MONTRÉAL – Même si l’équipe qui le sélectionnera à la fin juin devra utiliser ses outils pour obtenir le produit fini, la Centrale de recrutement de la LNH a décidé de classer Dennis Yan au 30e rang parmi les patineurs de l’Amérique du Nord en raison du potentiel de celui qui serait un heureux mélange de Matt Duchene, Evgeni Malkin, Jakub Voracek et Alex Galchenyuk.

Les attentes sont donc élevées pour l’attaquant des Cataractes de Shawinigan qui disposent de qualités attirantes comme le gabarit, la vitesse et le talent de marqueur.

Puisqu’il possède la double nationalité russe et américaine comme lui, le parcours de Yan est souvent associé à celui d’Alex Galchenyuk. Par contre, l’attaquant de 18 ans possède une seule année d’expérience au niveau junior canadien avec les Cataractes de Shawinigan à la suite d’un passage au sein du programme américain.

Né à Portland en Oregon, Yan est retourné dans le pays d’origine de ses parents, la Russie, à l’âge de 5 ans où il s’est familiarisé avec le hockey. Neuf ans plus tard, la famille s’arrêtait à Sarnia et ensuite à Detroit pour confier à Yan l’environnement idéal afin de poursuivre son développement.

Ce boulot de finition s’est poursuivi cette saison à Shawinigan où Yan a encore une fois démontré sa grande capacité d’adaptation. Même s’il a dû se contenter du 40e rang chez les pointeurs de la LHJMQ, Yan en a prouvé assez aux recruteurs pour l’établir comme un candidat de choix tôt en deuxième ronde.

« C’est un joueur avec des habiletés au-dessus de la moyenne. Il détient beaucoup d’outils pour se démarquer au niveau supérieur. Il a été capable de produire plus de trente buts à 17 ans pour sa saison recrue, c’est très positif », a décrit son entraîneur Martin Bernard.

Dennis YanÉtant donné que Yan pouvait déjà s’exprimer à son arrivée en Mauricie, l’accent a rapidement été placé sur les nuances à travailler dans son répertoire et il n’a pas tardé à retenir l’attention des dépisteurs.

« Il a été une belle surprise, il s’est très bien adapté. Il avait une longueur d’avance sur d’autres Européens en ayant déjà vécu en Amérique du Nord. Il a eu un impact après une période d’adaptation et il a bien progressé durant l’année. Dans l’ensemble, il a été assez constant pour un jeune qui commençait dans la LHJMQ », a vanté un recruteur d’expérience consulté par le RDS.ca.

Le classement confié à Yan étonne quelques observateurs de la scène du hockey dont un entraîneur de la LHJMQ.

« Il a les habiletés et le patin, c’est déjà bien et c’est un bon joueur de hockey, c’est clair. Il s’est aussi bien débrouillé dans le tournoi U18 pour les États-Unis », a mentionné ce pilote qui voyait plutôt Yan autour du 100e échelon.

En raison de la panoplie d’athlètes intéressants à la disposition des équipes dans la cuvée 2015, Yan tombe dans le groupe des joueurs qui obtiennent peu de publicité. Ce n’est rien d’étonnant aux yeux du gaucher de six pieds un pouce et 184 livres qui essaie de renverser la tendance.

« C’est certain que je ne suis pas la plus grande vedette, mais je travaille très fort pour en devenir une. Les gens me connaissent un peu plus maintenant », a évoqué Yan, dédié à son objectif, qui a rencontré 21 équipes à Buffalo incluant le Canadien.

Prouver qu’il n’est pas « frileux »

En épiant des centaines de joueurs années après année, les recruteurs utilisent des qualificatifs pour décrire les nombreux types d’athlètes qui défilent devant leurs yeux. Parmi les étiquettes à éviter, les joueurs redoutent celle de « frileux » et Yan devra se démener pour la repousser de son chandail.

« Il a plein, mais plein de talent, mais c’est l’aspect physique de son jeu qui me fait peur. Il fait beaucoup de gestes me rappelant Mike Hoffman (qui évolue maintenant avec les Sénateurs). C’est-à-dire qu’il avait certaines craintes à encaisser des mises en échec et se mettre le nez dans le trafic », a critiqué Denis Fugère, dépisteur des Kings de Los Angeles.

Le même son de cloche a été entendu par la part d’un entraîneur de la LHJMQ questionné par le RDS.ca.

« Il est habile, mais le défi avec lui c’est de démontrer qu’il peut jouer dans les matchs plus physiques et plus corsés. Je n’ai pas encore vu ça de sa part et c’est ce qu’on entend à son sujet », a-t-il dévoilé.

Par contre, des opinions divergentes ont également été recueillies ce qui saura certainement l’aider auprès de quelques formations de la LNH.

« Sa force principale n’est pas sur le long des bandes, mais ça ne veut pas dire qu’il est craintif. Son style le force moins à aller dans ces situations et je n’irais pas jusqu’à dire qu’il est craintif. Parfois, c’est flagrant pour certains joueurs, mais pas dans son cas. Ce n’est pas un point négatif jusqu’à le reculer ou d’entretenir des points d’interrogation à son sujet », a répliqué un autre dépisteur sous le couvert de l’anonymat.

« Il ne faut jamais perdre de vue que ce sont des joueurs de 17 ans qui ne sont pas arrivés à maturité. Avec 15 ou 20 livres de plus, il pourrait être plus efficace », a-t-il poursuivi.

Témoin privilégié, l’entraîneur des Cataractes a admis qu’une progression avait été réussie sur cette facette.

« C’est quelque chose qu’on a beaucoup moins vu dans les séries. C’est une question d’adaptation et d’apprentissage. Je pense qu’il a effacé beaucoup de doutes auprès de plusieurs recruteurs qui pouvaient avoir cette opinion. En saison, il a aussi marqué des gros buts dans les moments cruciaux quand la soupe était chaude », a relevé Bernard visant plutôt la constance comme principal point à peaufiner.

Yan a eu vent de cette perception et il croit avoir démontré qu’elle était fausse.

« Peut-être qu’ils pensent ça, mais je suis plutôt fort et je l’ai prouvé. Je suis prêt à utiliser mon physique même si je ne suis pas du style à démolir un adversaire. Je joue physique quand j’en ai l’occasion », a commenté Yan qui était heureux d’avoir fait mentir quelques dénigreurs pendant les séries.

Dans sa réponse, l’auteur de sept buts en sept matchs éliminatoires faisant référence à ses résultats aux évaluations physiques de la LNH à Buffalo. Yan a utilisé ce rendez-vous pour faire écarquiller plusieurs yeux terminant au tout premier rang pour les difficiles pull-ups avec 14 répétitions en plus de deux autres top-10.

« Je me suis entraîné très fort en prévision de ces tests, je savais à quoi m’attendre. Je voulais bien faire pour montrer mes forces aux équipes », a convenu Yan.

Se disant Russe et Américain, l’ailier des Cataractes essaie de se familiariser avec le français. Pour l’instant, ses coéquipiers lui ont surtout appris quelques « mots doux » québécois, mais il veut pousser ses démarches plus loin.

Quant à son style, il admet que le côté russe de sa personnalité ressort davantage. Au jeu des comparaisons, il évoque parfois des similitudes avec Evgeni Malkin, mais il préfère maintenant les parallèles avec Matt Duchene.

Son entraîneur Martin Bernard trouve plus facile d’établir un comparable avec un ancien de la LHJMQ.

« Si je cherche un joueur similaire que j’ai vu dans notre ligue au même âge, je dirais Jakub Voracek. Ils se ressemblent beaucoup pour leur impact sur leur équipe à 17 ans et on souhaite, bien sûr, que sa progression se poursuive à l’image de celle de Jakub », a lancé Bernard avec prudence puisque Voracek a terminé au cinquième rang des pointeurs de la LNH en 2014-15.

Tant qu’à rêver, Yan termine la conversation en parlant de Pavel Datsyuk, le joueur avec lequel il souhaiterait le plus jouer un match.

« Je l’ai déjà rencontré quelques fois via mon agent, c’est une bonne personne et il est si bon. C’est un magicien », a conclu Yan qui pourra se situer quelque part entre tous ces joueurs à condition de ne pas bâcler la finition de son arsenal.