PITTSBURGH - Ainsi va Marc-André Fleury devant le filet, ainsi va Gilles Meloche dans la vie.

"Quand mon gardien va, tout va", lance l'entraîneur des gardiens des Penguins de Pittsburgh, en arborant un large sourire.

Fleury, lui, est toujours souriant peu importe que ça aille bien ou pas. Le jeune Sorelois est un véritable "Roger Bontemps". Jamais rien ne semble l'affecter, surtout pas dans le moment où tout fonctionne à merveille pour lui.

Les Penguins ont remporté neuf de leurs 10 premiers matchs en séries éliminatoires et il a récolté toutes les victoires.

Fleury dit devoir une fière chandelle à l'optométriste d'Ottawa qui lui a refilé la suggestion, par écrit, de délaisser ses jambières jaunes, l'hiver dernier.

"Je ne me rappelle pas de son nom, mais je tiens à la remercier. Je suis bien meilleur avec mes jambières blanches", s'esclaffe-t-il.

Janet Leduc, originaire de Timmins, en Ontario, est l'optométriste en question. Dans la lettre qu'elle a envoyée à Fleury vers la mi-décembre, elle soulignait que la couleur jaune est celle qu'on perçoit la plus facilement. Elle citait en exemple les autobus scolaires et les taxis qu'on ne peut pas manquer.

Selon son raisonnement, les jambières jaunes - comme le bloqueur et la mitaine de la même couleur avec lesquels il jouait - s'offraient en cibles aux francs-tireurs de la LNH, qui pouvaient déceler plus facilement où ne pas viser. Avec des pièces d'équipement de couleur blanche, les joueurs ont moins de repères.

"J'y crois, dit Fleury. J'ai décidé de tenter l'expérience à l'entraînement avant mon retour au jeu, en mars. Mes coéquipiers m'ont tout de suite dit que je paraissais plus gros devant le filet. J'ai gagné quelques matchs à mon retour, et la décision a été facile à prendre."

Fleury, âgé de 23 ans, n'a encaissé que trois défaites en temps réglementaire, en plus d'une autre en prolongation, en 23 sorties depuis qu'il a rangé ses pièces jaunes (10-2-1, en saison, et 9-1 en séries).

Evidemment, le changement de couleurs n'est pas l'unique explication aux succès qu'il connaît. Après avoir raté trois mois d'activités en raison d'une entorse à une cheville, Fleury a tôt fait de remarquer, à son retour, une amélioration dans le rendement des Penguins en défense.

"J'ai vite vu la différence. L'équipe était beaucoup mieux structurée en défense. Elle accordait beaucoup moins d'occasions de marquer. Ma tâche est plus facile", mentionne-t-il.

Meloche corrobore l'analyse, soulignant au passage le brio qu'a eu le remplaçant de Fleury, Ty Conklin, en son absence. Il ajoute toutefois qu'on doit donner le mérite à Fleury parce qu'il a redoublé d'ardeur afin de retrouver la forme.

"Marc-André jouait bien avant de se blesser et il a su reprendre là où il avait laissé. Il a bien paru parce que l'équipe était mieux organisée devant lui."

Plus en contrôle

Selon Meloche, Fleury a aussi connu une belle progression. Il a surtout apporté des correctifs à son positionnement ainsi qu'à ses déplacements devant le filet. Il avait tendance à trop vouloir miser sur ses qualités athlétiques.

"Souvent, dans ses déplacements latéraux, il débordait d'un ou de deux pieds de chaque côté. Il paraissait mal parce qu'il se retrouvait hors position. Il a dû apprendre à être moins actif.

"Marc-André est un des gardiens aux réflexes les plus aiguisés, reprend Meloche. Il a toujours misé sur son agilité dans les rangs juniors et à ses débuts dans les rangs professionnels. L'agilité seule ne permet pas d'avoir du succès dans la Ligue nationale."

Meloche croit aussi que le passage du "jaune au blanc" a été bénéfique pour son jeune protégé.

"Ç'a fait une différence, aucun doute. Marc-André paraît plus imposant dans la circulation dense parce que les joueurs peuvent moins voir les ouvertures. Imaginez un autobus scolaire comment c'est visible. C'est la même chose pour les jambières d'un gardien", résume-t-il.