Avec l'élimination mathématique du Canadien d'une place en séries, la fin de la saison va représenter une audition pour plusieurs membres de l'équipe.

Il y a des joueurs qui auditionnent pour des rôles sur les troisième ou quatrième trios l'an prochain car certains occupent actuellement un rôle qu'ils ne devraient pas jouer normalement.

D'autres vont lutter dans l'espoir d'obtenir un nouveau contrat. Un gars comme Mike Blunden, qui vivote entre la LNH et la LAH depuis quelques années, pourrait chercher à faire parler de lui pour attirer l'attention du Canadien et des autres clubs du circuit Bettman.

Terminer la saison en force, malgré l'élimination, est aussi une question de fierté. Comme athlète, on a l'impression d'avoir laissé tomber ses coéquipiers, soi-même et ses partisans. Il faut essayer de se rattraper dans les dernières parties, question de terminer la saison la tête haute, pour essayer de soutirer un peu de positif de cette fin de calendrier.

Je parlais d'audition plus haut dans le texte, mais ça vaut ce que ça vaut dans un contexte où le club n'a plus la pression de se battre pour les séries. Comme dirigeant d'équipe, il faut réussir à évaluer les performances de l'équipe avec du recul. Il est parfois facile de mieux paraître dans un groupe qui travaille plus ou moins fort quand il n'y a pas d'enjeux.

À part un noyau de cinq à sept joueurs, les autres ne peuvent pas se dire qu'ils vont se reprendre à Montréal l'an prochain parce qu'ils sont loin d'être assurés d'être de retour avec l'équipe. Tout le monde est susceptible d'être échangé ou libéré.

Pour les vétérans avec un contrat en poche, il est difficile de se motiver et je peux vous en parler par expérience. Durant ma carrière de plus de dix saisons dans la LNH, je n'ai participé aux séries que deux fois. À plusieurs reprises, j'ai vécu des situations où il était difficile de se motiver. J'étais un joueur au talent moyen et je devais travailler fort. D'ailleurs, j'ai atteint la LNH par le travail. Je devais me battre pour chacune de mes présences.

Le plus difficile a été de me retrouver aux côtés de quelqu'un qui est découragé. Je me souviens à Phoenix d'un coéquipier qui voulait juste que la saison se termine au plus tôt. Avant qu'une partie ne commence, ce coéquipier m'avait dit qu'il ne souhaitait qu'un but dans le match, peu d'arrêts ou de dégagements pour que ça se joue le plus rapidement possible. Il me disait, il faut que les 60 minutes de jeu se passent rapidement. Vous comprendrez que c'est nettement plus dur dans ce temps-là de se motiver pour aller se défoncer.

Quant à moi, je pense qu'il y a toujours quelque chose pour se motiver quand on joue. Il faut espérer se retrouver au sein d'un groupe qui se tient, qui est fier et qui veut prouver à la direction que la mauvaise saison n'était qu'une erreur de parcours. On veut démontrer que la formation n'est pas aussi mauvaise que l'indique notre fiche.

Les joueurs des équipes éliminées veulent aussi éviter les blessures qui hypothèqueraient leur période estivale. Je me souviens d'opérations à l'épaule durant la saison morte à la suite desquelles j'avais dû être en convalescence plus de deux mois.

Expériences?

On dit qu'avec les quelques matchs qu'il reste à la saison, le temps est bien choisi pour faire des expériences. Quant à moi, ce n'est pas nécessairement vrai. Tu ne veux pas démanteler ton premier trio parce que tu souhaites qu'il termine sur une bonne note. Puis, ça donnerait quoi de démembrer ce trio? Ce sont ces mêmes trois joueurs à qui on va demander de traîner l'équipe l'an prochain. Garder ce trio intact pourrait aider à terminer sur une note positive.

Comme expérience, on peut faire jouer des jeunes, mais je pense que le Canadien a atteint son nombre maximal de rappels des ligues mineures, si bien que je conseille de jouer les derniers matchs avec intensité simplement.

Cunneyworth en audition

Je ne sais pas si l'entraîneur Randy Cunneyworth est encore, lui, au stade de l'audition comme certains de ses joueurs. J'ai l'impression que la haute direction du Canadien a déjà pris une décision quant à son avenir. Que Cunneyworth revienne ou non, je suis convaincu que la décision est prise. On attend juste la fin de la saison pour statuer sur son cas.

Si Cunneyworth passe une audition, ce n'est pas pour un rôle à Montréal. S'il ne revient pas à la barre du Canadien, il se doit de laisser une bonne impression aux 29 autres équipes de la LNH. Il n'y aura peut-être pas beaucoup de postes disponibles, compte tenu de tous les changements survenus durant la saison régulière. Il doit laisser une impression positive. Si d'autres clubs téléphonent au Canadien à son sujet, les références doivent être bonnes.

Non à Markov

Sans aucune hésitation, je ne permettrais pas à Andrei Markov d'aller représenter son pays au championnat mondial s'il était invité. Ce n'est pas la Russie qui lui verse son salaire, c'est le Canadien.

Le Canadien lui a démontré une confiance quasi ridicule en lui donnant un contrat de trois ans, malgré son état de santé. Je pense que Markov se doit de respecter un éventuel refus du Canadien.

Des changements qui ne rapportent pas toujours

Il y a eu quelques changements d'entraîneurs cette saison, mais les résultats n'ont pas tous rapporté les fruits escomptés. Les changements surviennent quand un club performe sous les attentes. Les clubs qui savaient dès le départ que la campagne allait être difficile, comme les Islanders ou les Oilers, se montrent plus patientes vu les attentes différentes.

Avec les clubs avec moins d'attentes, on vise habituellement la stabilité parce qu'on ne veut pas troubler les jeunes joueurs en développement.

Les Blues de St. Louis ont obtenu les meilleurs résultats en procédant à un changement d'entraîneur quand Ken Hitchcock a pris la relève à Davis Payne. Ça n'a pas été le cas à Los Angeles où les attentes étaient très élevées.

Un changement d'entraîneur fouette les joueurs, mais ça ne veut pas dire que ça va redresser la barque. Les entraîneurs n'ont pas tous le même talent pour remonter le confiance d'un club.

Ça dépend aussi de quand survient le changement. Plus tard il arrive durant la saison, plus les mauvaises habitudes sont difficiles à défaire.

À St. Louis, le changement est arrivé très tôt dans la saison. Il restait beaucoup de temps pour renverser la vapeur. Les mauvaises habitudes n'avaient pas eu le temps de s'imprégner chez les joueurs et le nouvel entraîneur a eu le temps nécessaire pour réajuster le tir. Hitchcock est un homme d'expérience et il savait comment procéder. Souvent les changements d'entraîneurs se font en deuxième moitié de saison et il est déjà trop tard.

Les dernières luttes

La saison tire à sa fin et quelques équipes ont encore espoir de participer aux séries. Dans l'Est, j'ai l'impression que les Sabres de Buffalo vont manquer d'essence. Les Sabres ont réalisé une impressionnante remontée, mais trop tardive. Ce sont les Capitals de Washington et les Sénateurs d'Ottawa qui vont obtenir leur billet pour les séries.

Mais si les Sabres parvenaient à accéder aux séries, je peux vous dire que je n'aimerais pas être les Rangers ou les Penguins pour les affronter au premier tour.

Dans l'Ouest, c'est serré aussi pour le dernier rang donnant accès aux séries. Il y a cinq clubs pour deux places encore disponibles. J'ai l'impression que San Jose va passer alors que Phoenix, Colorado et Calgary ne passeront pas.

Les Kings devraient participer aux séries, mais je dois dire que je suis très déçu. Le gardien Jonathan Quick a une saison digne d'un trophée Vézina, mais ses coéquipiers ne lui donnent que très peu d'attaque.

*propos recueillis par Robert Latendresse