MONTRÉAL – Même s’il a grandi à Ottawa, qu’il est diplômé en journalisme et qu’il n’a jamais joué au hockey professionnel, il œuvre à titre de dépisteur pour les Blue Jackets de Columbus en Finlande! Intrusion dans l’histoire intrigante de Simon Barrette.

 

Jarmo KekalainenLa marque de confiance devient encore plus fascinante quand on se rappelle que le directeur général des Jackets, Jarmo Kekalainen, est Finlandais. Il n’a donc pas hésité à miser sur un Canadien de 34 ans, avec un parcours peu orthodoxe, pour épier son pays natal.

 

Rien ne laissait présager ce scénario lorsque Barrette a accepté, en 2006, de suivre sa femme sur ses terres qui sont aussi celles de Jesperi Kotkaniemi.

 

« Quand je suis déménagé ici je me suis dit que ce serait vraiment intéressant de pouvoir travailler pour une équipe de la LNH éventuellement. À ce moment, plusieurs organisations n’avaient pas de dépisteurs en Finlande. Je n’avais pas non plus d’expérience dans le recrutement, je n’avais jamais joué pro non plus. Bref, je n’avais pas réellement de CV dans le monde du hockey », a-t-il reconnu dans le cadre d’une entrevue avec RDS.ca.

 

« Quand j’ai décidé que je voulais vraiment commencer, j’ai réalisé que je devais me retrousser les manches et démarrer petit à petit à faire ce que je pouvais pour acquérir des connaissances et des expériences », a poursuivi Barrette.

 

La première occasion s’est présentée grâce à la compagnie RinkNet, une plate-forme utilisée par de nombreuses formations de la LNH.

 

« J’ai commencé à faire du travail vidéo pour eux. Je filmais des joueurs en Finlande pour leur système, surtout pour des joueurs admissibles au repêchage. Lentement mais sûrement, j’ai fait un peu plus de choses et j’ai fini par faire du travail vidéo comme pigiste pour les Sharks de San Jose durant l’année du lock-out (2012-2013) », a expliqué le père d’une fille de huit ans et d’un garçon de cinq ans.

 

De fil en aiguille, un contact s’est établi avec les Blue Jackets qui l’ont engagé à titre de recruteur vidéo en Europe. Au lieu d’assister à tous les matchs, Barrette effectuait une portion considérable du dépistage en regardant des parties sur l’écran de son choix.

 

Après quatre saisons avec cette fonction, les Jackets et Kekalainen l’ont promu en tant recruteur amateur au même titre que les autres. Il occupe donc cette mission pour une deuxième saison avec l’organisation de l’Ohio.

 

« C’était vraiment le fun. On a une très bonne équipe de recrutement. J’ai beaucoup appris auprès d’eux et Jarmo vient d’ici donc il connaît en profondeur la Finlande, les joueurs, les ligues... », a noté l’ancien de l’Université d’Ottawa qui ne cache pas que l’expertise de Kekalainen en Finlande s’accompagne d’une dose de pression sur ses épaules.

 

Les Jackets ne craignent pas de sortir des sentiers battus et ils ont obtenu du succès dans cette voie notamment avec leur recruteur Stéphane LeBlanc, un enseignant de Moncton, qui a participé à la sélection de Pierre-Luc Dubois.

 

Au troisième rang (en 2016), les Jackets avaient préféré Dubois alors que bien des observateurs croyaient que Kekalainen opterait pour son jeune compatriote, Jesse Puljujarvi. À ce moment, Barrette produisait déjà des rapports en Finlande pour Columbus.

 

Puisqu’il acquiert son expérience en Europe, Barrette n’est pas très connu dans le monde des recruteurs du Québec et des environs. Sa confrérie, c’est celle de son pays d’adoption.

 

« Je ne crois pas que je sois au même rang que ceux qui sont dépisteurs depuis 20 ans avec une équipe, mais je m’entends très bien avec plusieurs gars », a mentionné celui qui s’est amusé à jouer dans une équipe de troisième division finlandaise à son arrivée dans ce pays.

 

Barrette s’est frayé un chemin dans un nouveau milieu et un nouveau pays en s’accrochant à sa passion du hockey. Mais il n’a pas délaissé pour autant son emploi à temps plein. Il s’occupe des relations médias pour Finnair, une compagnie aérienne.

 

Simon et Valtteri Barrette« Mon père avait un brevet de pilote de Cessna quand j’étais plus jeune donc l’aviation a toujours été dans mes intérêts et ceux de ma famille », a-t-il témoigné.

 

Il a certainement eu besoin de l’aide de sa femme pour jumeler tout ça et la vie de famille, mais Barrette a aussi trouvé le temps de compléter, à distance, une maîtrise en gestion du Sport à l’Institut Johan Cruyff.

 

« Dans mon premier cours, il y avait Tobias Salmelainen qui était un agent de joueurs pour l’une des plus grosses agences ici. On ne s’était jamais rencontrés, mais il était dans le même programme donc on a pu s’entraider comme faire des travaux d’équipe ensemble et il est devenu le directeur sportif de l’une des plus grosses équipes du pays (HIFK). Avec nous, il y avait des gens de partout dans le monde, de la France, de l’Espagne, du Mexique... Bien sûr, le sport mondial, c’est vraiment le soccer, mais on avait le hockey en commun », a relaté Barrette.

 

En disposant de cet atout de plus, d’autres portes pourraient s’ouvrir devant lui, mais il reste prudent.

 

« Le but, c’est un peu de toujours s’améliorer, je veux progresser tous les jours. C’était une ambition de travailler dans le monde du hockey et dans la LNH. J’ai le privilège de le faire et je l’apprécie beaucoup. Je veux continuer d’apprendre, il y a des gens qui font ça depuis tant d’années et l’expérience, c’est vraiment important selon moi. Tu peux comparer des joueurs à travers les années et apprendre de tes erreurs », a répondu sagement Barrette qui a aussi accepté un mandat cette année comme dépisteur et consultant pour KooKoo, une équipe de la ligue élite finlandaise. 

 

Pour la petite histoire, il a rencontré sa femme en allant visiter l’un de ses amis qui participait à un échange d’étudiants, à Rouen, en France. Une décision judicieuse qui a changé sa vie autant du côté personnel que professionnel.