Pendant que 16 des 30 équipes du circuit Bettman se disputeront les grands honneurs au cours des deux prochains mois, ayant comme objectif suprême de remporter le gros trophée, 14 des autres formations en profitent pour procéder au bilan de leur saison, dont les Sénateurs d’Ottawa.

Les Sénateurs ont déjà pris les devants dimanche dernier en annonçant une première de plusieurs décisions à venir, en officialisant la passation des pouvoirs au poste de directeur général. Pierre Dorion prendra ainsi la relève de monsieur Bryan Murray, qui lui dorénavant occupera les fonctions de conseiller senior.

M. Murray a marqué cette organisation autant par de bonnes que de moins bonnes décisions à titre de gestionnaire. Par ailleurs, il a déjà fait son propre mea culpa sur certaines embauches du passé au poste d’entraîneur-chef de la formation. Or, à ce moment-là, il était convaincu que c’était la meilleure des décisions, lui qui a eu cinq différents entraîneurs sous son règne depuis 2007.

Sans grande surprise, voilà une transition qui se fera sous le signe de la continuité, là où le nouvel élu, Pierre Dorion, prendra tout de même le temps d’y mettre son empreinte et son grain de sel, le temps venu. Après avoir sensiblement occupé plusieurs postes par le passé au sein de cette organisation, il s’agit d’une promotion qui peut être interprétée par plusieurs comme un homme de hockey qui a payé son dû et qui méritait cette opportunité.

Avec l’arrivée de Dorion dans la chaise du conducteur, techniquement l’évaluation ne devrait pas trop traîner en longueur sur certaines des décisions qui seront à prendre pour l’avenir de cette franchise (Peu après la publication de cette chronique, les Sénateurs ont annoncé le congédiement de Dave Cameron et ses adjoints, NDLR). Il vient déjà de l’interne et comme le dirait le défunt Pat Burns : « les bananes ne risquent pas trop d’avoir le temps de mûrir ». Surtout concernant le personnel hockey qui est toujours en place pour le moment. Congédiement, vote de confiance, etc. Seul le principal concerné connaît la réponse.

C'est un bilan où l’on devra accorder davantage, sinon plus d’importance au non-dit des hauts dirigeants, où « manque de constance » et « blessures » représenteront la saveur du mois pour ceux qui prendront le droit de parole. Cette tribune ne servira pas nécessairement à y aller de propos lapidaires pour les gens de l’interne, éthique oblige.

Or, les expressions « leadership » et « surévaluation du personnel en place » ne feront techniquement pas partie de cet exercice de relation publique envers ceux qui sont en quête de réponses.

À l’interne, le diagnostic sera des plus pointus et sévères dans un contexte où la remise en question représente à sa façon la quête de la perfection. Un bilan peu reluisant et peu gratifiant, qui en fin de compte ne fera que valider et confirmer ce constat d’échec à plusieurs niveaux.

Profitant d’une remontée historique la saison dernière dans le dernier tiers du calendrier régulier, grâce, entre autres, à la magie d’un gardien méconnu à ce moment, Andrew Hammond, sortie de nulle part, qui avait su insuffler une dose de confiance des plus considérables et une croyance chez plusieurs, il faut dire que cette remontée n’aura tout simplement pas été garante de l’avenir, mais surtout éphémère.

Faisant partie du premier tiers des équipes de la LNH au niveau de la production offensive (236 buts marqués), le manque d’engagement et de rigueur sur une base régulière à bien performer comme équipe a prouvé que la défensive était loin d’être une priorité (29e LNH) surtout au niveau de certains jeunes et moins jeunes vétérans de la formation habitée par une pensée beaucoup plus basée individualiste que collective.

Des unités spéciales pas très spéciales!

Souvent considéré comme l’élément pouvant faire la grande différence entre la victoire et la défaite, il est tout de même difficile d’expliquer le piètre rendement des unités spéciales en cours de saison chez les Sens.

Erik KarlssonIl s’agissait d’un avantage numérique anémique avec un faible taux de réussite de 15,8 %, avec seulement 38 buts marqués en avantage d’un ou de deux hommes et le pire pourcentage de la Ligue nationale à domicile avec 11,4 % et seulement 15 buts marqués en 132 tentatives. Tout cela, avec le meilleur défenseur à caractère offensif du circuit et le meilleur pointeur de sa formation. Une situation des plus difficiles à expliquer.

Statu quo et trop de patience sur l’utilisation des joueurs sur la première vague, question de ne pas déplaire, entêtement à utiliser soir après soir les mêmes structures, entêtement de certains joueurs dans le choix des jeux télégraphiés, manque d’exécution et de concentration au niveau des détails, voilà tous des exemples qui tendent à justifier une des plus grandes faiblesses de la dernière saison.

Et que dire du travail en infériorité numérique, qui malgré l’exploit d’avoir marqué 17 buts à court d’un homme cette saison, dont sept de la part du Gatinois Jean-Gabriel Pageau (à égalité avec Daniel Alfredsson), a présenté la 29e pire fiche du circuit tout juste derrière les Flames de Calgary avec un faible pourcentage d’efficacité de 75,8 % et 61 buts alloués à l’adversaire en 252 occasions.

« Des chiffres et des lettres », comme le dirait mon bon ami Jean-Charles Lajoie qui ne mentent pas sur les éléments qui expliquent la non-participation aux présentes séries éliminatoires de l’édition actuelle.

Sur le plan individuel!

Sur le plan individuel, certains noms comme Stone, Pageau, Ceci, Zibanejad et Hoffman (malgré encore quelques défaillances de sa part dans certaines prises de décision avec la rondelle) ont réussi à démontrer à l’employeur que leur progression est au rendez-vous. Ils ont aussi prouvé qu’ils se rapprochent de plus en plus de l’étiquette de joueurs établis. Tout ça, si la progression demeure au rendez-vous, bien sûr, et surtout si ces joueurs conservent des rôles d’importance au sein de l’organigramme des Sénateurs.

Remise en question au niveau des hommes de hockey!

Une forte majorité de gens affectés à la couverture des Sénateurs s’attendent à des changements d’importance au 2e étage, surtout au niveau des hommes de hockey derrière le banc. Il faut dire que cela a un lien direct avec les différents commentaires sur la place publique du propriétaire Eugene Melnyk, il y a moins de deux semaines.

Dave CameronPour l’entraîneur, Dave Cameron, il serait injuste d’une certaine façon de l’accuser de tous les torts, lui qui avait la responsabilité de maximiser le potentiel des effectifs qu’il avait sous la main, mais de là la grande question : avait-il justement les effectifs nécessaires?

Formation qui en lever de rideau, en octobre dernier, était toujours à la recherche d’un attaquant top-6 et cela même avant la perte du vétéran Clarke MacArthur, et à la recherche d’une profondeur à la ligne bleue en raison de l’inexpérience à cette position. Il faut comprendre que plusieurs de ses jeunes défenseurs ont été placés dans des chaises et situations qui exigeaient davantage de millage au sein d’un circuit axé de plus en plus sur l’élément vitesse et les habilités offensives.

Dave Cameron, reconnu pour ses qualités de pédagogue et d’entraîneur qui prône la patience dans son style de gestion. Or, il s’agit également d’une patience qui à plusieurs occasions aura représenté le plus grand talon d’Achille de celui qui a pris la relève d’un Paul MacLean en décembre 2014, sur la recommandation du propriétaire Eugene Melnyk et cela pour un ensemble de facteurs.

Une approche dont certains auront grandement abusé au cours de ce long marathon de 82 parties. Les partisans ont peut-être été aveuglés par un début de saison plus que respectable (12-6-5) après deux mois d’activité.

Or, le côté tricheur ou non-conformiste de certains sur l’aspect offensif du jeu dans la gestion de la rondelle, entre autres, le non-souci du détail sur l’aspect défensif du jeu ou le non-souci de bien jouer comme équipe, qui font souvent foi de tout entre la victoire et la défaite, ont représenté les pires ennemis de la formation la capitale nationale.

Certains auront profité du profil d’entraîneur que représente Dave Cameron, pour qui la patience de plaire pour ne pas déplaire envers certains individus de premier niveau a été beaucoup plus nuisible que bénéfique. Aussi, la compétition à l’interne a été quasi inexistante, dans un milieu où l’obligation de résultat prime avant tout.

En maintenant le cap sur le développement et le repêchage au sein même de l’organisation, dans ce parcours parsemé de hauts et de bas, les Sens ont réalisé à quel point il est difficile de passer d’une équipe en phase de transition à une équipe aspirante aux grands honneurs.

En acceptant de faire grandir les jeunes joueurs de l’organisation dans des rôles un peu plus importants, avec davantage de responsabilités, il était tout à fait normal que le mot « constance » représente et représentera toujours le plus grand défi de la direction en place, là où l’essai-erreur malheureusement ne pardonne tout simplement pas.

Recherche d’identité et un leadership questionnable!

Entretemps, à la suite de l’arrivée de Pierre Dorion dans ses nouvelles fonctions, il sera intéressant de voir l’identité et le virage que prendront les prochaines éditions des Sénateurs. Une identité absente au cours de la dernière saison et un leadership questionnable et brouillonne chez les vétérans qui avaient le devoir de prendre la responsabilité de cette « guidance » envers les plus jeunes.

À suivre…