À seulement sa deuxième saison à Pittsburgh, Phil Kessel n’est qu’à une seule victoire de mettre la main sur sa deuxième bague de la coupe Stanley, lui qui est loin d’être étranger aux succès des Penguins en séries. Depuis son arrivée dans la ville de l’acier, l’attaquant américain a amassé 18 buts et 27 passes, pour un grand total de 45 points, en 48 parties éliminatoires.

Kessel est assurément un talent d’exception, ayant notamment fait la pluie et le beau temps à Toronto pendant de nombreuses années. À Pittsburgh, la situation est totalement différente, la production offensive reposant essentiellement sur Sidney Crosby et Evgeni Malkin, alors que Phil Kessel n’est plus la principale arme de son club. Ce changement de rôle est d’ailleurs la clé de ses récents succès.

Tout club alignant Crosby, Malkin et Kessel sera forcément une menace offensive. Sans surprise, c’est le cas des Penguins qui sont l’équipe ayant inscrit le plus de buts par partie lors de la saison régulière, soit 3,39. Lors de la présente dance printanière, Pittsburgh vient encore une fois au premier rang à ce chapitre. Ce qui fait en sorte que l’attaque des Penguins soit si difficile à contrer est que chacun de leurs trois premiers trios présente une bonne force de frappe, comptant sur un joueur d’exception.

Il en résulte que Malkin, Crosby et Kessel trônent respectivement au premier, deuxième et troisième rang de la colonne des pointeurs en séries éliminatoires. Comparons ainsi la contribution du numéro 81 à celles du 71 et du 87.

Tableau Phil Kessel

Comme Kessel n’est pas la plus grosse pointure des Penguins, les équipes adverses préfèrent généralement employer leurs meilleurs éléments contre Crosby et Malkin, question de limiter les dégâts. Cela permet à Kessel d’avoir plus de temps et d’espace pour faire parler son talent, alors qu’il se frotte souvent à des joueurs de moindre calibre. Non seulement Kessel a moins de pression que dans la Ville Reine alors que tous les projecteurs ne sont plus braqués sur lui, mais il sait tirer profit de cette situation pour exploiter au maximum ses deux principaux atouts : sa vitesse et son tir.

Kessel profite de tout l’espace qui lui est laissé pour transporter lui-même le disque d’une zone à l’autre, n’ayant jamais peur d’y aller d’une montée à l’emporte-pièce. Patineur extrêmement explosif, peu de hockeyeurs savent soutenir le rythme que le numéro 81 impose lorsqu’il décide de traverser la patinoire, action qu’il effectue à plusieurs reprises par match, ce qui lui permet de prendre la défensive à contre-pied.

Même s’il est un ailier, Kessel est autant impliqué dans le jeu de transition de son équipe que le sont Crosby et Malkin, chiffres qui sont pourtant généralement à l’avantage des joueurs de centre. Plus précisément, cela s’explique par le fait que Kessel transporte fréquemment le disque hors de son propre territoire et orchestre régulièrement lui-même les entrées de zone, décochant alors souvent un tir.

Le lancer du poignet de Kessel est vif et précis, ce qui lui a permis d’atteindre le plateau des 30 buts lors d’une même campagne à cinq occasions depuis son arrivée dans le circuit Bettman. Quand Kessel tire, il finit inévitablement par causer des dégâts. D’ailleurs, l’ailier droit décoche depuis tous les angles, alors qu’il est l’attaquant des Penguins cadrant le plus régulièrement un tir proportionnellement à son temps d’utilisation à forces égales. C’est également à l’aide de ce procédé qu’il génère un grand nombre de chances de marquer pour son équipe, alors que ses lancers trompent la vigilance des cerbères adverses ou créent souvent des retours juteux pour ses coéquipiers.

Or, si Kessel devait assumer le rôle de principale arme offensive des Penguins, il n’aurait probablement pas le même succès, car l’opposition serait beaucoup plus forte à son égard. Même si Crosby et Malkin sont dans une classe à part, Kessel parvient à afficher des statistiques individuelles et avancées se rapprochant de ceux-ci sur le plan strictement offensif, ce qui s’explique grandement par le fait qu’il occupe la bonne chaise à Pittsburgh.

Aujourd’hui, Kessel n’a qu’à se préoccuper de sa récolte offensive. Il n’a pas réellement à assumer de responsabilités défensives, se révélant même le joueur des Pens ayant réalisé le moins de jeux défensifs proportionnellement à son temps de glace. Pourtant, cela ne nuit pas à son équipe puisque d’autres joueurs se chargent de ces missions. La recette de Pittsburgh est simple : Crosby et Malkin mènent la charge pendant que tous les autres connaissent leurs rôles et s’en acquittent. Kessel est le meilleur exemple en ce sens.

Est-ce qu’une équipe peut gagner avec Kessel comme tête d’affiche? Avec tout respect, je ne crois pas, quoique je ne remette pas en cause son talent. Dans la plupart des équipes, Kessel serait le point de mire de l’attaque. C’est justement la profondeur des Pens qui explique qu’ils ne soient qu’à un petit gain d’une deuxième bague de championnat en autant d’années, ce qui serait une première depuis 1997-98.

Qu’une équipe soit en voie de réaliser pareil fait d’armes sans que son défenseur numéro un, Kristopher Letang, n’ait disputé une seule partie au printemps est en soi tout aussi hallucinant que de voir Phil Kessel évoluer sur un troisième trio. C’est simplement dire à quel point l’alignement des Penguins est riche en talent