Québec devra encore patienter avant de célébrer le retour des Nordiques dans la Ligue nationale de hockey. Sans surprise aucune, la Ligue nationale a ouvert ses portes à Las Vegas qui deviendra la 31e équipe de la LNH en 2017-2018, laissant Québec sur le perron.

La grande question maintenant est de savoir combien de temps Québec devra patienter. Et c’est là que ça se complique.

Si l’on se fie aux mots polis qu’ont défilés le commissaire Garry Bettman et Jeremy Jacobs, le propriétaire des Bruins de Boston qui est aussi le président du comité exécutif de la LNH, il est permis d’être optimistes. Car après avoir confirmé l’entrée de Vegas, Bettman et Jacobs ont répété que la candidature de Québec n’avait pas été rejetée, mais qu’elle était simplement remise à plus tard.

Une conclusion sur laquelle Pierre Dion, président et chef de la direction de Québecor, s’est appuyé pour lancer un appel à la solidarité aux fans de hockey de la capitale. «Nous savons que vous êtes déçus. Que les Nordiques sont votre équipe. Mais ce n’est pas la fin. Le projet est trop important pour baisser les bras maintenant. Nous avons besoin de vous», que le grand patron de Québecor a lancé, en français, de Las Vegas, aux amateurs qui venaient d’entendre la confirmation que leur ville et leur équipe n’étaient pas les bienvenues dans la LNH.

Pierre Dion a très bien joué ses cartes en convenant que même s’il avait perdu une bataille qu’il avait l’intention de demeurer au front et de se battre afin d’ultimement gagner la guerre. «Nous garderons des liens étroits avec la LNH. Nous nous assurerons que Québec soit toujours présente dans les discussions afin que nous puissions obtenir notre équipe. Nous irons jusqu’au bout.»

Entre colère et déception

Cet appel n’a toutefois pu contenir les réactions hostiles des fans outrés de Québec. Les annonces effectuées par Bettman et ses commentaires qui ont suivi ont d’ailleurs soulevé une tempête d’injures à Québec. Une tempête qui a ensuite déferlé sur Las Vegas par le biais des médias sociaux. Si la majorité silencieuse s’est rangée derrière un optimisme à saveur de prix de consolation, les plus enragés n’ont pas manqué de vociférer leur dégoût à l’endroit de Bettman et de sa ligue. Ils n’ont pas bu une gorgée des belles paroles lancées pour atténuer ne serait-ce qu’un peu leur déception vite transformée en colère.

Et c’est un brin normal.

Car au-delà des beaux mots sur Québec, au-delà des commentaires élogieux sur le Centre Vidéotron, sur la passion indéfectible des amateurs de hockey de la capitale, sur le marché qui est un peu petit, mais pas trop, sur l’appui corporatif qui est un peu mince, mais pas trop, sur le dollar canadien qui est faible bien qu’il soit au même niveau qu’il était lorsque Québecor a déposé la candidature de Québec il y a pratiquement un an jour pour jour, la Ligue nationale de hockey ne peut rien dire de plus. Elle ne veut surtout pas faire quelque promesse que ce soit. Elle ne peut même pas donner une idée de la durée de la prolongation qui s’amorce. Encore moins offrir une garantie que la remise à plus tard aboutira vraiment un jour à un retour des Bleus dans la LNH.

«Québec est sur notre radar et si un jour les circonstances sont différentes peut-être que notre conclusion sera différente» a lancé Gary Bettman.

Beaucoup de déception dans la Vieille Capitale

Rien pour endiguer la colère des partisans déçus ou pour mousser l’enthousiasme de ceux qui sont prêts à être encore patients. Surtout que si le déséquilibre (16-14) entre les associations Est et Ouest est loin d’avoir aidé la cause de Québec par rapport à Las Vegas, le fait qu’il manque encore un club dans l’ouest pour atteindre l’équilibre n’aidera pas plus à l’avenir comme n’ont pas manqué de le souligner les plus sceptiques et/ou désabusés.

«Nous savons qu’il est difficile de perdre une équipe. Mais nous n’avions rien à voir dans le départ des Nordiques il y a 20 ans. Nous espérons que les partisans resteront fidèles au hockey», a répondu Bettman à un collègue de Toronto qui lui demandait s’il ne craignait pas que la LNH soit boudée à Québec et au Canada alors que des marchés moins traditionnels obtiennent des clubs aux dépens de marchés comme celui de Québec.

Trois, quatre, cinq ans?

Quand on considère qu’il a fallu deux bonnes années avant que la Ligue passe des paroles aux actes dans sa quête d’expansion et que le processus a ensuite pris une année pour se rendre à terme, on peut croire qu’il faudra encore au moins trois ans avant qu’un 32e club ne s’ajoute par le biais d’une expansion.

J’ai demandé à Bill Daly si cette équation était raisonnable. Il n’a pas voulu répondre. «Je ne peux prédire l’avenir. Ce que l’on vous dit, c’est que le processus d’expansion amorcé l’an dernier prend fin aujourd’hui et nous n’avons pour l’instant aucune intention d’en ouvrir un autre. Mais bien des choses peuvent changer en quelques années», a répliqué le bras droit du commissaire Gary Bettman.

Et un déménagement?

Parce que les diseurs de bonne aventure qui attisent la passion des amateurs déçus se rabattront sur un éventuel déménagement pour trouver un locataire de la LNH au Centre Vidéotron, on peut déjà craindre les spéculations selon lesquelles les Hurricanes, et qui encore, débarqueront à Québec.

Mais mercredi, Gary Bettman a rappelé que son groupe de propriétaires «est plus solide qu’il ne l’a jamais été.» Eh oui, cela inclut Peter Karmanos des Hurricanes de la Caroline malgré le fait que son club soit à vendre et que ses fils tentent d’aller récupérer une partie de leur héritage.

Les Hurricanes joueront à Raleigh l’an prochain. C’est certain. Il serait très surprenant qu’ils quittent la Caroline avant deux ou trois ans. Et ça, c’est s’ils quittent un jour la Caroline. Ce qui est très loin d’être acquis.

Une autre indication que la patience des partisans de Québec devra s’étirer bien davantage qu’ils ne le voudraient.

Après avoir répondu à toutes les questions des journalistes, après avoir félicité une fois encore Bill Foley qui a obtenu sa place dans la LNH et serré la main à Gary Bettman tout en échangeant leur numéro de cellulaire, Pierre Dion a quitté Las Vegas pour se rendre à Québec.

Un défi de taille l’attend dans la capitale. Deux en fait.

Le grand patron de Québecor devra reprendre le bâton du pèlerin pour attiser la confiance chamboulée des amateurs de hockey qui s’accrochaient encore à la possibilité d’obtenir l’accord de la Ligue nationale de hockey. Il devrait y arriver.

L’autre sera plus difficile. Car maintenant qu’il est acquis que le Centre Vidéotron sera beaucoup moins occupé que ses propriétaires et la ville de Québec ne l’espéraient avec les pertes financières qui en découlent déjà et en découleront encore, le chef de la direction devra aller défendre l’entente signée entre Pierre-Karl Péladeau et le maire Régis Labeaume.

La déception associée aux «meilleures chances la prochaine fois» lancée par la LNH mardi compliquera sans doute la tâche de messieurs Dion et Labeaume.

Mais en moussant l’espoir, Québecor et la ville attiseront aussi sans doute un brin la patience et la tolérance des contribuables à qui les deux camps n’ont jamais dit que la construction du Centre Vidéotron assurait le retour des Nordiques.

Doit-on encore croire aux chances des Nordiques de revenir à Québec?

Ma réponse à cette question est oui. Je l’ai déjà dit, je l’ai déjà écrit et je l’écris encore aujourd’hui. Malgré sa défaite encaissée officiellement aujourd’hui, Québecor a fait des progrès importants au cours de la dernière année dans sa quête de reconnaissance autour de la Ligue. Et ça, c’est important, voire crucial dans la quête d’obtenir une équipe.

Ça ne garantit pas le retour de la LNH à Québec. Je veux bien. Mais ça permet d’attiser l’espoir et la patience. Ça permet d’y croire encore. D’y croire vraiment! Mais il faudra sans doute attendre encore un minimum de trois ans.