Surprise, surprise. On vous avait pourtant prévenu que le Canadien volerait un match à Boston.

Je blague, bien sûr. Que tous ceux qui ont accordé la série aux Bruins - et ils sont nombreux - lèvent la main s'ils avaient juré dur comme fer que le Canadien prendrait les commandes dès le premier soir. Bon, on peut à peu près tous aller se rasseoir, n'est-ce pas?

Les joueurs du Canadien ne l'ont pas volé. Carey Price, oui. Même si Price a effectué 31 arrêts sur les 31 tirs qui ont suivi le premier des deux buts de Brian Gionta, il faut attribuer cette victoire imprévue à un effort d'équipe. Ils n'ont pas tous joué un rôle prépondérant dans cette victoire, mais ils se sont tous présentés.

On commence par quoi pour expliquer ce qui s'est passé? Par qui?

Par l'incontestable première étoile, peut-être? Price a fait figure de géant devant sa cage. Il a pu voir toutes les rondelles tirées dans sa direction parce que les Bruins ont négligé d'utiliser la seule stratégie qu'ils auraient dû préconiser contre lui, c'est-à-dire se stationner devant lui, le bousculer et le rudoyer en l'empêchant de stopper une rondelle ou deux.

Il a été solide comme tout le monde l'avait prédit. Il a mis le match dans sa poche en deuxième période quand il a essuyé un barrage de 18 tirs, dont quatre ou cinq à bout portant par Zdeno Chara.

Pour placer les choses en perspective, juste au cas où on s'imaginerait que repousser les boulets de Chara constitue une partie de plaisir, précisons que Travis Moen et Andrei Kostitsyn ont été soignés à l'infirmerie après avoir été atteints aux jambes par ses boulets.

Price a mis fin à une séquence de huit revers consécutifs dans les séries. Au cours des derniers jours, on s'était inquiété de ses pauvres statistiques compilées à Boston cette saison. Il aurait fallu tenir compte que dans la défaite de 8-6, ses coéquipiers étaient davantage intéressés à sauver leur peau, quand les Bruins leur labouraient la face de leurs poings, qu'à le protéger. Et dans le revers de 7-0, après la blessure grave subie par Max Pacioretty, personne ne s'était présenté.

Cette fois, avec l'aide d'un peu tout le monde, il est peut-être parvenu à semer un doute dans la tête des joueurs et de la direction des Bruins. S'il fallait qu'il soit le Jaroslav Halak, cuvée 2011. S'il fallait qu'il se lève de la même façon dans le prochain match. À en juger par la saison qu'il vient de connaître, personne n'en doute vraiment.

Brian Gionta maintenant. Meilleur marqueur du Canadien contre Boston cette saison, il en a remis dans ce match inaugural. Ses deux exploits de la soirée lui ont permis de porter son total de buts à sept en autant de matchs contre eux.

Et Scott Gomez, lui? Il s'est impliqué. Il a été alerte. Il n'a pas obtenu de tirs au but, mais il a habilement préparé les buts de Gionta, notamment en volant le disque à Milan Lucic à la seconde occasion. Lucic, qui n'a marqué aucun but à ses 11 dernières rencontres, a d'ailleurs connu une très mauvaise soirée.

Le héros obscur a été Tomas Plekanec qui a été combatif à l'extrême. Il a été une menace constante pour Tim Thomas et il a largement contribué à paralyser le premier trio des Bruins.

C'était primordial que le Canadien marque le premier but de la soirée, lui qui a remporté 72% de ses matchs dans ces circonstances cette saison. La foule, qui était déchaînée avant le but de Gionta, a semblé assommée par la suite. Comme si la crainte de voir le Canadien leur jouer un autre tour pendable dans les séries venait de s'installer.

Où étaient passés les méchants?

Si ce match ne s'est pas déroulé comme prévu, c'est surtout parce que les Bruins n'ont pas été les Bruins. On s'attendait à les voir frapper rondement dès le départ afin de rappeler à leurs rivaux de très mauvais souvenirs.

On se serait attendu à ce qu'ils occupent le territoire de Price en permanence. On croyait que Chara écraserait quelques chandails tricolores dans la bande. Il s'est plutôt concentré à tenter de décapiter Price de ses tirs. Il a été plutôt tranquille si on fait exception de la pénalité de frustration qu'il a écopée à la toute fin du match quand il a tenté d'écraser Plekanec (5 pieds et 10 pouces, 190 livres) en laissant choir ses 260 livres sur lui.

Dans le camp du Canadien, on a eu nettement l'impression que le mot d'ordre était de ne pas répliquer aux coups portés par les Bruins. Les rares fois où les joueurs de Claude Julien ont tenté timidement d'allumer des feux, ils n'ont pas trouvé preneurs.

La directive de Jacques Martin a paru très évidente quand Brad Marchand, nettement le meilleur élément de son équipe, a passé son bâton sous le nez de Gomez qui patinait vers le banc à l'occasion d'un arrêt du jeu. Gomez a fait mine de ne pas le voir. Cette réaction a laissé Marchand un brin médusé.

Par cette victoire, le Canadien s'est attribué l'avantage de la glace. Il ne faut pas s'attendre à assister au même genre de match samedi alors que les Bruins vendront chèrement leur peau. Or, quand ils sont dans cet état d'esprit, ils recourent à des tactiques qui ont l'habitude de fonctionner.

Samedi, ils vont sauter sur la glace toutes griffes dehors. On ne pourra pas toujours tourner la tête et les ignorer.