LHJMQ : le départ du patron, une tradition des Fêtes chez le Phoenix
Regardez le match Phoenix c. Huskies sur RDS.ca, vendredi soir à 19 h.
MONTRÉAL – On n'oublie jamais une soirée d'initiation. Un an plus tard, Jonathan Deschênes peut raconter avec une quantité impressionnante de détails sa première soirée comme entraîneur-chef dans la Ligue de hockey junior majeur du Québec.
« C'était contre Serge Beausoleil, à Rimouski », entame le jeune coach sur le ton du narrateur d'un film dont on connaît déjà la fin tragique.
Deschênes décrit une scène en fin de première période. Pour souci de concision, résumons grossièrement : son équipe menait par deux buts, il a pris une décision qui s'est retournée contre lui, son homologue plus expérimenté lui en a fait payer le prix et la dite avance a été réduite de moitié.
« Matcher [les trios], je n'avais jamais fait ça de ma vie avant de tomber "en chef" dans le junior majeur », remet-t-il aujourd'hui en contexte dans un mea culpa teinté d'une belle humilité.
Deschênes, un entraîneur-adjoint avec le Phoenix de Sherbrooke, a l'occasion depuis une semaine de mettre en pratique les leçons tirées de ce baptême. Pour une deuxième année consécutive, son équipe passera la période des Fêtes sans son entraîneur-chef puisque celui-ci a été prêté à Équipe Canada junior.
La saison dernière, Stéphane Julien avait laissé l'équipe entre les mains de Deschênes et de son autre adjoint, Michel Périard, pour aller prêter main forte à Dennis Williams à Halifax. Cette année, son successeur, Gilles Bouchard, a rejoint la sélection nationale pour le tournoi qui aura lieu en Suède. Pour une organisation, servir la cause de Hockey Canada pour une compétition de cette envergure est une énorme source de fierté. Ceux qui restent derrière, toutefois, sont vite ramenés sur terre par leur nouvelle réalité.
« On dirait que tu ne le réalises pas jusqu'à ce que tu aies à le faire, mais tu as des tâches qui s'ajoutent sans que ce que tu faisais avant ne disparaisse, a vite compris Deschênes. Dans la gestion de ton horaire, tu dois apprendre à couper à l'essentiel. Qu'est-ce que j'ai besoin de faire pour que ça fonctionne sans que je fasse 14 heures au bureau dans la même journée? »
Deschênes, qui est le plus jeune des deux adjoints mais qui a plus d'expérience dans la LHJMQ, hérite officiellement du rôle d'entraîneur-chef. La gestion du banc lors des matchs lui revient. Périard, un ancien joueur qui a connu une longue carrière professionnelle dans la Ligue américaine et en Allemagne, conserve la responsabilité des défenseurs et du désavantage numérique. Les deux ont l'avantage d'avoir déjà travaillé ensemble dans le passé dans les programmes de Hockey Québec.
« Sur le banc, on a une belle complicité, avance Périard. On va se regarder et on sait exactement ce que l'autre pense. Si j'arrive avec quelque chose, il va quasiment finir ma phrase. »
Couper dans le gras
Périard, un ancien champion de la Coupe Memorial avec l'Océanic de Rimouski, est le premier à admettre que son quotidien change peu en l'absence du patron. La routine de son collègue, elle, est davantage affectée.
Par exemple, dans une semaine normale, Deschênes rencontre chacun des attaquants de l'équipe individuellement pour leur montrer des séquences vidéo qu'il a lui-même découpées. À partir du début décembre, la fréquence de ces face-à-face diminue de moitié, faute de temps.
Le féru de statistiques avancées est aussi celui qui s'occupe de préparer le Phoenix contre les spécificités de ses prochains adversaires. La tâche exige de passer de nombreuses heures à l'écran afin de relever les tendances, les habitudes d'un rival. Là aussi, il a fallu couper dans le gras.
« Je suis quelqu'un de très méthodique et analytique, explique le jeune trentenaire. J'ai confiance que si j'ai beaucoup de données, à un moment donné il y a une constante qui va ressortir. Donc j'ai tendance à en faire plus que moins. Pour une rencontre dans laquelle on va présenter dix séquences aux joueurs, je peux en avoir sorti 250 au départ. Là, je me suis rendu compte que je n'avais pas besoin d'en faire autant pour que ça fonctionne quand même. Il a fallu que j'apprenne à me parler! »
Dans ces circonstances exceptionnelles, Deschênes peut aussi s'appuyer sur de nouveaux visages qui entrent temporairement dans le quotidien de l'équipe. L'an dernier, le directeur général adjoint Olivier Picard avait donné un coup de main sur le banc pour quelques matchs entre Noël et le jour de l'An. Cette année, le nouveau DG Philippe Sauvé a rapatrié le jeune Jean Grignon-Francke, qui avait été un entraîneur invité au camp d'entraînement. Il aidera pendant une dizaine de jours avant Noël. La nouvelle entraîneuse vidéo Tricia Deguire pourrait prendre le relais pour la suite.
« Toutes les tâches liées à la vidéo, il y en a qui sont redistribuées parce que je ne peux plus les prendre au complet. Les récapitulatifs d'après-match, Stéphane faisait tout ça tout seul. Moi, je ne peux pas alors je sépare ça avec Michel. La planification de la semaine, on va la faire ensemble. La planification des pratiques aussi. Stéphane était du genre à nous donner un squelette qu'on remplissait avec nos exercices selon les thèmes qu'il voulait. Avec Gilles, on monte plus ça ensemble, alors ce sont d'autres tâches à redistribuer. »
« C'est sûr qu'il y a un stress qui embarque, concède Deschênes. Ce n'est pas que je doute de ma capacité à faire le travail, mais là j'ai du stock à gérer! Il ne faut pas que j'oublie quelque chose, sinon ça peut être majeur! Il y a comme ce petit stress, un stress de résultat qui est là comme adjoint, mais qui est bonifié comme entraîneur-chef. »
La saison dernière, le Phoenix avait perdu quatre de ses cinq premiers matchs en l'absence de Julien pour finalement se monter une fiche de 4-4-1 avant son retour. Cette année, l'équipe est plus jeune et bien qu'elle ait commencé la saison avec de bons résultats, les attentes ne sont pas les mêmes.
Sherbrooke a perdu deux fois en autant d'occasions depuis le départ de Gilles Bouchard au camp d'évaluation d'ÉCJ. La formation estrienne tentera de retrouver la voie du succès vendredi contre les Huskies à Rouyn-Noranda. Le match sera présenté sur RDS.ca.