Gary Bettman sortira grand gagnant de la réunion des gouverneurs qu’il préside depuis lundi et qui prendra fin aujourd’hui à Pebble Beach dans le nord de la Californie.

À la tête d’une Ligue nationale paralysée par un deuxième lock-out en huit ans, un troisième depuis 1994 et un quatrième conflit de travail depuis son élection à titre de commissaire en 1993, Bettman était honni par les amateurs de hockey il y a un an à peine. Pis encore, il était ouvertement contesté par plusieurs gouverneurs qui ne pouvaient accepter que leurs clubs soient inactifs.

Non seulement la Ligue était paralysée par un lock-out qui avait entraîné l’annulation de la réunion annuelle des gouverneurs, mais au moins trois équipes croulant sous les dettes peinaient à se trouver de nouveaux propriétaires.

Douze mois plus tard, tout a changé.

Les trois clubs moribonds sur le plan financier – les Devils du New Jersey, les Panthers de la Floride et les Coyotes de Phoenix – ont de nouveaux propriétaires. Et ces 3 clubs, comme les 27 autres, font maintenant de l’argent dans une Ligue qui génère près de 4 milliards de dollars de revenus sur une base annuelle. Des revenus qui oscillaient autour de 300 millions lorsque Bettman est devenu commissaire de la LNH. Des revenus qui fluctueront à la hausse encore l’an prochain grâce aux 5,2 milliards que Bettman vient d’obtenir dans le cadre du contrat canadien de télédiffusion qu’il a signé avec Rogers. Un contrat que les gouverneurs ont vite entériné dès l’ouverture de leur réunion. Un contrat qu’ils ont chaudement applaudi et qui leur a permis d’offrir des accolades à leur principal employé.

« Les choses vont beaucoup mieux pour nous cette année. C’est normal. L’an dernier, nous ne jouions pas au hockey. Cela dit, je refuse de voir ce renversement de situation comme une victoire personnelle. Nous sommes gâtés de pouvoir compter sur les meilleurs athlètes de la scène sportive. Sur des amateurs passionnés dont l’amour pour le sport n’a pas été altéré par les événements que nous avons vécus. Quand vous êtes en mesure d’établir des bases solides sur lesquelles bâtir, quand vous êtes en mesure de compter sur un bon système économique, un système appliqué par de bons propriétaires, de bonnes choses arrivent. Financièrement, nous sommes plus solides que jamais », a reconnu le commissaire Bettman dans un point de presse suivant la fin de la première journée de réunion.

Plafond à 71 millions $

Si Bettman était tout sourire, ses gouverneurs l’étaient tout autant.

« C’est une belle journée pour la Ligue. La situation financière s’est améliorée et toutes les équipes, dont le Canadien, vont en bénéficier », a reconnu Geoff Molson.

Un propriétaire qui, maintenant que le contrat national de diffusion a été entériné par les gouverneurs, s’attaquera au volet régional de l’entente.

« Nous avons 60 matchs à distribuer. Les décisions ne sont pas encore prises. Nous allons étudier ce dossier lors de notre retour à Montréal afin de prendre la meilleure décision possible. Une décision que nous ne précipiterons pas », a ajouté M. Molson lorsqu’on lui a demandé si une annonce serait faite avant le congé des Fêtes.

Satisfait du portrait financier que venait de lui brosser Gary Bettman, Geoff Molson était tout aussi satisfait de la hausse anticipée du plafond salarial. Une hausse qui devrait se traduire par un plafond qui oscillera autour des 71 millions $ dès l’an prochain, avec un plancher fixé à 55 millions $ de moins.

« Si le plafond monte, c’est que l’économie de la ligue va bien. C’est donc une très bonne nouvelle », a mentionné Molson.

C’est d’autant plus une bonne nouvelle pour le Canadien qui profitera des quelque sept millions $ de plus sous le plafond pour maximiser ses chances de mettre sous contrat – à très fort prix et pour longtemps – un joueur vedette comme P.K. Subban et le vétéran défenseur Andrei Markov.

Si Geoff Molson et les gouverneurs des équipes de gros marchés saluaient avec plaisir cette hausse anticipée du plafond – une hausse qui devrait être confirmée au cours de la journée de mardi – les clubs de petits marchés l’étaient tout autant.

« Le plafond salarial grimpe et c’est une bonne nouvelle pour tout le monde pourvu qu’on soit en mesure de l’atteindre. La situation financière actuelle de la Ligue et des 30 équipes nous aidera à y arriver. Nous sommes tous prêts à payer le gros prix pour attirer le succès. Mais encore faut-il être capable de payer ce gros prix, ce qui n’était pas nécessairement le cas avant », a mentionné Lou Lamoriello, le gouverneur des Devils du New Jersey.

« Nous étions l’un des clubs minés par une situation financière très difficile au cours des dernières années. L’entrée en scène de nouveaux propriétaires et le redressement de la situation générale de la Ligue font de nous une meilleure organisation sur le plan des affaires. Nous devons maintenant, comme les 30 autres équipes, prendre les moyens nécessaires pour améliorer nos revenus régionaux. Mais le partage des revenus comme il est maintenant établi autour de la LNH permettra aux équipes qui ont besoin de profiter de ce partage d’être mieux en mesure de le faire. Et ça, c’est une grande victoire », a ajouté Lamoriello.

« Il est clair que les Flames de Calgary, comme nos rivaux d’Edmonton, évoluent dans un petit marché. La hausse des revenus redistribués nous permettra de demeurer compétitifs avec nos rivaux de tous les marchés. Bien que nous ne puissions être comparés aux Leafs, au Canadien, aux Rangers et aux autres clubs riches de la Ligue, nous avons toujours visé le plafond afin de donner à nos partisans la meilleure équipe possible. Il n’est pas question de gaspiller de l’argent avec des contrats irresponsables, mais les revenus supplémentaires nous permettront de toujours viser le plafond et c’est une grande victoire pour nous », a souligné Ken King, le gouverneur des Flames de Calgary.

Violence, commotions, bagarres

La journée de lundi ayant été exclusivement consacrée aux questions d’ordre financier, c’est mardi que les gouverneurs parleront, au moins un peu, de hockey.

Incapable de rejoindre les gouverneurs lundi en raison d’ennuis de transport, Brendan Shanahan dressera un bilan de ce que lui et ses acolytes du comité responsable de la sécurité des joueurs ont fait pour améliorer la situation en imposant des suspensions de plus en plus nombreuses et de plus en plus sévères.

« La violence et la sécurité des joueurs sont des questions importantes qui me préoccupent », a reconnu le propriétaire du Canadien sans toutefois préciser s’il allait demander à ses homologues d’amorcer un virage qui pourrait se traduire par l’abolition des bagarres.

« Personne ne veut voir des joueurs se blesser dans le cadre des matchs », a convenu le gouverneur et directeur général des Devils du New Jersey Lou Lamoriello en marge des incidents violents qui ont marqué le match Penguins-Bruins samedi dernier et terni un peu plus l’image de la LNH. 

Cela dit, Lamoriello implore les joueurs à faire leur part pour améliorer la situation sur la patinoire. « Brendan Shanahan et les membres de son comité font tout ce qu’ils peuvent à mes yeux pour redresser la situation. Mais le hockey est et sera toujours un sport de contact. Un sport physique. Un sport susceptible d’amener son lot de blessures. Il est temps que les joueurs fassent leur part aussi. C’est leur sport autant que le nôtre. Ils doivent afficher plus de respect entre eux qu’ils ne le font présentement. Si la situation ne change pas, on risque de voir un joueur être suspendu pour une saison entière. Peut-être qu’une telle sanction attirera leur attention et que la crainte qu’elle suscitera obligera les joueurs à mettre un frein aux attaques sournoises et gratuites que nous voyons sur la patinoire. Mais le hockey doit demeurer un sport physique. On doit simplement trouver un meilleur équilibre », a ajouté Lamoriello.

Le directeur général des Bruins de Boston Peter Chiarelli accompagne son propriétaire Jeremy Jacobs à Pebble Beach. En plus de suivre les activités entourant la réunion des gouverneurs, Chiarelli profitera de son escale dans le nord de la Californie pour préparer le terrain en vue de la comparution de Shawn Thornton devant Brendan Shanahan et du comité régissant la sécurité des joueurs.

« Nous rencontrerons Brendan vendredi. J’entends toutefois échanger avec lui pour parler de l’incident », a convenu Chiarelli.

Bien que Thornton n’ait pas d’antécédents susceptibles d’aggraver sa situation, le dur à cuire et les Bruins s’attendent à une suspension très salée. « Shawn est un joueur que je respecte beaucoup. Il remplit un rôle spécifique et arrive normalement à respecter les paramètres de ce rôle difficile. Samedi, il a perdu le contrôle », a reconnu le DG des Bruins.

Observateur attentif à la réunion des gouverneurs, Chiarelli était bien sûr heureux de voir qu’il comptera sur une plus grande marge de manœuvre sous le plafond. « Nous pourrons dépenser plus d’argent, mais il faudra quand même dépenser cet argent d’une manière responsable », a-t-il indiqué.

Quant à la situation générale entourant la violence sur la patinoire et le débat relié à la nécessité, ou non, d’abolir les bagarres, Chiarelli ne croit pas que le mouvement doive nécessairement venir des gouverneurs.

« Nos gouverneurs sont nos patrons. En fin de compte, ce sont eux qui dictent les lignes de conduite. Cela dit, l’amélioration du niveau de responsabilité sur la patinoire ne part pas seulement d’eux. Les directeurs généraux peuvent donner le ton eux aussi et nous le faisons dans le cadre normal de nos réunions habituelles. Nous n’attendons pas les directives de nos patrons pour agir. Mais s’ils décidaient d’un commun accord qu’il est souhaitable d’apporter des changements, c’est évident que nous devrions nous y soumettre. Nous sommes après tout leurs employés. »

Outre Brendan Shanahan, le vice-président Colin Campbell et le responsable des arbitres Stephen Walkom parleront de hockey et surtout de règlement avec les gouverneurs qui devraient lever leur assemblée annuelle en fin d’avant-midi, heure de la Californie.

Match en plein air

Ajoutez le nom des Coyotes de Phoenix à la liste des équipes qui veulent présenter un match en plein air. Après Los Angeles qui présentera, en janvier, un match sous le soleil, Phoenix voudrait profiter de la frénésie du Super Bowl, qui sera justement disputé à Phoenix en 2015, pour présenter un match en plein air sur le terrain du stade de baseball où évoluent les Diamondbacks.

Propriétaire du Canadien, Geoff Molson a accueilli avec surprise cette candidature des Coyotes. « La grande popularité de ces matchs incite tous les clubs à vouloir les présenter. Un match à l’extérieur demeure une priorité pour nous chez le Canadien. Nous signifions toujours notre intérêt et je demeure confiant et convaincu que notre tour viendra. »