La Ligue nationale de hockey n’a pas dit oui à Québec qui milite en faveur du retour des Nordiques dans la capitale et à Las Vegas qui voudrait attirer la LNH dans la capitale mondiale du jeu. Pas plus qu’elle n’a dit non.

De fait, la seule chose que la Ligue nationale de hockey ait dite aux amateurs de Québec et Vegas dans le cadre de la première des trois réunions annuelles de ses gouverneurs c’est : soyez patients.

Gary Bettman a même refroidi les ardeurs des plus optimistes en rappelant que la saison 2017-2018 était la date la plus hâtive pour une expansion selon ses projections et non une date fixe. «Cette expansion, si expansion il y a, pourrait venir plus tard qu’en 2017-2018. Rien ne presse. Notre situation économique est solide. Nos revenus sont à la hausse malgré la fluctuation à la baisse du dollar canadien. Nous n’avons pas besoin d’une expansion. Nous étudions cette possibilité afin de déterminer si elle peut faire progresser notre ligue. Ce processus est très long. Il n’y a pas d’échéancier à respecter. Il n’y a pas de date butoir. On prendra tout le temps nécessaire pour bien analyser, vérifier et mesurer les informations fournies par les groupes afin de prendre la meilleure décision possible», a plusieurs fois répété le commissaire qui a rencontré les journalistes après la conclusion de la réunion.

Sans l’ombre d’un doute décevante pour les amateurs pressés de voir les Nordiques revenir à Québec, cette sortie de Gary Bettman ne devrait pas être interprétée comme un désaveu à l’endroit de l’une ou l’autre des deux villes candidates. Après tout, le commissaire multiplie les appels au calme depuis qu’il a amorcé le processus d’expansion en juin dernier.

Plus encore, le commissaire a louangé la qualité des présentations faites par Pierre Dion, pour Québecor, et William Foley de Las Vegas en matinée, mardi, dans les bureaux de la Ligue à New York. Des présentations effectuées devant les 10 équipes – Anaheim, Boston, Calgary, Caroline, Chicago, Minnesota, Philadelphie, Tampa Bay, Toronto et Washington – composant le comité exécutif de la LNH. «Nous n’attendions rien de moins de la part de ces deux groupes qui nous ont expliqué en détail qui ils sont, quels sont leurs objectifs et comment ils comptent s’y prendre pour mener à bien leur projet», a indiqué le commissaire de la Ligue.

Si ces présentations se sont bien déroulées et qu’elles ont permis aux représentants de Québec et Las Vegas – voir autre texte  – de quitter New York avec la satisfaction du devoir accompli, elles n’ont fait l’objet d’aucun débat lors de la réunion impliquant les 30 clubs plus tard en après-midi.

En moins de 10 minutes, Gary Bettman a simplement fait le point sur la progression du projet d’expansion. Rien de plus. Les débats viendront dans le cadre de futures réunions du comité exécutif qui ne sont pas encore au calendrier. «Est-ce qu’il faudra une ou plusieurs réunions avant que le dossier soit suffisant avancé pour être présenté à l’ensemble des gouverneurs? Je n’en ai pas la moindre idée. Mais je vous répète que nous avons tout notre temps», a insisté Bettman.

23 clubs à convaincre

S’ils n’ont pas débattu du projet d’expansion, les gouverneurs de la LNH sont aussi demeurés cois dans leurs commentaires à la sortie de la salle de réunion. «Gary vous expliquera tout ça», a simplement lancé Kevin Gilmore, vice-président exécutif et chef de l’exploitation (bras droit de Geoff Molson) du Canadien de Montréal en guise d’esquive à la question lancée sur ses sentiments à l’égard de Québec.

Les seules autres «réponses» sont venues des présidents Paul Holmgren (Flyers) qui a levé le pouce en l’air et John Davidson (Blue Jackets) qui a lancé : «J’aime Québec ! C’est une excellente ville de hockey.»

John Davidson n’était pas seul dans son camp.

Dans les corridors voisins de la salle de réunion mardi midi quelques conversations avec des membres des 30 clubs croisés ici et là permettaient de constater une sympathie évidente à l’endroit de Québec.

Au-delà cette sympathie, le président et chef de la direction aura un mandat clair, net et précis à remplir pour que cette sympathie se traduise en un vote favorable en vue du retour des Nordiques à Québec : rassurer les 30 gouverneurs quant à la viabilité d’un club de la LNH dans la capitale. La question que se posent bien des gouverneurs est simple. Et normale. Ils se demandent comment, alors que les Nordiques ont quitté Québec en 1995 alors que la masse salariale du club oscillait autour des 18 millions $, pourront-ils survivre aujourd’hui avec un plafond qui flirtera bientôt avec les 80 millions $?

Par le biais de la présentation effectuée mardi à New York, Pierre Dion a sans l’ombre d’un doute dévoilé son plan économique visant à faire des Nordiques un club rentable. Le plan de Québec, comme celui de Las Vegas, sera étudié avec attention par des analystes embauchés par la LNH pour l’aider à prendre une position sur la validité des deux candidatures.

En bonne posture

Bien qu’il soit impossible de savoir si la LNH par le biais de ses gouverneurs lorgne vers une expansion ou qu’elle décidera de la repousser, il est clair à mes yeux que même une conclusion négative ne sonnerait pas le glas à un éventuel retour de la LNH à Québec. Un refus de procéder immédiatement à l’expansion ne ferait que retarder ce retour.

Pourquoi? Parce que le processus actuel permet à Québec de se faire reconnaître. De prendre du galon. De démontrer que la ville a changé. Que son économie est plus forte. Que les partisans sont toujours là et aussi enthousiastes qu’ils l’ont toujours été, mais que les dollars du monde corporatif sont plus abondants que ceux qui doutent du projet ne le croient.

Et ça, c’est crucial.

Car si pour une série de raisons, bonnes ou mauvaises, Québec n’obtenait pas les Nordiques par le biais de l’expansion, elle deviendrait du coup la destination numéro un dans l’éventualité du transfert ou de la vente d’un club en difficulté.

Ce dernier scénario ne plait pas à la LNH. C’est évident. Car une relocalisation serait loin de remplir les coffres comme une éventuelle expansion le ferait considérant que Québec et Vegas devront verser 500 millions $ chacune pour obtenir le privilège de se bâtir une équipe.

Mais comme on l’a vu dans le dossier du transfert des Thrashers d’Atlanta vers Winnipeg qui a vu renaitre les Jets, ce scénario peut devenir nécessaire en dernier recours.

Et s’il n’est pas intéressant pour la LNH, ce scénario le serait grandement pour Québec qui obtiendrait pour bien moins cher une équipe et l’organisation qui l’entoure. Et cette équipe, même moribonde, offrirait aux amateurs de Québec, et à Québecor, un bien meilleur rapport qualité-prix que le bout de papier qui confirmera la renaissance des Bleus en retour d’un demi-milliard de dollars.

On en est là. Quelle conclusion tirer de tout ça? À mes yeux et bien que je me sois toujours rangé dans le camp des plus pessimistes quant au retour de la LNH à Québec, je crois aujourd’hui que le processus est tellement bien enclenché que ce retour viendra un jour. Ça prendra le temps que ça prendra, mais ça viendra!

Opérations hockey

S’ils ont bien peu parlé de l’expansion, les gouverneurs ont parlé de hockey. Et c’est bien tant mieux.

Ils ont fait le point sur l’implantation de la prolongation à trois contre trois. Une prolongation qui semble offrir les résultats espérés car depuis le début du calendrier préparatoire, 77% des prolongations se sont décidées sans qu’on ait recours aux tirs de barrage. «Ce n’est pas un essai que nous effectuons cette année. L’essai a été effectué dans la Ligue américaine. Et il a été concluant. Nous adoptons cette forme de prolongation avec la ferme intention qu’elle fasse dorénavant partie des règles du hockey», a insisté Gary Bettman.

Si la LNH a testé la prolongation à trois contre trois en matchs préparatoires, elle ne l’a pas fait en ce qui a trait aux appels logés par les entraîneurs pour contester des décisions des officiels sur la patinoire. «Les systèmes ne sont pas encore tout à fait à point, mais ils le seront pour l’ouverture de la saison la semaine prochaine», a ajouté le commissaire de la LNH.

Les gouverneurs ont aussi reçu la visite d’un analyste de la banque CIBC qui est venu parler des fluctuations à la baisse du dollar canadien, de leurs conséquences et des possibilités que cette fluctuation change de direction et reprenne son envol ce qui serait un plus pour les revenus de la LNH en raison de l’importance des droits de télédiffusions au Canada. «Le taux de change nous affecte, mais nos revenus demeurent à la hausse. Notre projection prévoit des revenus d’au-delà de 4 milliards encore cette année. Mais il est trop tôt pour préciser ce montant. Quant au dollar canadien, le spécialiste nous a beaucoup parlé de la situation actuelle, mais il a surtout expliqué que les projections sont très difficiles en cette matière. Tellement que lui et ses collègues pourraient faire passer les météorologues pour des génies», a conclu Gary Bettman.

S’il a été question de commotions cérébrales, de leurs conséquences néfastes et des poursuites menées de front par plusieurs anciens qui dénoncent l’insouciance affichée par la LNH dans un passé pas si lointain, personne, pas même le commissaire Bettman, n’en a soufflé mot.

Tout ce beau monde refera sur le point sur l’expansion – du moins je l’espère – et sur les affaires courantes lors de la prochaine réunion des gouverneurs à Pebble Beach, en Californie, au début du mois de décembre.
 

L'expansion reléguée au second plan