Passer au contenu principal

RÉSULTATS

Gabriel D'Aigle : la prestance d'un adolescent

Gabriel D'Aigle Gabriel D'Aigle - Denis Morin/Tigres de Victoriaville
Publié
Mise à jour

MONTRÉAL – Gabriel D'Aigle n'a que 15 ans, et il est facile de l'oublier. Même pour sa garde rapprochée.

À 6 pi 4 po, le portier recrue des Tigres de Victoriaville n'est dépassé d'un pouce que par deux de ses nouveaux coéquipiers, Tommy Montreuil et Igor Mburanumwe. Sur le pèse-personne, il les domine tous avec ses 209 livres. Et dans son demi-cercle, il en impose déjà.

« C'est impressionnant à voir, témoigne l'entraîneur des gardiens et entraîneur associé des Tigres, Sébastien Charpentier, des progrès de son élève depuis sa sélection au deuxième échelon du dernier repêchage de la LHJMQ. C'est un gros bonhomme et il est déjà mature physiquement. Sa prestance, elle ne laisse pas entrevoir que c'est un jeune de 15 ans. »

« Son niveau de compétition est extrêmement élevé, développe Charpentier. Peu importe les joueurs, le niveau d'où ils arrivent, leur âge ou s'ils sont des vétérans, quand ils se dirigent vers le filet, t'es assuré d'avoir le meilleur de Gabriel. Il veut arrêter toutes les pucks. Quand je parle de prestance, [je veux dire qu']il dégage l'attitude de quelqu'un qui a accompli des choses dans la ligue. »

Gabriel D'Aigle, le gardien repêché le plus hâtivement en 22 ans dans le circuit québécois, c'est donc bien plus qu'une bonne pièce d'homme stationnée entre deux poteaux.

« Il a une explosion qui exige une bonne force physique. Le jeune homme, il pèse quand même plus de 200 livres. Pour traîner ce poids-là, à cet âge-là, il faut que t'aies fait des heures, il faut que t'aies mis du temps à répéter des mouvements et apprendre à les contrôler », déduit Charpentier.

Entre l'âge de 6 et 12 ans, D'Aigle en a en effet passé des heures dans son sous-sol avec son père, un ancien gardien, à multiplier deux jours sur trois les déplacements latéraux sur une surface synthétique.

« C'est de la pratique. Juste pratiquer, pratiquer, pratiquer », simplifie D'Aigle, qui a d'ailleurs laissé des traces de ces séances d'entraînement sur YouTube. Il suffit d'y jeter un bref coup d'œil pour comprendre comment le jeune athlète a fait de la rapidité de ses déplacements sa spécialité.

Celle-ci était plus qu'apparente cet été au camp de développement des moins de 17 ans d'Hockey Canada. En plus de conclure l'exercice avec la meilleure moyenne (2,50) parmi les 10 gardiens invités, D'Aigle a épaté la galerie et les partisans des Tigres les plus avertis sur Twitter avec l'arrêt du camp, alors qu'il a volé un rival de sa grosse mitaine sur une situation à deux contre un.

« Avec son gabarit, il est capable de rester compact dans ces longs jeux-là et couvrir le plus de but possible en même temps. C'est ça le gros potentiel de Gab », discerne Charpentier, dont le mandat est maintenant de raffiner cette adresse.

« Toutes les heures qu'il a faites à répéter des mouvements de poteau à poteau, il lui manquait peut-être des situations de match à travers tout ça. [...] Des fois, il est tellement habitué à bouger qu'il est impatient et a hâte de bouger. Ça fait que je lui ai dit si on n'en a pas besoin, on ne le fait pas. On reste calme et on reste bien positionné. Ce sont de petites choses qu'on commence à travailler tranquillement, sans tout chambarder le passé du jeune et sans tout vouloir faire en même temps. »

Le meilleur espoir depuis Fleury?

D'Aigle ne célébrera ses 16 ans que le 21 novembre prochain. Charpentier et les Tigres ont donc trois saisons complètes à leur disposition pour perfectionner la technique de leur vedette en devenir avant qu'il ne devienne admissible au repêchage de la LNH en 2025.

Pour son entrée en matière cette année, il épaulera le vétéran de 19 ans Nathan Darveau à titre de no 2. Dans un monde idéal où les blessures n'existent pas, il obtiendrait entre 20 et 25 départs. Sa participation plus que probable au Défi mondial des moins de 17 ans, du 5 au 12 novembre en Colombie-Britannique, pourrait cependant forcer le club à revoir son utilisation à la baisse.

« On peut se permettre de bien faire les choses, surtout en ayant Nathan, qui a quand même un statut important dans notre équipe, rappelle Charpentier. [...] Ça nous permet de vraiment travailler les petits détails et des choses au maximum. Parce qu'on ne se le cachera pas, t'es sous pression pareil quand c'est ton année de repêchage. Peut-être que tu vas travailler un p'tit peu plus crispé, mais rendu à 18 ans, quand tu en es à ta troisième saison, je pense que tu es capable de gérer beaucoup mieux ces attentes face au repêchage de la Ligue nationale. »

Et des attentes, il risque d'y en avoir.

« Ce gars est le meilleur espoir québécois chez les gardiens de but depuis Marc-André Fleury », a osé avancer le populaire spécialiste du repêchage Simon « Snake » Boisvert dans une récente entrevue au The Sick Podcast with Tony Marinaro. « C'est le prochain gardien étoile québécois dans la LNH. »

Exerçant son droit de réserve, Charpentier se garde bien de coller pareille étiquette à son protégé. Il est beaucoup trop tôt. Il reconnaît toutefois que dans son groupe d'âge, D'Aigle est dans une classe à part.   

« Tout le monde en parle depuis quelques années : comment ça se fait qu'on n'a pas plus de gardiens québécois qui sortent plus fréquemment au repêchage? Gab est dans une lignée où on peut se remettre sur la mappe. »

« Appelle-moi quand tu veux »

Il est à tout le moins déjà sur bien des radars, y compris celui de Fleury, son célèbre concitoyen sorelois, avec qui il a partagé cet été une patinoire et un entraîneur personnel commun, Stéphane Ménard.

« C'est Marc-André qui a demandé de s'entraîner avec moi », révèle D'Aigle, qui a alors fait connaissance avec l'étoile du Wild du Minnesota. « D'après moi, il essaie de me prendre sous son aile. »

Les deux athlètes se sont promis de répéter l'expérience au terme de la prochaine campagne. D'ici là, il y a toujours le téléphone.

« Il m'a donné son numéro et il m'a dit : "Appelle-moi quand tu veux pour des conseils". Je ne l'ai pas appelé à date. Je suis un peu gêné. »