BUFFALO – Simon Bourque n’avait pas sa place parmi les 117 espoirs invités cette semaine à Buffalo pour la dernière étape de reconnaissance en vue du prochain repêchage de la Ligue nationale de hockey.

Du moins, c’était la logique véhiculée il y a quelques mois à peine par la Centrale de recrutement de la LNH. Lors de la publication de son rapport de mi-saison, qui répertoriait alors les 210 patineurs les plus prometteurs en Amérique du Nord, le nom du défenseur de l’Océanic de Rimouski n’y figurait nulle part.

L’oubli n’était pas passé inaperçu. Comment un arrière de 17 ans occupant un rôle de premier plan au sein de la brigade défensive de l’une des meilleures formations juniors au pays avait-il pu être boudé de la sorte? L’entraîneur de l’Océanic, Serge Beausoleil, avait défendu son protégé en qualifiant la situation « d’aberration ».

« Ça avait été une petite déception. Ce n’est pas que je m’attendais à être sur cette liste, mais je voulais y être », avouait Bourque samedi matin après avoir complété les tests physiques qui clôturaient pour lui une longue semaine au cours de laquelle il venait d’être mis en vitrine pour les 30 équipes de la LNH.

Au plus fort de sa colère, Beausoleil avait accusé les évaluateurs de la Centrale d’accorder trop d’attention aux équipes des provinces maritimes. D’autres observateurs, parmi ceux-ci des dépisteurs affectés au territoire de la LHJMQ, ont depuis offert un point de vue plus nuancé, avançant qu’un concours de circonstances avait fait en sorte que les yeux de la LNH au Québec n’avaient tout simplement pas eu l’occasion de voir Bourque à l’œuvre.

Simon BourquePeu importe la raison qui expliquait son absence, le défenseur originaire de Longueuil y a vu une belle occasion de confondre les sceptiques.

« Dès qu’il a vu ça, Serge m’a dit que ce n’était pas grave, que selon lui, je méritais d’être là. Et moi aussi je sentais que je le méritais. Donc après avoir pris un peu de recul, c’est devenu un élément de motivation pour moi. Ça m’a donné envie de travailler encore plus fort pour apparaître sur la version finale. »

Bourque a gagné son pari. Lorsque la Centrale a dévoilé la dernière ébauche de sa hiérarchisation nord-américaine, il apparaissait au 76e échelon. Parmi les joueurs ignorés sur la mouture précédente, seul Jean-Christophe Beaudin, des Huskies de Rouyn-Noranda, a bénéficié d’une correction plus favorable.

Un apprentissage accéléré

Les circonstances ont voulu que Bourque soit placé dans une situation qui ne lui était pas nécessairement destinée à sa deuxième saison dans le circuit Courteau. Le vétéran Samuel Morin s’est fracturé la mâchoire en début de saison avant de quitter pour le Championnat mondial en décembre, Jan Kostalec a lui aussi représenté son pays sur la scène internationale et le vétéran de 20 ans Charles-David Beaudoin a raté cinq semaines en fin de saison en raison d’une blessure.

« J’ai eu un rôle important dès le début de l’année et ça m’a forcé à prendre un plus gros rôle dans l’équipe. Dans le temps des Fêtes, on était assez jeunes à la défense avec McSween, Picco et moi », se rappelle le numéro 24 de « l’équipe de toute une région ».

Cette profondeur a permis à l’Océanic de maintenir le cap et d’entrer à pleine vapeur en séries éliminatoires, où il a vogué jusqu’à la troisième conquête de la Coupe du Président de son histoire. Bourque, qui avait amassé 38 points et affiché un différentiel de plus-27 en saison régulière, a donc rapidement appris à exceller sous haute pression.

« Je suis resté calme, c’est ce que j’essayais faire. Je jouais avec assurance et je pense que j’ai bien relevé le défi », évalue-t-il au terme d’une longue saison qui lui a aussi apporté une participation au tournoi de la Coupe Memorial.

« C’est un petit bonhomme qui a un désir de jouer très élevé, complimentait récemment Denis Fugère, un dépisteur à l’emploi des Kings de Los Angeles. Ce n’est pas un défenseur au style robuste, mais s’il doit jouer la game physique, il ne la refusera d’aucune façon. Il fait une excellente première passe et est efficace dans les deux sens de la patinoire. Je pense qu’il peut être un défenseur numéro 4 en devenir dans la LNH. »

« Un petit gars constant, décrit quant à lui un recruteur d'une équipe de l'Association Est. Il n’a pas un gros physique, mais possède un très bon sens du hockey. Dès qu’il gagnera en force et en gabarit, ça ne fera qu’améliorer son jeu dans le fond du territoire défensif. »

Le départ d’un mentor

Lors de la distribution des récompenses individuelles à la fin de la saison de la LHJMQ, l’Océanic comptait deux finalistes dans la catégorie du meilleur défenseur défensif. Le premier était Bourque et l’autre, celui qui a éventuellement remporté la palme, était Kostalek. Les deux formaient une paire d’une étanchéité exemplaire à Rimouski et le coup de main du Tchèque de 19 ans a été d’une valeur inestimable aux yeux de son jeune compagnon de jeu.

« Pour moi, ça a été formidable pour mon développement, appréciait Bourque. J’ai appris beaucoup de ce gars-là, ça a été mon mentor pas mal tout au long de la saison. On avait une très bonne relation. Dès mon arrivée, à l’âge de 16 ans, c’est lui qui me transportait, qui me conduisait à l’école ou à l’aréna. On s’est bien entendu dès le départ et cette année, ça s’est encore solidifié. »

Kostalek, un espoir de l’organisation des Jets de Winnipeg, a un contrat professionnel en poche et devrait passer la prochaine saison dans la Ligue américaine. Même chose pour Morin, un choix de première ronde des Flyers de Philadelphie. Quant à Beaudoin, il n’est plus admissible à un retour au junior et explore ses options au niveau professionnel.

« Tous les gars de qui j’ai appris cette année s’en vont, constate Bourque. Ça va être à moi de prendre ce rôle-là maintenant. »

Le prochain pilier de la défense rimouskoise dit s’être entretenu avec une quinzaine d’équipes, dont le Canadien, au cours de la dernière semaine. Si les estimations de la Centrale de recrutement de la LNH sont exactes, il devrait être repêché avant la fin de la quatrième ronde à la fin juin en Floride.

« Je ne me fais pas d’attente. Dans le fond, ce que je veux, c’est une porte d’entrée pour pouvoir prouver ce dont je suis capable. »