de revers se prolonge, plus tu t'approches de la victoire », relativise Vallée.

Ce n'est que le 10 octobre, soit près de trois semaines après son match inaugural, que le Phoenix a finalement signé le premier gain de sa courte existence, s'imposant 6-2 face aux Voltigeurs de Drummondville.

« Après cette victoire, on a décollé », observe le pilote.

N'allez toutefois pas croire que le Phoenix flirte avec le sommet du classement général. Il ne multiplie pas les séries victorieuses non plus. Il se bat chaque soir, tout simplement.

Après avoir été locataire du sous-sol de la LHJMQ pendant quelque temps, le Phoenix a monté d'un étage et occupe actuellement le 17e et avant dernier rang du classement général, devant les Cataractes de Shawinigan.

« On ne l'a pas eu facile en début de campagne, mais on réalise enfin qu'on est capable de rivaliser avec les autres équipes de cette ligue. Ça fait du bien », note le capitaine Alexandre Comtois.

Ce dernier a en effet de quoi être soulagé. D'abord, le Phoenix affiche enfin un peu de synergie sur la surface glacée. Une victoire en soit pour une équipe d'expansion assemblée de toutes pièces il y a quelques semaines encore via repêchages et transactions.

« Personne ne se connaissait en début d'année. La chimie, ça ne s'installe pas après deux matchs », rappelle Comtois.

Le bon vieux voyage annuel dans les Maritimes, à la mi-octobre, a toutefois fait son oeuvre.

« Être ensemble dans l'autobus, à l'hôtel, au restaurant et à l'aréna, ça permet de tisser des liens », relève Comtois.

C'est ainsi que le Phoenix a ajouté une deuxième victoire à son dossier lors de ce déplacement, cette fois aux dépens des Screaming Eagles du Cap-Breton.

« Il n'y a pas de mauvais système, seulement de mauvaises applications. En début de saison, on pouvait bien jouer pendant 45 ou 50 minutes avant d'avoir des crampes au cerveau qui "scrappaient" notre match. Heureusement, petit à petit, les pièces du casse-tête se mettent en place », se réjouit Vallée.

Une distraction pour le moins inattendue a toutefois mis à l'épreuve cette progression naissante.



« On s'est fait avoir »

Aussi mystérieuse soit-elle, la création d'un syndicat (AJLCH) défendant les intérêts des joueurs évoluant dans la Ligue canadienne de hockey (LCH) s'est en effet infiltrée dans le vestiaire du Phoenix.

« On n'y pensait beaucoup en dehors de la patinoire et ça s'est fait en dessous de la table lors de réunions secrètes », révèle Comtois.

Alors que l'équipe se retrouvait en Abitibi pour y affronter les Foreurs de Val-d'Or et les Huskies de Rouyn-Noranda, la nouvelle est tombée. Le Phoenix devenait la première équipe à signer son adhésion et à se syndiquer.

« On s'est fait dire des choses qui étaient fausses, comme celle que nous étions la seule équipe à ne pas avoir signé encore. On a embarqué et on s'est fait avoir. Une partie du blâme nous revient, on aurait dû s'informer plus », regrette Comtois.

« On n'avait pas besoin d'une distraction comme ça, ajoute-t-il. Dans les semaines qui ont suivi, on est resté au même stade et on ne s'est pas vraiment amélioré. »

« Toute cette histoire, ça n'a pas mis d'huile sur le feu, mais plutôt de l'eau », confirme Vallée.

Malgré tout, le Phoenix a su souffler sur les braises et attisé le feu.



Le meilleur est à venir

À mi-chemin exactement dans la saison, le Phoenix a neuf victoires au compteur en 34 rencontres et il est parvenu à aligner deux victoires en deux occasions. La troupe de Judes Vallée a notamment vaincu coup sur coup les Tigres de Victoriaville et les Voltigeurs la semaine dernière.

Modestes certes, ces succès sont en partie attribuables au développement des nombreux jeunes joueurs sur lesquels repose le Phoenix.

« Il ne faut jamais oublier que notre équipe est d'abord formée de gars qui ont sont à leur deuxième ou troisième chance dans la ligue, ainsi que de jeunes recrues en apprentissage », insiste Vallée, qui en est à un deuxième séjour derrière le banc d'un club de la LHJMQ après avoir dirigé les Tigres entre 2002 et 2004.

Au total, 10 joueurs du Phoenix sont âgés de 17 ans ou moins. « De l'expérience, ils en ont en double et en triple cette saison. Ils jouent à profusion », assure Vallée.

Le temps de glace ne manque donc pas pour ces vertes recrues. Surtout pas pour Daniel Audette, tout premier choix du dernier repêchage de la LHJMQ.

« Équipe d'expansion oblige, on l'a placé dans un rôle important dès le départ alors qu'il joue sur le premier ou le deuxième, ce qui est du pareil au même pour nous », explique Vallée.

À l'image de son équipe, l'attaquant de 16 ans a connu des débuts difficiles, marquant son premier but en carrière dans le circuit Courteau lors de la première victoire des siens, contre les Voltigeurs. En 25 rencontres, il montre une fiche 10 points (5 buts et 5 passes).

« Comme c'est souvent le cas pour les premiers choix au repêchage, il s'est mis beaucoup de pression sur les épaules et en début de saison, il en faisait peut-être un peu trop. Depuis, il a appris qu'il se doit avant tout de se servir de sa vitesse, mais de la bonne façon. Foncer tout droit sur un défenseur et tenter de le déjouer, c'est plus difficile que de le contourner », signale Vallée.

« Au début, je tentais des jeux que je ne peux plus vraiment faire maintenant, convient Audette. Oui, j'ai ressenti de la pression, mais j'ai essayé de ne pas me concentrer là-dessus et de jouer au hockey comme je l'ai toujours fait. S'adapter, c'est la réalité de ce sport. »

Rapide et doté d'habilités hors du commun, Audette sera au cœur de la croissance du Phoenix. « Le meilleur est à venir, il va faire sa marque dans cette ligue », prédit l'entraîneur-chef, sans hésitation.

Le développement d'Audette et ses coéquipiers conduira-t-il le Phoenix jusqu'en séries?

« Après notre lent départ, on ne se voyait pas vraiment en séries, mais on a continué à y croire. Ça reste le but ultime. Il est atteignable, mais il est encore bien loin », répond Comtois.

Le Phoenix accuse présentement un retard deux points sur les Screaming Eagles, qui occupent le 16e et dernier échelon donnant accès aux séries.

« On est bien conscient qu'il n'a jamais été aisé pour une équipe d'expansion de participer aux séries. Tout ce que je désire, c'est qu'à dix matchs de la fin du calendrier régulier, nous serons encore dans le coup », souhaite Vallée.

Malgré les turbulences, le Phoenix garde donc le cap. Reste à voir s'ils poseront le pied à destination.

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