MONTRÉAL – Vingt-neuf victoires avant la pause du match des étoiles. Une moyenne de buts alloués de 1,96. Un taux d’efficacité de ,931. Trois blanchissages. Fidèle au poste pendant plus de 2200 minutes. Si ces chiffres étaient des lettres, ils permettraient d’épeler le mot « irremplaçable ».

On aurait donc pu croire que le ciel venait de s’abattre sur la tête des Predators de Nashville lorsque la mauvaise nouvelle est tombée : au cours du prochain mois, ils devront tenter de protéger leur place au sommet du classement de l’Association Ouest sans l’aide de leur meilleur joueur, le gardien de but Pekka Rinne.

Horreur! Malédiction! Apocalypse! Non?  

« Il n’y a pas grand monde de stressé présentement », affirmait, sur un ton contrastant avec l’opinion générale, l’attaquant Gabriel Bourque lorsque rejoint par RDS dans les heures suivant l’annonce du diagnostic, jeudi.

« C’est une grosse perte, tout le monde sait qu’il est l’un des meilleurs gardiens dans la Ligue nationale, réalisait du même souffle le Québécois. Mais on a une bonne équipe et on a confiance en Carter. Il va faire la job, on le sait. »

L’attitude de Bourque est honorable, mais on peut se demander combien de jours s’écouleront avant que cette belle sérénité laisse place à un début de panique. Le Carter dont il fait mention, c’est Carter Hutton, un auxiliaire de 29 ans avec 47 matchs d’expérience dans la LNH.

Hutton a bien fait la saison dernière lorsque Rinne a dû s’arrêter pour soigner une blessure à une hanche, compilant une fiche de 20-11-4. Mais cette année, ça ne fonctionne pas. Les Predators n’ont subi que 13 défaites en 42 matchs. Hutton était devant le filet pour cinq d’entre elles. Ce sont les seuls départs qu’il a obtenus cette saison.

Disons que c’est un plan B qui invite au scepticisme.

« Il s’est quand même vu confier des missions difficiles, défend toutefois Bourque. Il a affronté Chicago une fois, et Anaheim alors qu’on disputait un deuxième match en autant de soirs. C’est sûr que ce n’est pas le même gardien que Rinne, mais il a prouvé qu’il avait sa place l’année passée. Je suis sûr qu’il va être confiant et qu’il fera le travail. »

De toute façon, l’édition 2014-2015 des Predators, c’est plus que l’histoire d’un bon gardien. S’ils ont déjà 62 points en banque à la mi-saison, c’est bien sûr en grande partie parce qu’ils n’ont concédé que 91 buts, un exemple d’avarice dans la LNH. Mais c’est aussi parce qu’ils possèdent l’une des huit attaques à maintenir une production d’au moins trois buts par match depuis le début de la saison.

C’est une amélioration notable pour une équipe qui n’a pas exactement la réputation d’être une puissance offensive. Il y a deux ans, l’attaque des Predators s’était classée au 29e rang du circuit Bettman. L’an dernier, elle s’est hissée sans fanfare au 18e rang.

Bourque attribue l’avènement de cette double menace à l’arrivée en poste de Peter Laviolette, qui a remplacé Barry Trotz derrière le banc de l’équipe au cours de la saison morte.

« Ce n’est plus le même état d’esprit quand on arrive à l’aréna. On pense plus offensif. Trotz était plus axé sur la défensive, il ne voulait rien donner. Laviolette est plus créatif. En zone défensive, il nous demande d’être très structurés, mais en zone offensive, on peut faire pas mal ce qu’on veut et créer nos chances. »

Un nouveau rôle

Bourque, un choix de cinquième ronde des Predators en 2009, dispute déjà, sans faire trop de bruit, sa quatrième saison dans la LNH. L’an dernier, il avait évité pour la première fois de sa carrière la navette qui l’avait fait descendre dans la Ligue américaine à ses deuxième et troisième campagnes chez les professionnels et avait disputé un total de 74 parties pour Nashville.

Mais l’arrivée d’un nouvel entraîneur combinée à tous les chambardements apportés à la formation au cours de l’été ont, croit-il, ralenti sa progression dans la hiérarchie de l’équipe. Laviolette l’a laissé de côté pour 13 matchs en début de saison.

« Quand je suis arrivé au camp et que j’ai vu notre lineup, avec tous les nouveaux vétérans qui arrivaient, j’ai compris qu’il n’y aurait pas beaucoup de place sur les deux premières lignes. Je savais que mon rôle allait changer et que j’allais devoir gagner la confiance du coach », a-t-il admis.

Bourque a douté. Il a aussi commencé à sentir la pression rattachée à sa situation contractuelle – son contrat de deux ans viendra à échéance le 1er juillet. Mais il a fini par accepter son sort, a gagné sa place parmi les douze attaquants de confiance de l’entraîneur et affirme avoir retrouvé le sourire.

« On est une quinzaine de gars avec un contrat à un volet et tout le monde veut jouer. Pour moi, ça a été plus difficile, mais présentement je joue sur le quatrième trio, j’ai comme mission de neutraliser les gros joueurs adverses. C’est un beau défi et je le relève bien. Je dirais que les six derniers matchs, ça a vraiment bien été. »

Bourque, qui a deux buts et quatre aides à sa fiche en 29 matchs, évolue la plupart du temps avec Paul Gaustad et Taylor Beck. Plus récemment, ce dernier a été remplacé par Viktor Stalberg.

« Les points ne sont pas là, mais on fait du bon travail défensivement, en désavantage numérique. Ça va très bien et l’équipe gagne. Je ne peux pas demander mieux », conclut l’ancien du Drakkar de Baie-Comeau.

Bourque et les Predators seront en visite au Centre Bell mardi prochain pour le dernier match des deux équipes avant la pause du match des étoiles.