WASHINGTON - Même s’il n’accorde pas d’entrevues les jours de match, Marc-André Fleury a lâché ce petit bout de phrase lors d’une conversation à bâton rompu qu’il a eue avec mon collègue Jonathan Bernier et moi pendant qu’il se libérait de ses jambières et de son équipement à son retour dans le vestiaire des visiteurs au Verizon Center ce matin.

Il faut dire que les choses ont diamétralement changé dans la vie professionnelle du gardien québécois.

Il y a presque un an - ça fera un an vendredi (28 avril) en fait - les Penguins et les Capitals se croisaient dans le cadre du premier match du duel de deuxième ronde duquel les Penguins allaient sortir gagnants en six matchs.

Mais voilà. L’an dernier, c’est Matt Murray qui se préparait à croiser Alexander Ovechkin et les Capitals. Le gardien recrue avait convaincu l’état-major des Penguins qu’il méritait de demeurer devant la cage en raison des performances sensationnelles qu’il multipliait depuis son entrée en scène en relève à Fleury en première ronde des séries contre les Rangers de New York.

Murray a ensuite joué un rôle de premier plan dans l’élimination des Capitals, du Lightning de Tampa Bay et finalement des Sharks de San Jose en grande finale de la coupe Stanley.

Ce soir, c’est Marc-André Fleury qui croisera Ovechkin et les Capitals. C’est le gardien de Sorel qui tentera d’éliminer les Caps après avoir éliminé les Blue Jackets de Columbus en première ronde. Et à moins d’un revirement complet de situation, c’est Fleury qui protégera la cage des Penguins dans leur quête de soulever la coupe Stanley pour une deuxième année consécutive. Pour une cinquième fois depuis leur entrée dans la LNH.

Sans surprise aucune, Marc-André Fleury affichait donc ce matin le large sourire qui l’a toujours caractérisé depuis que les Penguins en ont fait la toute première sélection du repêchage en 2003.

Un sourire qui s’était éteint l’an dernier en séries lorsque non seulement le vétéran avait dû céder sa place contre son gré, mais que soudainement son avenir à Pittsburgh était remis en question.

« Je suis comme n’importe quel autre joueur de hockey. Je veux jouer. C’est comme ça », que « Flower » a ajouté avant de retraiter vers la douche pour être certain de ne pas rater le premier autobus en direction de l’hôtel.

Avec le défi qui l’attend face aux Capitals, Fleury doit maximiser sa préparation, son repos, sa concentration. C’est normal. Il n’a donc pas voulu préciser sur la façon dont il s’y est pris pour composer avec l’affront encaissé le printemps dernier, le fait qu’il a dû partager le filet toute l’année avec un coéquipier qui est aussi un rival et surtout sur les moyens qu’il a pris pour maintenir sa concentration et sa confiance en ses moyens. Une confiance sans laquelle un gardien est aussi démuni que s’il se présentait sur la glace sans jambières, sans mitaine, sans bouclier, sans bâton.

Sullivan louange Fleury

Si le gardien québécois est demeuré coi, son entraîneur-chef Mike Sullivan l’a couvert de louanges lorsque je lui ai demandé s’il voulait partager avec les journalistes ses secrets pour avoir su maintenir la confiance de Fleury à son endroit. Une confiance qui rapporte gros à l’entraîneur-chef des Penguins et à son équipe alors que Fleury a pris la relève avec enthousiasme à la suite d’une blessure subie par Murray à l’aube du premier match de la série contre Columbus.

« Je n’ai pas de secret à vous révéler parce que tout le crédit revient à Marc-André », a d’abord lancé Sullivan.

« La seule chose que j’ai faite autant à l’endroit de Marc-André qu’à l’endroit de Matt est que je suis demeuré honnête et direct dans la gestion du filet. Nous sommes peut-être la seule équipe de la LNH qui compte vraiment sur deux gardiens numéro un. On a fait confiance aux deux tout au long de la saison. On a partagé le travail le plus également possible, le plus intelligemment possible », a ajouté le coach des Penguins.

« Si ce système d’alternance a bien fonctionné, c’est grâce au professionnalisme de Marc-André et de Matt. C’est grâce à leurs grandes qualités en tant qu’hommes. Marc-André est un gardien d’expérience. Il a gagné la coupe Stanley. Il fait partie de l’élite de la LNH. Mais il a toujours fait passer le bien de l’équipe avant son bien personnel. Il a accepté une situation qui n’était pas facile à accepter sans jamais nuire au reste de l’équipe. Sans des individus de la qualité de Marc-André et de Matt, notre système n’aurait jamais pu fonctionner. Je vous le répète. Tout le crédit revient à Marc-André », a martelé Sullivan.

Une défensive qui excelle dans l’ombre

En six matchs contre les Blue Jackets de Columbus, Marc André Fleury a maintenu une moyenne de 2,36 buts alloués par rencontre et une efficacité de 92,5 %. Sensationnel par moment, il a connu quelques moments difficiles également. Des moments au cours desquels ses coéquipiers lui sont venus en aide en marquant des buts importants.

Menés par la recrue Jake Guentzel (cinq buts) et Bryan Rust (4 buts), les Penguins ont marqué 21 buts en 5 rencontres aux dépens de Sergei Bobrovsky et des Jackets.

Bien qu’il compte sur une production soutenue de son attaque, Mike Sullivan soutient que son groupe de défenseurs, amputé qu’il est de Kristopher Letang, contribue largement au succès de son club.

« Notre défensive est dans l’ombre de notre attaque, mais elle est certainement le héros obscur de notre formation encore cette année. On a passé la moitié de la saison sans Letang. D’autres défenseurs ont été blessés sérieusement, mais ces gars-là mettent la barre tellement haute en matière de ce qu’ils doivent accomplir personnellement et en équipe que les résultats sont excellents », a indiqué Sullivan.

Les Penguins jouent vraiment en comité à la ligne bleue comme en témoigne le fait que seulement 92 secondes séparent le défenseur le plus utilisé en moyenne Justin Schultz (21:16) de Brian Dumoulin et Ron Hainsey qui sont les moins utilisés avec un temps moyen de 19:44 par match.

« Personne ne peut remplacer individuellement un gars aussi fort que Kris - Kristopher Letang - on doit donc tous mettre l’épaule à la roue pour bien défendre notre territoire tout en appuyant notre attaque qui demeure un grand atout », a indiqué le vétéran Trevor Daley.

« C'est la meilleure équipe, ce sera un gros test »

Acquis par les Penguins en cours de saison 2015-2016, Daley sait que lui et ses coéquipiers auront les mains pleines face à Alexander Ovechkin et l’attaque des Capitals. Particulièrement l’attaque massive.

« Il est clair qu’on devra avoir Ovechkin à l’œil en raison de la qualité de son tir. C’est évident. Mais quand tu regardes les quatre autres joueurs qui évoluent avec, tu ne peux te permettre d’en négliger un seul, car ils peuvent tous tirer profit de l’espace et du temps qu’on leur accordera », a conclu Daley.

Des 18 buts marqués aux dépens des Leafs en première ronde, les Capitals en ont enfilé 5 en 17 avantages numériques (29,4 %). Deux sont venus de la lame du bâton d’Ovechkin.

Les Penguins n’ont toutefois pas à rougir de leur puissance à cinq contre quatre comme en témoignent leurs 5 buts enfilés en 15 occasions (33,3 %).

Inversement, les Capitals (3 buts accordés en 18 occasions) et les Penguins (2 buts accordés en 12 occasions) affichent une efficacité identique de 83,3 % en désavantage numérique.

Autre défenseur qui devra s’imposer, Olli Maatta ne s’en fait pas outre mesure par le fait que son équipe croise, dès la deuxième ronde, un adversaire qu’elle aurait pu croiser en finale de la coupe Stanley tant les deux équipes sont puissantes.

« On a vécu le même genre de situation en première ronde alors que les Blue Jackets formaient une très bonne équipe de hockey. Pour te rendre à la coupe Stanley, tu dois battre de très bonnes équipes. Car tous les clubs qui accèdent aux séries sont très bons. L’important est donc de gagner, peu importe l’adversaire que tu croises et la ronde dans laquelle tu les affrontes. »

Mike Sullivan n’a pas dévoilé sa formation en vue du premier match de la série. Il semble clair que Chris Kunitz sera de la formation. Clair également que Carl Hagelin s’approche un peu plus d’un retour au jeu. Il a encaissé des mises en échec légères ce matin à l’entraînement et son cas est réévalué sur une base quotidienne. Il ne faudrait pas se surprendre s’il est en uniforme dès samedi.

« Je peux vous assurer que notre équipe est prête et qu’elle compétitionnera ce soir. On affronte un adversaire coriace. Un adversaire qu’on respecte. Tout ne sera pas parfait sur la patinoire, mais l’effort sera là. C’est certain », a conclu l’entraîneur-chef des Penguins.