Être assigné à la couverture de la série finale de la Coupe Stanley veut aussi dire s'immerger complètement dans celle-ci. Impossible d'éviter les discussions lors des journées sans match à propos de tel facteur, de tel joueur, de telle situation. On se questionne entre collègues pour dénicher un nouvel angle ou pour tâter le pouls des membres des médias d'une ville ou de l'autre.

Il y avait presque unanimement un sentiment de série à moitié gagnée après la performance sans bavure des Bruins lors du troisième match, en opinion du moins. Les « Big Bad Bruins » étaient imbattables, intraitables sur leur patinoire. Les gros canons des Blackhawks, eux, étaient introuvables, frustrés, voire en panique. Rien n'allait plus. Jusqu'à ce que Brent Seabrook marque en prolongation mercredi soir, faisant même paraître Tuukka Rask disons... humain.

Il est facile de tomber dans le piège. Après tout, nous sommes là à vous marteler à coup de « match pivot », de « but important » et de changement de « momentum » au gré des confrontations... Comment résister? Or, ces séries nous prouvent encore une fois que la volonté et l'abandon à des systèmes élaborés et des consignes précises auront toujours le dessus sur tous les joueurs talentueux qui ont tout le momentum du monde.

Les Bruins sont cinglants et acharnés dans leur façon de se défendre en ciblant les meilleurs joueurs adverses jusqu'à leur faire perdre la tête. Et ça marche. Ils sont convaincus de pouvoir battre Crawford du côté de la mitaine. Et ça fonctionne.

Les Hawks, de leur côté, s'entêtent à pratiquer une transition rapide. Et c'est efficace. Ils ont répondu après deux performances anémiques en plaçant des rondelles tout juste derrière les défenseurs en noir et jaune afin de les défier en utilisant la vitesse supérieure de leurs attaquants rapides. Et, devinez quoi, le tout leur a souri.

Il est évident que la confiance joue un immense rôle dans la performance d'un athlète. Il est également incroyable de voir à quel point cette confiance est fragile dès que le moindre petit doute s'installe. Ce phénomène s'observe malgré la présence des meilleurs joueurs de leur profession en finale d'un championnat qui nécessite pas moins de 16 victoires distinctes, même en cette saison tronquée en raison d'un conflit de travail. L'unique présence en grande finale devrait être suffisante pour que chacun des compétiteurs qui y participe marche le torse bombé, la tête bien haute. Pourtant, le fait de vouloir réussir à chaque tentative et le désir de vaincre sont si forts qu'ils deviennent des obstacles et des sources d'inquiétude pour l'athlète soucieux.

Les joueurs des Blackhawks et des Bruins nous prouvent dans ce duel que toute prédiction n'est que pure spéculation, presque une devinette. Ils nous démontrent encore une fois que deux groupes qui, en termes sportifs, ont connu l'adversité d'une aventure de deux mois sans lendemain - et survécu à celle-ci - sont beaucoup plus susceptibles de remporter les grands honneurs qu'un ramassis de talents individuels. Dans de telles circonstances, toute prédiction est futile et nous sortons tous gagnants d'un spectacle relevé au possible, peu importe le gagnant.

Je devrai donc m'abstenir dans le futur de tenter de prédire l'issue d'une telle série. D'ici là, n'oubliez pas que j'avais dit Chicago en six et que ça tient toujours...