MONTRÉAL – « Ce n’est pas aujourd’hui que je vais commencer à tirer des roches ». Bob Hartley y est allé de cette déclaration dans sa conférence téléphonique et c’est tout à son honneur de réagir ainsi même s’il souhaitait ardemment poursuivre l’aventure avec les Flames de Calgary.

Après l’annonce de son congédiement par le directeur général Brad Treliving mardi, Hartley a pris cette journée pour faire le vide et il a commenté son départ une journée plus tard.

Parmi les arguments qu’il a soulevés pour trancher, Treliving a mentionné qu’il entretenait une divergence d’opinions sur certains aspects avec Hartley.

Surpris de cette déclaration, le sympathique entraîneur a répliqué de cette manière.

« À aucun point, je n’ai senti ça, c’était nouveau pour moi d’entendre ce commentaire », a indiqué Hartley qui a avoué se sentir très triste en apprenant cette nouvelle décevante.

Le directeur général des Flames a également déclaré, dans un jugement très direct, que Hartley avait mené l’équipe aussi loin qu’il le pouvait.

« Quand je regarde la progression d’un (Mikael) Backlund, (Joe) Colborne, (Sean) Monahan, (Johnny) Gaudreau, (Sam) Bennett, (T.J.) Brodie, (Dougie) Hamilton, pas un de ces joueurs a pris un pas de recul », a soulevé Hartley.

« C’est son opinion et son évaluation. C’est lui le DG et il a des décisions à prendre. Certaines plaisent et d’autres non. Je n’aime pas sa décision, mais je n’ai pas beaucoup d’options », a enchaîné celui qui a dirigé les Flames pendant quatre saisons.

Entraîneur de carrière, Hartley veut respecter la confidentialité des démarches qui seront effectuées par les équipes à la recherche du candidat idéal. Par contre, il ne cache pas que sa priorité est de revenir derrière un banc de la LNH aussitôt que possible.

« C’est comme de demander à un cheval de ne pas courir », a imagé Hartley avec ses expressions typiques. « J’aime diriger, c’est ma passion, j’ai ça dans le sang. Je le fais même l’été, je ne sais pas si une journée passe sans que j’y consacre du temps. »

À ce propos, le nom de Hartley a été proposé à une vitesse fulgurante comme aspirant parfait pour le poste avec les Sénateurs d’Ottawa. À vrai dire, ce scénario a été évoqué seulement quelques minutes après l’annonce des Flames.

Le Franco-Ontarien a joué de prudence sur cette question ne voulant pas trop se mouiller.

« C’est le temps de l’année, le carrousel d’entraîneurs tourne à pleine vapeur. Ça amène beaucoup de spéculations et de rumeurs. C’est normal et je vais attendre et analyser la situation. Si on doit poser des gestes, on va le faire », a déclaré l’entraîneur originaire de Hawkesbury qui a déjà refusé des offres moins attrayantes.

Bob HartleyHartley a donc été congédié pour la troisième fois de sa carrière – par l’Avalanche et les Thrashers auparavant – si bien qu’il se retrouve sans emploi même s’il a mérité, ironiquement, le trophée Jack-Adams l’été dernier.

« Ceux qui me connaissent savent que je ne recherche pas les honneurs individuels », a insisté Hartley fidèle à sa réputation.

Hartley aurait voulu récolter les fruits

Une fois de plus, Hartley le dit avec une vision d’équipe et non en pensant à lui, mais son plus grand regret s’avère d’avoir été limogé avant l’éclosion qu’il prévoit pour les Flames.

« Je travaille pour le collectif et c’est ce que j’ai aimé pendant mes quatre années avec les Flames. On a renfloué les coffres avec d’excellents joueurs et je pense que l’organisation est à quelques éléments de devenir une grande équipe », a exposé celui qui dirigé le Titan de Laval dans la LHJMQ.

Hartley avait hérité des rênes des Flames après trois exclusions consécutives des séries. Il a amorcé un virage important qui a nécessité deux autres absences éliminatoires avant la participation de la saison dernière.

« On a fait partie d’une reconstruction et il n’y a aucune garantie là-dessus. Je suis vraiment fier de ce qu’on a accompli dans les quatre dernières années. On a bâti une culture de travail et d’honnêteté. C’est vraiment décevant, mais ça fait partie du risque du métier », a-t-il raconté avec sa générosité habituelle.

« Quand tu regardes l’organigramme des Flames et que tu lui ajoutes quelques joueurs, ça devient toute une machine de hockey et une machine qui sera jeune pour plusieurs années », a avancé Hartley.

Selon quelques échos dans la presse albertaine, certains joueurs n’auraient pas plaidé pour la cause de Hartley. Lucide, l’entraîneur comprend très bien la situation qu’il décrit ainsi.

« De la manière dont l’équipe était construite, tous les jeunes joueurs obtenaient beaucoup de temps d’utilisation. C’est certain qu’il y aura des vétérans mécontents de leur rôle. Bientôt, les jeunes vont avoir pris le contrôle de l’équipe avec le capitaine Mark Giordano », a interprété Hartley.

Convoqué à une longue réunion avec ses anciens patrons lundi soir, Hartley a appris la décision de ceux-ci mardi matin. De son propre aveu, ce ne fut pas une surprise totale. Après tout, Hartley n’a jamais oublié qu’il n’avait pas été embauché par Treliving. Jay Feaster lui avait confié ce poste avant d’être congédié quand Brian Burke a fait son arrivée. Burke a ensuite placé Treliving dans le poste de directeur général.

« Ma relation avec Brian Burke et Brad Treliving était excellente. Ils auraient pu me virer dès qu’ils sont arrivés en poste. Brian avait été très honnête en me disant que j’étais son homme jusqu’au moment où il trouverait un nouveau DG. […] Brad est arrivé avec une ouverture d’esprit et il m’a donné une chance. Je les considère comme des amis et j’ai un énorme respect pour eux, ç’aurait été vraiment facile de me congédier avant », a dit Hartley.

« Au cours des derniers mois, ils doivent avoir vu quelque chose qu’ils n’aimaient pas. Ça fait partie du jeu, on va se retrousser les manches et se relever », a poursuivi l’homme de hockey.

Trois pages noires, mais un beau livre

L’état-major des Flames a décidé de donner un coup de barre même si Hartley ne pouvait pas miser si les trois gardiens qui ont partagé la plupart de l’action cette saison n’ont pas été à la hauteur.

Il n’a pas voulu s’attaquer à Jonas Hiller, Karri Ramo et Joni Ortio les décrivant comme trois bonnes personnes.

« Ce n’est pas aujourd’hui que je vais commencer à tirer des roches. Je ne me suis jamais servi des médias pour attaquer personne. Je préfère les utiliser pour promouvoir notre sport », a noté Hartley.

Plus serein que la veille, Hartley a préféré voir les côtés positifs de l’ensemble de sa carrière.Bob Hartley

« Hier (mardi), c’est certain que je ne me sentais pas bien. Tu cherches des coupables, des excuses et des faits. Mais, quand tu passes quatre ans dans une organisation, c’est comme un livre et ce qui est plate dans le coaching, c’est que les chances sont que la dernière page de ton chapitre avec chaque organisation comporte du noir. Quand tu te fais congédier, on peut parler d’injustice et de frustration, mais j’ai été chanceux. Je dirige depuis que j’ai 26 ans et ça m’est arrivé seulement trois fois », a relativisé Hartley.

Certes, celui dont le fils, Steve, vit de la même passion, admet que son métier est injuste.

« Oui, mais personne ne nous place un fusil sur la tempe pour faire ce travail. C’est un monde très émotif et ça ressemble à des montagnes russes. Tout est tellement plus facile quand tu gagnes. Quand tu perds, la mentalité n’est pas pareille et des doigts sont pointés. Quand les saisons ne se déroulent pas de la bonne façon, ça va causer des dommages », a-t-il reconnu.

Durant son point de presse, Hartley s’est assuré de remercier les gens de l’organisation des Flames tout comme les amateurs passionnés et son mentor à Calgary, Al MacNeil.

« L’une de mes réalisations me rendant le plus fier à Calgary, c’est d’avoir convaincu dans la même journée Clint Malarchuk et Micheal Ferland d’aller en thérapie pour leurs problèmes de consommation d’alcool. Oui, on veut gagner des matchs, mais on est des humains et la famille vient en premier », a conclu l’entraîneur qui ne risque pas de chômer longtemps.