TORONTO – Lorsque les Coyotes de l’Arizona ont décidé de verser près de 12 millions $ à Mike Ribeiro pour racheter les trois dernières années du contrat qui le liait au joueur de centre québécois, plusieurs ont cru que c’était fini. Que la carrière tumultueuse de Ribeiro était terminée.

Les commentaires acerbes du pourtant très posé directeur général Don Maloney qui ne s’est pas gêné pour attribuer aux ennuis personnels de Ribeiro la décision de couper les ponts avec lui ont attisé ces doutes quant aux chances de le revoir un jour sur une patinoire de la LNH.

« J’y ai pensé moi aussi. À un moment donné, je me suis demandé si j’allais continuer. Si je voulais continuer », a candidement reconnu Ribeiro croisé mardi midi au Centre Air Canada à Toronto.

Les Predators de Nashville lui ont offert une chance de continuer. Une autre chance. Peut-être une dernière, qui sait?

Mais cette chance, les Predators sont bien heureux de la lui avoir accordée puisque Ribeiro, qui l’a saisie au vol, pivote leur trio le plus productif.

Mardi à Toronto, les Predators ont infligé aux Maple Leafs leur plus cuisante dégelée à domicile depuis qu’ils évoluent au Centre Air Canada. Ribeiro a inscrit un but et ajouté une passe. Son jeune complice Filip Forsberg a connu une soirée de deux points (un but) lui aussi. Blanchi lors de ce match pourtant très festif pour les Predators, James Neal revendique neuf buts et 14 points.

Ironiquement, il est le maillon faible du meilleur trio des Preds derrière Forsberg (9 buts, 22 points) qui domine actuellement la course au titre de recrue de l’année dans la LNH et Ribeiro qui revendique cinq buts et 16 points en 18 matchs cette saison.

Cure de désintoxication

S’il maintient le rythme actuel, Ribeiro connaîtra une saison de 73 points. Tout un contraste avec sa saison misérable de 47 points avec les Coyotes l’an dernier. Sa pire saison depuis son arrivée définitive dans la LNH avec le Canadien en 2003-2004.

« Ça va bien sur la glace parce que ça va mieux dans ma tête », a convenu Ribeiro qui a eu sa part d’ennuis à l’extérieur de la patinoire au cours de sa carrière.

Savourant tous les plaisirs que la vie de star du sport professionnel lui permettait de s’offrir, Mike Ribeiro brûlait la chandelle par les deux bouts depuis son entrée dans la LNH. Ses détracteurs les plus virulents lui ont souvent reproché de mettre bien plus d’efforts et d’énergie une fois sortie de la patinoire que lorsqu’il y posait les patins. Ce qui n’était pas tout à fait faux...

Ajoutez à cette soif de plaisirs, le fait que Ribeiro a connu une relation, disons chaotique, avec son épouse avec qui il vient de renouer pour une quatrième fois après trois ruptures difficiles, et vous avez une meilleure idée du pourquoi ce joueur si talentueux, ce joueur aux mains magiques et à l’instinct offensif hors du commun n’a pas toujours été en mesure de trôner sur son sport.

« On a tous des démons. Mais disons que l’an dernier, alors que j’étais à nouveau loin de mon épouse et de mes enfants, les démons ont pris le dessus. J’avais perdu le goût de jouer. À la mi-saison, j’avais juste hâte que tout finisse afin que je puisse m’occuper de mes problèmes », racontait bien calmement Ribeiro après l’entraînement matinal de sa nouvelle équipe mardi.

Ribeiro a réclamé et obtenu l’aide de la LNH pour composer avec ses démons. Il s’est inscrit au programme mis de l’avant par la Ligue pour aider les joueurs à mettre en échec leurs problèmes de consommation et/ou de toxicomanie. Ribeiro assure qu’il n’était pas en perdition. Qu’il n’avait pas perdu le contrôle sur sa vie et sur sa carrière. Mais il était conscient qu’il avait des problèmes à régler. Et qu’il n’y arriverait pas en les affrontant en solitaire.

Le programme a donné des résultats probants. Non seulement Ribeiro a-t-il mis un frein à ses ennuis de consommation d’alcool et d’autres substances, mais les succès obtenus ont pavé la voie à un retour à la vie familiale. Une vie familiale plus importante que le hockey aux yeux du nouveau Mike Ribeiro.

« Je n’avais pas l’embarras du choix l’été dernier après que les Coyotes eurent racheté mon contrat. Mais je n’étais pas prêt à aller n’importe où. Je ne voulais pas me retrouver dans ville une comme New York. Je ne voulais pas non plus me retrouver dans une ville comme Edmonton où ma famille n’aurait pas été heureuse. L’offre de Nashville était parfaite. Les Predators forment une équipe intéressante composée d’un bon groupe de joueurs avec qui il fait bon jouer et gagner. Nashville est une ville tranquille et intéressante autant pour moi que pour ma famille. »

S’il a gagné les batailles qu’il a livrées à ses démons au cours des derniers mois, Mike Ribeiro sait très bien que la guerre n’est jamais complètement gagnée. Que les démons pourraient venir le frapper sournoisement par-derrière sans crier gare.

Afin de minimiser ces risques, le Québécois s’est volontairement inscrit à un suivi serré effectué par la LNH qui effectue des tests inopinés pour s’assurer qu’il carbure à l’eau claire.

« J’aurai bientôt 35 ans. Je commence à avoir des cheveux gris. Il est temps pour moi d’afficher plus de maturité, de réaliser où je suis rendu dans la vie et de comprendre qu’il est temps de passer à autre chose. Quand nous sommes à la maison, je reviens à la maison rapidement après les matchs. Sur la route, je reste maintenant à l’hôtel. Je me concentre sur le hockey et surtout sur ma famille. »

Si Ribeiro a parlé avec calme et aplomb de sa nouvelle situation heureuse et de la précédente qui l’était beaucoup moins, son entraîneur-chef Peter Laviolette est demeuré très discret.

Après avoir réuni Ribeiro et ses compagnons de trio au centre de la patinoire du Centre Air Canada après l’entraînement initial, Laviolette était élogieux dans ses réponses reliées aux questions associées au hockey. Lorsque je lui ai demandé s’il avait dû ajuster sa façon de faire avec Ribeiro pour s’assurer qu’il connaisse autant de succès à l’extérieur de la patinoire que sur la glace, le nouvel entraîneur-chef des Predators s'est limité à dire que ces communications étaient privées.

Après avoir visité les Maple Leafs mardi, les Predators font escale à Ottawa jeudi pour y croiser les Sénateurs. Ribeiro et sa nouvelle équipe croiseront le Canadien le 20 janvier prochain au Centre Bell. Le Tricolore fera escale dans la capitale de la musique country le 24 mars.