LOS ANGELES - Des 100 plus grands joueurs de l’histoire de la LNH, 24 sont du Québec et 24 ont endossé le chandail du Canadien au cours de leur carrière.

Ce n’est pas rien.

« C’est même extraordinaire, a réagi Mike Bossy lorsqu’on lui a fait part de cette représentation impressionnante. C’est vraiment un grand jour pour le Québec. Dans notre temps, c’était quelque chose pour un Québécois d’atteindre la ligue et je peux t’assurer que ce soir on a tous raison d’être fiers d’être Québécois », a ajouté l’extraordinaire marqueur qui occupe d’ailleurs le tout premier rang dans l’histoire de la LNH avec une moyenne de ,762 buts par match.

Jean Béliveau, les frères Maurice et Henri Richard, Bernard Geoffrion, Dickie Moore, Dave Keon, Doug Harvey de même que les gardiens George Vézina et Jacques Plante avaient donné le ton lors du dévoilement des 33 premiers membres du club sélect des 100 meilleurs joueurs de l’histoire.

Mario Lemieux, son idole de jeunesse Guy Lafleur et Mike Bossy coiffent la liste des 15 Québécois qui les ont rejoints vendredi soir à Los Angeles. Une liste complétée par les gardiens Bernard Parent, Patrick Roy et Martin Brodeur, les défenseurs Serge Savard, Raymond Bourque et les attaquants Yvan Cournoyer, Jacques Lemaire, Marcel Dionne, Gilbert Perreault, Denis Savard, Luc Robitaille et Jean Ratelle

« La représentation québécoise au sein du groupe présenté ce soir est en grande partie attribuable au club de hockey Canadien qui a justement été créé pour permettre aux Canadiens français d’atteindre la Ligue nationale. Le Canadien a longtemps été connu sous le nom des Flying Frenchmen. Dans les années 50, 60 et 70, les francophones étaient nombreux dans le vestiaire. Quand je suis arrivé comme directeur général à Montréal, je me faisais un devoir de repêcher des gars de chez nous. Une année, j’ai échangé tous mes choix avec ceux du Prof Caron qui était à St.Louis pour m’assurer de parler avant les Nordiques de Québec. Ça m’a permis de repêcher un gars comme Stéphane Richer. Je suis fier des bons coups réalisés au cours de mon séjour comme gérant, mais j’ai aussi commis bien des erreurs. Je ne peux pas croire qu’on ait pu passer à côté d’un gars comme Luc Robitaille qui fait aujourd’hui partie des 100 meilleurs joueurs de l’histoire. Quand je regarde le groupe honoré ce soir, on ne peut qu’être fier de la représentation du Québec à commencer par le grand qui parle aux journalistes là-bas qui est certainement l’un des deux, trois, quatre meilleurs joueurs de l’histoire du hockey », a conclu Serge Savard en jetant un regard amusé en direction de Mario Lemieux.

Sur les traces de Lafleur

Dans sa quête d’honorer les 100 meilleurs joueurs qui ont marqué ses 100 premières années, la Ligue nationale de hockey a eu la brillante idée de composer un groupe et non de dresser une liste de 1 à 100. Cette décision a évité des débats inutiles à savoir qui de Mario Lemieux, Wayne Gretzky ou Bobby Orr aurait dû occuper la toute première place.

« Tous les gars que j’ai croisés depuis que je suis arrivé à Los Angeles ce matin sont fiers et heureux d’avoir été sélectionnés. Ces réactions montrent le côté humble des joueurs de hockey. Mais en même temps, nous sommes tous pas mal orgueilleux aussi. Le fait de ne pas être classé ménage les susceptibilités. C’est une très belle expérience. C’est un très grand honneur qu’on nous réserve », a reconnu Mike Bossy.

La LNH a certainement eu raison de procéder comme elle l’a fait. Remarquez qu’aux yeux de Bobby Orr et de Wayne Gretzky, qui a grandi sous l’aile bienveillante de Monsieur Hockey, Gordie Howe est le plus grand joueur de tous les temps.

« Le plus grand joueur de tous les temps n’est malheureusement pas ici ce soir, a lancé Bobby Orr. Gordie Howe était dans une classe à part. Les deux gars qui m’entourent – Wayne Gretzky et Mario Lemieux – étaient dans une classe à part eux aussi et ce n’est certainement pas un défaut que de prétendre qu’ils étaient juste un peu derrière Gordie. »

Bien qu’ils gravitent tous les trois autour de la LNH depuis leur retraite, c’était la première fois de leur carrière que Wayne Gretzky, Mario Lemieux et Bobby Orr étaient réunis. À défaut de pouvoir établir avec certitude le rang précis qu’ils occupent dans l’histoire, il était facile de regarder ces trois illustres hockeyeurs et de conclure qu’ils sont les trois plus grands encore vivants.

Tout en haut de la liste de Gretzky et de Orr, Gordie Howe occupe aussi une place de choix sur la liste de Mario Lemieux. Le Magnifique admet toutefois que Guy Lafleur a toujours été son joueur préféré. « Guy a marqué ma jeunesse. C’est lui qu’on voulait tous imiter. Le Canadien formait une grande équipe et Guy Lafleur était le meilleur joueur de cette équipe», a lancé Lemieux. Si le Canadien de Montréal a fait très bonne figure avec 24 membres de son organisation au sein des 100 meilleurs joueurs du centenaire, le propriétaire des Penguins pouvait se bomber le torse alors que ses anciens coéquipiers Sidney Crosby, Jaromir Jagr, Ron Francis, Luc Robitaille, Bryan Trottier et Paul Coffey l’ont rejoint pour immortaliser leur sélection.

Glorieuse représentation

Simple coïncidence ou signe des temps, le Canadien affiche le même nombre de joueurs au sein des 100 meilleurs du premier centenaire qu’il revendique des coupes Stanley.

De ces 24 joueurs, sept défendaient les couleurs du Canadien qui a soulevé la coupe Stanley six fois en neuf saisons entre 1971 et 1979.

« Nous formions une équipe vraiment spéciale. Nous n’avions aucune lacune. On pouvait gagner en jouant vite, lentement, en jouant de façon robuste. Je ne crois pas qu’une autre équipe encaissera seulement huit revers dans une saison. Et n’oubliez pas qu’après avoir perdu huit fois seulement en une année, nous avons connu des saisons de 12 et 16 revers seulement les deux années suivantes. Ça ne se reverra jamais», a souligné Larry Robinson qui n’est pas le moindrement surpris de voir autant d’anciens porte-couleurs du Canadien au sein du top 100.

« Ces sélections couronnent ce que le Canadien a toujours été comme organisation. Le moule a été conçu il y a longtemps et il a toujours été respecté. De grands joueurs sont passés et ils ont été remplacés par d’autres grands joueurs. De Richard à Jean Béliveau, à Guy Lafleur. Quand tu arrivais dans le vestiaire, tu étais pris en charge par des plus vieux qui te transmettaient leur expérience qui te faisaient comprendre ce qu’il fallait faire pour gagner. M. Béliveau l’a fait à mon arrivée. Serge (Savard) m’a ensuite pris sous son aile. C’était mon coéquipier, mon co-chambreur. Sans lui, je ne serais jamais devenu le joueur que j’ai été. Serge a été le joueur le plus important pour moi, mais le meilleur de tous à mes yeux sera toujours Guy Lafleur », a ajouté Robinson qui était aussi fier de voir la représentation francophone au sein des 100 meilleurs joueurs de l’histoire.

« Le Canadien est une organisation spéciale. Mais Montréal est aussi une ville très spéciale pour le hockey. Aller au Canadien durant les belles années ce n’était pas simplement une activité, c’était un événement. Les gens s’habillaient chic pour aller au Forum », se souvenait Robinson.

Yvan Cournoyer qui a soulevé 10 fois la coupe Stanley en 16 saisons, Bob Gainey, Jacques Lemaire et Ken Dryden ont joint les Savard, Robinson et Lafleur.

La sélection de Jacques Lemaire au sein des 100 meilleurs joueurs de l’histoire de la LNH devra mettre davantage de pression sur la direction du Canadien qui n’a toujours pas retiré le chandail numéro 25 de cet ancien grand joueur qui a aussi été capitaine en plus d’être entraîneur-chef.

Un honneur que Serge Savard et Larry Robinson aimeraient d’ailleurs voir se concrétiser rapidement. Heureux d’être élus au sein des 100 meilleurs joueurs de l’histoire, les deux défenseurs déploraient l’absence de Guy Lapointe, le troisième membre du Big Three. « Si j’avais eu un mot à dire, je peux vous assurer que le nom de Guy aurait été sur la liste. Je ne comprends pas qu’il ne soit pas là. Il est l’un des meilleurs défenseurs de l’histoire. Guy était certainement aussi bon que Serge et moi. Il excellait dans toutes les facettes du jeu et il détient toujours le record du plus de buts par un défenseur (28). »

Quatre Nordiques

Dans l’ombre des 24 joueurs du Canadien élus au sein du top 100 dans la LNH, on retrouve quatre anciens Nordiques : Peter Statsny, Joe Sakic, Peter Forsberg et Mats Sundin.

À cette liste, il me semble qu’on aurait facilement pu ajouter le nom de Michel Goulet qui se compare avantageusement à quelques-uns des 100 élus qui ont défilé à Los Angeles vendredi.

Mais bon!

Au sein des joueurs toujours actifs, les sélections de Jaromir Jagr, Sidney Crosby et Alexander Ovechkin allaient de soi. Je suis toutefois surpris et un brin déçu qu’on ait écarté celle de Jarome Iginla et Joe Thornton. Le fait qu’ils n’aient pas soulevé la coupe Stanley a certainement joué en leur défaveur. Surtout si l’on considère que Jonathan Toews, Duncan Keith et Patrick Kane, qui revendiquent trois coupes Stanley avec les Blackhawks de Chicago, complètent la sélection des 100 plus grands joueurs des 100 premières années de la LNH. 

« Cent joueurs, ça peut sembler beaucoup, mais quand tu considères le nombre de joueurs qui ont évolué dans la Ligue et le nombre de grands joueurs qui ont dominé leur époque, 100 joueurs c’est au fond une sélection minuscule. Et ça ouvre la porte au fait que des gars qui devraient être là ont été oubliés», a conclu Larry Robinson.