Opportunité est un mot clé pour la grande majorité des carrières de hockeyeurs de la LNH. Il y a toujours ceux qui sont nés pour jouer au hockey, les surdoués, qui passent aussi souvent qu’une éclipse lunaire. Pour les autres, soit 90 pour cent des joueurs de la LNH, ils doivent saisir une occasion qui s’offre à eux. Cette chance vient aux joueurs sous différentes formes. Que ce soit la blessure d’un coéquipier, un concours de circonstances, un dirigeant qui préfère un joueur en particulier ou que ce dernier ait mis tellement d’effort, en plus de démontrer une bonne attitude, qu’il force ainsi la main de l’organisation.

La situation à Las Vegas est un excellent exemple d’une opportunité qui s’est présentée, découlant d’une blessure et du choix d’un joueur parmi plusieurs effectué par une tête dirigeante qui a décelé quelque chose.

Les Golden Knights de Vegas ont commencé leur camp de sélection avec Marc-André Fleury comme partant et Calvin Pickard comme gardien auxiliaire. Une nouvelle aventure pour les deux joueurs, mais avec des motivations différentes. Pendant ce temps, Malcom Subban se bat pour le poste de numéro un avec les Bruins de Providence dans la LAH. Pour sa part, Oscar Dansk se retrouvait dans l’équipe-école des Golden Knights, les Wolves de Chicago, avec Maxime Lagacé. Les deux joueurs ont signé une entente en juillet dernier afin de faire partie de la banque de joueurs de la nouvelle filiale de la LNH.

Le 3 octobre dernier, les dirigeants surprennent avec l’ajout de Malcolm Subban, via le ballottage, pour ensuite se départir des services d’un très bon gardien en Calvin Pickard, trois jours plus tard. De son côté, Marc-André a subi une commotion cérébrale dans un match contre les Red Wings de Detroit, le 13 octobre dernier.

Le 15 octobre, Malcolm se réveille dans sa chambre d’hôtel à Las Vegas à titre de nouveau gardien numéro 1 d’une équipe de la Ligue nationale de hockey. Pour rendre le match prévu ce soir là encore plus spécial, Subban devait faire face à l’équipe qui l’a soumis au ballottage : les Bruins de Boston. Il repousse 21 des 22 tirs dirigés vers lui et remporte son premier match dans la LNH. Il plane sur un nuage et continue à offrir une brillante performance contre les Sabres de Buffalo et les Blues de Saint Louis. Par contre, il se blesse à son tour dans ce dernier match. Alors qu’une fenêtre s’ouvrait finalement pour montrer à tous qu’il était prêt et capable d’être un joueur d’impact pour une équipe, Subban se retrouve sur le carreau pour quatre semaines.

Voilà que cette fenêtre s'est tourné vers Oscar Dansk. Ce dernier a aidé les Golden Knights à continuer sur leur lancée incroyable du début de la saison avec une belle performance pour finir le match contre les Blues et avec une victoire contre les puissants Blackhawks de Chicago.

C’est à lui de démontrer qu’il peut être un gardien de la LNH. Une blessure, un concours de circonstances et le voilà sous les feux de la rampe. Voilà une belle occasion de s’implanter à Vegas ou ailleurs dans la ligue.

Dansk s'est malheureusement blessé à son tour dans le match de lundi contre les Islanders de New York. Pour l'instant, on ne connaît pas la gravité de la blessure.

Idem pour Mete à Montréal

Un autre exemple d’un joueur qui a saisi sa chance est le jeune Victor Mete à Montréal. Est-ce qu’il aurait vraiment eu la chance de jouer aux côtés de Shea Weber, si Andrei Markov avait accepté l’offre de Marc Bergevin et décidé de finir sa carrière à Montréal? Si Mete avait été utilisé à gauche de Zack Redmond ou Joe Morrow durant le camp, est-ce que les résultats auraient été les mêmes? Nous pouvons en douter. L’opportunité s’est présentée et il était prêt.

J’ai joué avec de nombreux joueurs qui avaient un talent fou, voués à une carrière dans la LNH, mais qui n’ont pu saisir leur chance et, en un rien de temps, ont été rapidement ignorés par la direction, leur préférant des joueurs plus jeunes et pleins d’espoir à leur tour.

Dans ce sens, il y a Calvin Pickard. Je pensais qu’il avait tout fait pour démontrer qu’il était un gardien de la LNH. Avec les performances au Championnat du monde et ce qu’il a accompli avec la pire équipe de la LNH la saison précédente, il devenait un bon choix pour l’expansion de Vegas. Il est passé rapidement de gardien dans la LNH à se battre pour un poste contre l’excellent Garrett Sparks avec les Marlies de Toronto. Personne ne sait comment Pickard va réagir ou s’il va avoir une autre vraie opportunité dans la LNH, mais c’est à lui d’être prêt et de faire confiance au destin.

Expérience personnelle

Lorsque j’ai été sélectionné au 182e rang de la cuvée 2003 par les Islanders de New York, je ne pense pas que le directeur général Mike Milbury et l’entraîneur Steve Sterling savaient qui était Bruno Gervais ou même comment prononcer mon nom. Personne ne pouvait savoir que j’allais devenir le joueur de leur repêchage ayant joué le plus de parties dans la LNH.

L’homme qui croyait en moi était Mario Saraceno, le vétéran recruteur des Islanders pour le Québec. Il mentionnait intensément mon nom à la table depuis le 4e tour et c’est finalement avec leur 6e choix qu’ils m’ont sélectionné.

C’est au camp des recrues que j’ai saisi ma chance. J’ai connu un bon tournoi et je suis tombé dans l’oeil de Mike Milbury, qui décida de m’inviter au grand camp. Je n’étais pas censé être du voyage. J’avais une chaise dans le milieu de la chambre avec mon nom sur un écriteau en carton. Ma valise contenait du linge pour sept jours et non six semaines comme ce fut le cas! Je n’avais rien à perdre et chaque journée de plus au camp était un bonus. Voilà qu’une porte était entre-ouverte et j’ai réussi à saisir l’occasion qui se présentait et à forcer l’entraîneur à confirmer ma place dans l’équipe, et ce, la veille de mon 19e anniversaire!

Il aurait été normal de me retourner à mon équipe junior après le camp des recrues et de revenir au camp l’année suivante comme un joueur parmi tant d’autres. Pourquoi suis-je le joueur qui est sorti du lot? Le travail acharné est sans doute la grande raison. J’ai eu une opportunité et j’ai tout donné. Je réalise que j’ai été chanceux aussi. Le même moi aurait pu tomber dans une organisation où je n’aurais pas eu cette chance et le scénario aurait été différent. Pourtant le joueur, le talent, la personne, les sacrifices auraient été les mêmes.

Le hockey est une passion et une excellente école de vie pour certains, mais il demeure un sport et une façon de s’amuser. Mes parents m’ont inscrit au hockey, car j’étais un garçon timide et qu’ils voulaient que je socialise. À 4 ans, ils m’ont inscrit dans la même municipalité que mon cousin pour que je puisse me dégêner plus rapidement. Au cours de toutes ces années au hockey mineur, mon père me demandait les deux mêmes questions après chaque pratique et chaque match : « As-tu tout donné ce que tu as? » et « As-tu eu du plaisir? ». Je n’avais pas besoin de lui répondre, car la réponse n’était pas pour lui, mais pour moi. En quittant l’aréna, nous ne parlions plus de hockey. De plus, à chaque début de saison, il me demandait à quel sport je voulais m’inscrire et que le choix que je faisais était mon choix, par plaisir, et non pour lui faire plaisir.

L’attitude et l’effort sont les seules choses que le joueur contrôle. Pour le reste, il faut faire confiance au destin. Le fait qu’il soit ou pas le joueur le plus utilisé, dans la meilleure équipe ou avec les meilleurs joueurs, qu’il soit sélectionné pour le match des Étoiles ou oublié n’ont rien à voir avec ses chances de connaître une belle carrière. Tout ce qu’un joueur peut faire est de tout donner ce qu’il a dans le ventre et de s’amuser pour que toutes ses années vécues au hockey mineur soient remplies de beaux souvenirs.

*Si vous avez des questions, n’hésitez pas à me les soumettre dans la section « commentaires ».