MONTRÉAL – Par la nature du repêchage qui comporte plus de 200 sélections par année, plus d’athlètes finissent par échouer que par réussir. Par conséquent, on parle plus souvent des « flops » que des joueurs qui sont parvenus à dépasser les attentes envers eux. On vous présente un dossier sur quatre joueurs qui se classent parmi les exceptions.

Au repêchage de 2001, les Thrashers d’Atlanta ont eu raison en sélectionnant Ilya Kovalchuk au premier rang et les Sénateurs d’Ottawa également en optant pour Jason Spezza après eux. Mais, neuf rondes plus tard, les Mighty Ducks ont aussi visé juste en misant sur Pierre-Alexandre Parenteau au 264e échelon.

Certes, Parenteau n’a pas joué un seul match régulier dans la LNH avec Anaheim, mais il a fini par s’établir dans la LNH après un purgatoire de sept saisons dans la Ligue américaine de hockey.

Près de 15 ans après la journée de son repêchage, Parenteau se classe actuellement au 19e rang de sa cuvée pour les points alors que plus de 263 joueurs ont été choisis avant lui. De plus, le Québécois de 33 ans s’approche du plateau des 500 matchs et des 300 points.

« C’est assez fou de penser qu’il a été repêché en neuvième ronde, ça fait une belle histoire! », a lancé Tom Coolen, son premier entraîneur dans la LHJMQ avec les Wildcats de Moncton.

Son histoire, c’est celle d’un joueur offensif qui peut surtout s’exprimer sur les deux premiers trios d’une équipe. Par contre, quand on est un choix de neuvième ronde, de telles occasions ne se présentent pas tous les jours.

« Le chemin a été long, je suis devenu un joueur établi dans la LNH presque 10 ans après mon repêchage, c’est pas mal le plus long parcours que tu peux trouver », avoue Parenteau en repensant à sa traversée du désert.

Ce n’est qu’une image, mais c’est comme si Parenteau avait traversé le Sahara en disputant 450 matchs dans la Ligue américaine.

« Ce n’est pas long qu’on t’accole l’étiquette "joueur des ligues mineures" quand tu es rendu à 25 ans. C’est quelque chose qui m’a motivé quand les gens disaient que j’étais un gars des mineures et que je ne réussirais jamais. Je voulais leur prouver qu’ils avaient tort », s’est souvenu celui qui poursuit sa carrière avec les Devils du New Jersey.

Parenteau croyait bien avoir trouvé l’oasis qui allait le sauver en 2006-2007 quand il avait connu une saison de 51 points en 40 matchs avec les Admirals de Norfolk, le club-école des Blackhawks de Chicago. Au contraire, il a plutôt eu à encaisser l’un des plus grands chocs de son cheminement.

Pierre-Alexandre Parenteau« Je venais de connaître une excellente saison et on m’a échangé aux Rangers. J’avais été surpris et le coup a été dur à avaler », a-t-il témoigné.

« Mes parents ont joué un grand rôle. J’ai toujours été en contact avec eux après les matchs et ils ont toujours cru en moi. Ce sont eux qui m’ont permis de m’accrocher », a enchaîné Parenteau quand on le questionne sur les personnes qui ont préservé son moral.

La sélection de Parenteau par les Ducks provient d’Alain Chainey qui a été leur directeur du recrutement pendant de nombreuses années. À cette époque, Lucien DeBlois oeuvrait comme dépisteur professionnel pour les Mighty Ducks. Il avait aidé Chainey dans sa réflexion puisqu’il connaissait bien Parenteau, ayant joué avec son père auparavant.

« Je lui ai parlé quelques fois, je sais qu’il commençait à être écoeuré de se promener dans la LAH. Il voulait avoir une vraie chance et ç’a pris du temps avant que ça se fasse; il a été persévérant », a raconté DeBlois qui travaille maintenant pour les Canucks.

« Ce n’est pas toujours le fun dans la Ligue américaine, il faut accepter de faire des sacrifices. Ce n’est pas une ligue facile contrairement à ce que plusieurs personnes pensent. Souvent, c’est même plus difficile de jouer là parce que tu es moins bien entouré, le jeu est plus décousu et il y a moins de respect entre les joueurs qui pensent surtout à monter », a poursuivi DeBlois.

Walsh a eu à pousser Parenteau

Mécontent de la direction que sa carrière avait empruntée, Parenteau a renoncé à son association avec son agent Gilles Lupien pour se tourner du côté d’Allan Walsh qui est reconnu pour mousser ardemment la candidature de ses protégés.

« Je pense que l’une des choses dont il avait besoin, c’était une personne qui croyait en lui. Les joueurs veulent que les personnes de leur entourage croient en eux », s’est rappelé l’agent.

« Je lui ai dit : "tu as un talent énorme et tu peux devenir un joueur de la LNH. Le temps commence à presser, mais il n’est pas encore trop tard. Tu dois décider que tu veux jouer dans la LNH. Tu peux te promener en autobus dans la LAH, aller en Europe ou jouer dans la LNH. Ton sort est entre tes mains" », a raconté Walsh.

Walsh a accepté la demande de Parenteau de le représenter à certaines conditions.

« Il devait assumer sa part de responsabilités pour sa situation et vraiment se dédier à son but d’atteindre son plus haut potentiel », a ajouté Walsh qui a vu Parenteau modifier son approche sous son influence.

« Il a commencé à mieux prendre soin de lui et son éthique de travail. Il s’est dévoué encore plus à son objectif », a confié Walsh qui a aidé son client à faire rejaillir toutes ses aptitudes.

Parenteau s’est donc retroussé les manches avec le Wolf Pack de Hartford et il a proposé des saisons de 81 points et 78 points à l’état-major des Rangers. Malheureusement, un hic bloquait son rappel.

« Je croyais vraiment en mes moyens surtout dans ces années-là. J’avais juste besoin de ma chance, mais ce n’était pas évident avec les Rangers. Il n’y avait pas beaucoup de blessés et c’était l’époque avant le plafond salarial avec des gars comme (Jaromir) Jagr, (Martin) Straka et (Brendan) Shanahan. Ce n’est pas évident de se faire une place dans ce temps-là, mais je savais que j’aurais ma chance un jour », a décrit le droitier.

Au moins, les Rangers prenaient soin de Parenteau.

« Les Rangers me donnaient de bons contrats dans la LAH. Ça m’aidait à poursuivre mon rêve un peu plus longtemps. Si je n’avais pas eu ces conditions, je pense que je serais parti avant ça », a admis Parenteau qui aurait pu s’expatrier en Europe.

Au final, la ténacité de Parenteau a été judicieuse et sa carrière dans la LNH a pris son envol avec les Islanders de New York, où il a développé une belle chimie avec John Tavares.

« Allan a joué un gros rôle, il a toujours cru en mes moyens et il est souvent allé au bat pour moi pour des rappels et des signatures. On a pris ensemble la décision de signer à Long Island en 2010 et c’est la meilleure décision que j’ai prise dans ma vie. Quelques autres équipes étaient intéressées et proposaient le même contrat comme les Rangers et les Coyotes, mais il m’avait conseillé les Islanders », a remercié Parenteau en nommant Kevin Dineen, Mike Haviland et Jean-Jacques Daigneault comme ses entraîneurs les plus influents.

Une belle histoire à raconter à ses enfants

La route vers la LNH passait également par un peaufinage de ses carences défensives. Parenteau n’a jamais été un spécialiste de ces missions et il a eu à redoubler d’ardeur dans cette facette de son jeu.

« À ses premières années professionnelles, j’ai l’impression que ç’aurait été difficile pour lui de jouer dans un top-6. Il n’était pas encore assez fort physiquement et il n’était pas un joueur très responsable défensivement. Pour te rendre dans la LNH, tu dois y faire attention. Ça lui a pris un peu de temps à bien comprendre ça », a relevé DeBlois.

Pierre-Alexandre ParenteauParenteau n’est pas encore parfait à ce chapitre, mais il a maintenant disputé des matchs réguliers pour sept organisations dans la LNH et il continue d’accumuler des points à un rythme plus que convenable.

« La personne à laquelle revient tout le mérite, c’est Pierre-Alexandre. C’est lui qui s’est rendu là, il avait juste besoin de personnes pour le guider. D’ailleurs, je pense qu’il a encore du bon hockey en lui, il est en voie de connaître une saison de 20 buts », a fait remarquer Walsh. 

« C’est vraiment spécial ce qu’il a accompli après tant d’années dans la Ligue américaine. Il faut lui donner tout le crédit, il a travaillé fort, il ne s’est pas découragé et il a gardé la passion.

« L’important, c’est d’obtenir une vraie chance. Mais les organisations ne donnent pas souvent la chance aux choix de neuvième ronde de se développer assez longtemps. Si tu n’es pas capable de jouer dans la LNH à 23 ans, bien des clubs jettent l’éponge. C’est là que la patience du joueur est cruciale, tu dois parfois changer d’organisation pour être bien apprécié », a ciblé DeBlois.

« Je suis vraiment content qu’il ait trouvé le moyen de s’établir au plus haut niveau. Il a finalement eu la chance de prouver ce qu’il pouvait accomplir parce qu’il n’est pas du style à remplir plusieurs missions », a indiqué Coolen.

Avec un tel parcours, Parenteau n’oublie pas souvent tous les obstacles qu’il a surmontés.

« Il n’y a pas une journée pendant laquelle je ne réalise pas à quel point je suis chanceux de jouer dans la LNH. J’ai commencé à y faire ma place à 26 ans et demi. Mon parcours a été assez dur, mais je suis content d’avoir réussi malgré ça », a assuré le père qui n’aura pas à chercher dans les livres de ses enfants pour leur raconter des histoires de persévérance.

La suite du dossier :

Mardi : Jason Demers

Mercredi : Mathieu Perreault

Jeudi : Brendan Gallagher