AVANT-MATCH NO 2 BLUES C. BRUINS

 

BOSTON - Dans une LNH prise d’assaut par des joueurs de plus en plus jeunes, de plus en plus petits, mais surtout de plus en plus rapides, Zdeno Chara et David Backes semblent d’une autre époque.

 

De fait, ils le sont.

 

Ils sont de l’époque où la carrure et la capacité de gagner des batailles le long des bandes et devant les filets occupaient une place bien plus importante sur les grilles d’évaluation que le coup de patin et le talent en général.

 

Malgré le fait qu’ils soient plus vieux que leurs coéquipiers et adversaires, plus lents que leurs coéquipiers et adversaires et qu’ils soient moins fringants qu’ils l’ont déjà été, Chara et Backes ont encore leur place chez les Bruins. Et ils ne se contentent pas de simplement remplir leur uniforme et de ne faire qu’acte de présence sur le banc, sur la glace, au vestiaire. Que non! Ils s’assurent aussi et surtout de remplir avec succès et même distinction les rôles que Bruce Cassidy leur confie.

 

Déjouer le poids des années

 

Comment y arrivent-ils? Comment arrivent-ils à déjouer le poids des années et à demeurer des rouages importants des Bruins? Comme Jumbo Joe Thornton l’était encore à sa façon avec les Sharks cette année. Comme Patrick Marleau le sera encore l’an prochain avec les Maple Leafs à Toronto.

 

S’abreuver à la fontaine de Jouvence aiderait sans doute un peu. Mais il faut plus. Beaucoup plus comme l’a souligné l’entraîneur-chef des Bruins.

 

« C’est d’abord et avant tout une question de volonté personnelle », lance Bruce Cassidy qui admet être impressionné par tout ce que Zdeno Chara peut encore accomplir à 42 ans sur les patinoires de la LNH soir après soir.

 

« Zdeno a pris l’engagement de rester jeune et il prend les moyens pour y arriver. Que ce soit par le biais de l’entraînement exigent auquel il s’astreint ou par les régimes alimentaires qu’il respecte, tout est axé sur sa quête de demeurer jeune et en forme », a ajouté l’entraîneur-chef des Bruins.

 

« Je côtoie Zdeno depuis plusieurs années déjà. Et je n’ai jamais vraiment remarqué s’il a ralenti sur la patinoire. C’est un peu comme tes enfants. Parce que tu les vois tous les jours, tu ne réalises pas vraiment à quel point ils grandissent. Zdeno a donc peut-être ralenti, mais il est poussé par une motivation exceptionnelle. Il veut être le meilleur et prend les moyens pour y arriver. Une fois la saison terminée, il est de retour sur la patinoire après une semaine de congé seulement. Il ne s’entraîne pas seulement à être plus rapide sur patin, mais à être plus léger sur ses lames à être plus mobile. Zdeno devance les échéanciers. C’est ce qui l’aide beaucoup », a ajouté Patrice Bergeron.

 

Mieux comprendre pour mieux anticiper

 

La forme physique, la motivation, l’alimentation, tout ça est bien beau. Mais ça n’explique pas tout. Et Chara a été le premier à le reconnaître en admettant candidement qu’il doit aujourd’hui observer bien davantage comment le hockey se joue autour de lui afin d’être en mesure de réagir. De s’ajuster.

 

« J’accorde aujourd’hui beaucoup d’attentions aux habiletés des adversaires. À leur vitesse. À leur façon de jouer, aux systèmes utilisés par leur équipe. C’est rendu nécessaire, car si tu ne te prépares pas en accordant de l’attention à tous ces détails, tu seras toujours en retard une fois sur la patinoire, parce que ça saute aux yeux à quel point le hockey est aujourd’hui beaucoup plus rapide qu’il ne l’était lorsque j’ai commencé. »

 

Et ça fait longtemps que Chara a commencé alors qu’il a disputé son premier match dans la LNH en novembre 1997 dans l’uniforme des Islanders qui avaient repêché le géant défenseur slovaque en troisième ronde un an plus tôt.

 

Zdeno Chara complète sa 21e saison dans la LNH. Sa 13e avec les Bruins de Boston. Aux 1485 matchs de saison régulière qu’il a disputés, il ajoutera mercredi une 177e rencontre en séries éliminatoires.

 

Maximiser ses atouts

 

David Backes sourit lorsque je tourne autour du pot et en lui présentant le fait que les jeunes sont aujourd’hui plus rapides que lui au lieu de carrément souligner qu’il a ralenti.

 

« Tu peux le dire, je suis moins rapide que je l’ai déjà été. Et c’est vrai que certains soirs, ça va trop vite autour », réplique le vétéran qui vient d’avoir 35 ans et qui n’a jamais, même dans sa jeunesse, été reconnu pour son coup de patin explosif.

 

Forum du 5 à 7 : retour sur le 1er match

De fait, Backes a été rayé de la formation à quelques reprises au cours de la saison. Il l’a même été lors des deux premiers matchs de la série qui opposait les Bruins aux Maple Leafs en première ronde. Une équipe trop rapide aux yeux de son coach.

 

« Annoncer à un joueur qu’il est rayé de la formation ou qu’il est cédé au club-école est la pire chose que je puisse faire comme entraîneur-chef. Mais c’est parfois nécessaire. Et lorsque je l’ai fait cette saison avec David et que je l’ai fait en séries, je me suis assuré qu’il comprenne pourquoi je prenais cette décision et surtout qu’il comprenne que ce n’était pas définitif. Comme coach, tu dois garder la confiance de ton joueur. Il n’a pas à être d’accord avec toi, et je peux t’assurer que David ne l’était pas du tout. Mais tu dois préparer le terrain pour qu’il soit prêt lorsque tu feras appel à lui. Et depuis que je l’ai réintégré, David nous donne d’ailleurs du très gros hockey », expliquait hier David Cassidy.

 

Patrice Bergeron connaît David Backes depuis trois ans seulement. Il est donc moins près de lui que de son capitaine. Mais Bergeron a vite compris ce qui animait celui qui s’est joint aux Bruins en 2016 à titre de joueur autonome.

 

« David se donne corps et âme à tout ce qu’il fait. Et ne négligez surtout pas son leadership », a lancé le Québécois qui profite de deux excellentes sources d’inspiration puisqu’il frappera lui-même, dans deux ans, à la porte des joueurs de 35 ans et plus dans la LNH.

 

Bien que la vitesse puisse être aujourd’hui un handicap pour lui et les autres joueurs de sa tranche d’âge ou de sa nature, David Backes assure que le hockey des séries l’aide à composer avec cette réalité.

 

« La vitesse folle c’est en saison régulière qu’on la retrouve. Le jeu est moins physique. C’est moins intense sur la patinoire. Les gars de talent en profitent. Mais en séries, on se bat pour conquérir cinq pieds de glace, après cinq pieds de glace. Ça aide un gars comme moi à puiser dans mes qualités premières alors que la vitesse pure n’est plus la principale arme utilisée sur la patinoire », explique Backes.

 

« Des gars comme Joe, comme Z et comme moi, doivent maximiser nos atouts. Joe n’a jamais été rapide sur la patinoire. Mais il est grand, il a une vision phénoménale, il protège la rondelle mieux que n’importe qui et complète des passes comme personne. En défensive, il est peut-être moins rapide, mais tu dois faire la moitié du tour de la terre pour le contourner. Ça l’aide grandement. Tout comme Zdeno qui en plus est toujours une force de la nature. Ces gars-là ont développé des moyens pour composer avec leur âge et la vitesse du jeu d’aujourd’hui », explique Backes.

 

Quand je lui demande quel était son secret pour non seulement garder sa place au sein de la formation, mais aussi pour contribuer aux succès de son équipe, le gros ailier droit qui revendique deux buts et cinq points en 11 matchs éliminatoires s’offre une seconde de réflexion avant de lancer en guise de conclusion : « Je tente encore de le trouver ».