LOS ANGELES - Quarante-sept ans après la naissance des Kings, 26 ans après que Wayne Gretzky eut vraiment lancé le hockey à Los Angeles, sept ans après la conquête de la coupe Stanley par les Ducks et deux ans après celle des Kings, la LNH a prouvé à tous ceux qui en doutaient peut-être encore que le hockey a bel et bien sa place sous le soleil de la Californie.

Une place de choix si l’on se fie au succès retentissant de la partie en plein air disputée au Dodger Stadium devant 54 090 amateurs de hockey venus assister au duel opposant les Kings de Los Angeles à leurs voisins d’Anaheim.

Un duel que les Ducks ont remporté 3-0. Des buts de Corey Perry et Matt Beleskey enfilés en première moitié de première période ont donné le ton à la rencontre. Andrew Cogliano, dans un filet désert, a confirmé la victoire. Une deuxième consécutive des Ducks aux dépens des Kings qu’ils avaient battus 2-1 jeudi à Anaheim. Si le score laisse croire que les Ducks ont facilement vaincu leurs grands rivaux de Los Angeles, la réalité est bien différente.

Chassé de son filet lors de son dernier départ après qu’il eut accordé trois buts sur 11 tirs dans un revers de 3-2 encaissé aux mains des Jets de Winnipeg, Jonas Hiller s’est repris de belle façon. Le gardien des Ducks a réalisé 20 arrêts au cours du seul premier tiers. Il s’est aussi dressé devant Anze Kopitar sur un tir de pénalité.

Moins occupé au cours des 40 dernières minutes, Hiller a repoussé six tirs en période médiane et 10 autres au dernier tiers.

Sans surprise aucune, Hiller a récolté la première étoile de la rencontre. Une étoile qui lui était destinée dès le premier entracte.

Cette victoire, la 39e des Ducks après 54 rencontres, a permis à Anaheim de consolider sa première place au classement général avec une récolte de 83 points : sept de plus que les Blackhawks de Chicago qui sont deuxièmes.

Tapissés de chandails

Plus que le score final, c’est l’événement entourant le premier de quatre rendez-vous orchestrés par la LNH dans le cadre de la Série des stades qui a vraiment volé la vedette.

DucksLe match et les 54 090 amateurs de hockey venus encourager leurs favoris.

Vrai que le hockey est un sport du nord. Un sport d’hiver. Vrai aussi que le hockey à l’extérieur évoque bien plus des souvenirs d’oreilles, de nez, de doigts et d’orteils gelés que les images d’une patinoire ceinturée de palmiers.

Mais la partie opposant les Kings aux Ducks et plus spécifiquement l’engouement qui a marqué cet événement a confirmé que le hockey est florissant en Californie.

Dès 17 h 30, lorsque les premiers partisans ont franchi les guichets, des chandails aux couleurs des Kings et des Ducks se sont mis à défiler dans les gradins. Par milliers, par dizaines de milliers, les partisans des Kings portaient l’un ou l’autre des nombreux modèles de chandails confectionnés depuis leur arrivée à Los Angeles. Des chandails aux motifs et aux couleurs variées.

Moins nombreux, les fans des Ducks défendaient les couleurs de leurs favoris. Particulièrement le chandail orange que Saku Koivu et ses coéquipiers endossaient samedi.

Confiné à la galerie de presse auxiliaire, donc au milieu de la foule, j’ai pu réaliser au fil des trois périodes que les fans des Ducks et des Kings apprécient leurs favoris qu’ils encourageaient avec passion. À la lumière des jurons hurlés en direction de l’ennemi, il était clair qu’une rivalité émotive s’est aussi installée dans la cité des anges.

Pour le plus grand bien du hockey.

Conditions parfaites

Sur le coup de midi, samedi, le soleil qui ne devait pourtant pas être en mesure de percer les nuages a fait osciller le mercure près des 30 degrés.

La chaleur et la réflexion des rayons de soleil sur la toile isolante recouverte d’aluminium étendue sur la patinoire laissaient entrevoir le pire : une fonte prématurée de la glace qui aurait des conséquences néfastes sur la qualité de la patinoire. Et donc sur le match.

Tout le contraire est arrivé.

Une fois l’intérieur du Dodger Stadium à l’ombre, la température a plongé. Rien de comparable au froid qui fige le Québec depuis 10 jours. Rien pour empêcher les figurants embauchés par la LNH de jouer au volleyball de plage en shorts, camisoles et bikini, de parcourir les sentiers en planche à roulettes, en patins à roues alignées ou en vélo.

Mais la température a plongé sous les 20 degrés. Et une fois la toile protectrice retirée, il était clair que la patinoire était d’aussi bonne qualité que celles des Staples ou Honda Center.

À 19 h 18, lors de la mise en jeu initiale, la température nous rappelait une soirée de septembre. Une petite laine aurait été de mise.

Bon! Les hivers de Los Angeles n’ont rien à voir avec ceux de Montréal. Mais dans les gradins du Dodger Stadium samedi, la température était plus fraîche qu’au Centre Bell. Et cela n’avait rien à voir avec le niveau de frustration des amateurs du Canadien outrés d’une autre désolante sortie de leurs favoris.

C’est bien évident que des 54 090 amateurs de hockey présents au Dodger Stadium samedi, plus de la moitié, peut-être même les trois quarts, ne profitaient pas de points de vue comparables à ceux dont ils auraient profité au Centre Bell ou dans les 29 autres amphithéâtres de la LNH.

Puis après!

L’idée derrière la Série des stades, le plan depuis la toute première Classique héritage et la première Classique hivernale, est de réaliser un coup d’éclat pour attirer l’attention sur le hockey d’une façon positive.

Si j’avais des doutes sur le bien-fondé du match de samedi à Los Angeles, le coup d’envoi à la Série des stades les a tous effacés. Complètement. 

Le groupe Kiss au Dodger StadiumOui il y avait du clinquant. Oui la prestation du groupe Kiss n’avait rien à voir avec l’orgue de Diane Bibeau au Centre Bell. Oui c’était différent. À des milles de ce que le hockey est. Mais sur place, sur la ligne du troisième but du Dodger Stadium, je peux témoigner que cette partie « promotionnelle » associée au bon match de hockey que les joueurs des deux équipes se sont livré a permis à la LNH de frapper un grand chelem.

Et je ne suis pas le seul à avoir eu cette impression.

Les joueurs croisés dans les vestiaires le confirmaient après la rencontre.

Saku Koivu était resplendissant de bonheur après le match. Et pas seulement en raison de la victoire. « J’ai tout aimé de cette expérience. L’entraînement de vendredi, la séance de patin avec les enfants et les familles. Le match qui s’est avéré un très bon match. Tout était parfait », assurait Saku Koivu après la rencontre.

François Beauchemin était tout aussi heureux d’avoir enfin pu prendre part à un match en plein air.

Même Mathieu Perreault, rayé de la formation avant la rencontre, se consolait à l’idée d’avoir au moins pu prendre part à l’échauffement afin d’avoir un avant-goût de ce qui l’attendra lorsqu’il disputera une vraie partie en plein air.

Car il y en aura d’autres. C’est évident. Et je ne parle pas des matchs de mercredi au Yankee Stadium, du 1er mars à Chicago et du 2 mars à Vancouver.

Je parle des autres qui viendront ensuite. Comme l’a ouvertement souhaité Teemu Selanne dans le vestiaire des Ducks samedi.

« La Ligue devrait organiser plus de matchs de ce genre. C’est bon pour le hockey. Pour la visibilité. Je n’aurais jamais cru que je jouerais un jour au hockey en Californie. Encore moins à l’extérieur. Mais maintenant que c’est fait, je peux vous assurer que je suis renversé par la qualité de l’expérience. J’ai gagné la coupe Stanley. J’en serai le mois prochain à mes sixièmes Jeux olympiques. Mais le match de ce soir, comme match, occupera une place de premier choix avec les autres grands moments de ma carrière. C’est vous dire à quel point j’ai apprécié mon expérience », a plusieurs fois répété Selanne.

Teemu SelanneEn passant, quand j’ai demandé à Selanne si ce match, comme les JO et la saison de rêve que lui et ses coéquipiers des Ducks connaissent, rendait plus spéciale encore sa dernière année dans la LNH, j’ai ajouté à ma question : si c’est vraiment votre dernière.

Selanne (à droite sur la photo) m’a aussitôt interrompu. « Comment ça si c’est ma dernière. C’est ma dernière. Reprends ta question en enlevant le mot si », qu’il m’a demandé en riant.

Si la LNH a présenté un match en plein air à Los Angeles, au Dodger Stadium, un 25 janvier, réalisant ainsi un rêve que personne n’aurait osé raconter il y a 10 ans à peine, il était quand même permis de rêver que Teemu Selanne puisse changer d’idée et offrir à ceux qui l’ont toujours adulé – ajoutez ici mon nom à la longue liste – une autre saison, d’autres belles montées, d’autres buts…

Le principal intéressé s’est assuré de mettre fin tout de suite à ce rêve qui lui ne deviendra donc pas réalité.

Ce sera la seule nouvelle négative – avec le fait que Paul Stanley ne se souvient plus de toutes les paroles des grands succès de Kiss et qu’il chante moins juste, ou plus faux, qu’avant – que je retiendrai du match Ducks-Kings au Dodger Stadium.

Car pour le reste, n’en déplaise aux puristes, la LNH et les deux équipes ont vraiment frappé un grand coup. Elles ont frappé un grand chelem.