À sa troisième saison dans la KHL, Martin St-Pierre n’est pas très dépaysé. Le natif d’Ottawa est retourné au Kazakhstan pour défendre les couleurs du Barys d’Astana. Le Franco-Ontarien a dû toutefois attendre le mois de septembre avant de rejoindre le club. Malgré ses bonnes statistiques de la saison précédente, l’entraîneur-chef de l’époque, Andrei Nazarov, n’a pas retenu ses services l’été passé.

« Nazarov ne me voyait pas sur les deux premières lignes. Mon style porté vers l’offensive n’est pas le style de jeu qu’il préconise. Je n’étais pas en conflit avec lui. C’est un gars correct, mais je n’étais seulement pas dans ses plans. »

L’entraîneur-chef du Barys d’Astana doit aussi diriger l’équipe nationale du Kazakhstan lors des compétitions internationales. Sous la direction d’Andrei Nazarov, les Kazakhs ont été exclus des Olympiques lors des qualifications pour les Jeux de Pyeongchang. Cet échec à fait perdre son emploi à l’ancien homme fort des Sharks de San Jose. La porte s’est donc ouverte pour un retour de St-Pierre à Astana.

« Deux jours après le congédiement de Nazarov, le Barys m’a remis sous contrat. L’équipe avait besoin d’un nouveau joueur pour remplacer Dustin Boyd. Il s’était blessé durant le camp d’entraînement et son absence faisait mal à l’équipe. J’étais aussi aimé par le président du club. J’ai donc été la solution à leur problème. »

St-Pierre a peut-être commencé sa saison tardivement, mais cela ne l’empêche pas de produire des points au grand plaisir de ses patrons. En 41 joutes cette saison, l’Ottavien a compté 11 buts et il a amassé 19 aides pour produire 30 points. Ce sont d’excellentes statistiques, surtout lorsqu’on tient compte du fait que Dustin Boyd est revenu dans la formation depuis le 23 novembre dernier.

« J’ai fait tout ce que je pouvais pour remplacer Dustin durant son absence. À son retour, j’ai changé quelques fois de ligne, mais je n’ai pas été exclu de la première unité spéciale. On m’a demandé de jouer à la pointe lors des supériorités numériques et nous avons eu du succès grâce à cette formule. Je joue maintenant sur le deuxième trio avec Brendan Shinnimin dont le club a fait l’acquisition tout dernièrement. On joue bien ensemble et ça donne un bon coup de pouce à l’équipe. »

Grâce au brio de ses deux premiers trios, le Barys a connu du succès depuis quelques semaines. Le club kazakh est parti des bas-fonds du classement de l’Association de l’Est pour remonter au sixième rang. L’équipe a battu plusieurs grosses équipes durant le temps des Fêtes. Le jour de Noël, Martin et ses coéquipiers ont vaincu les champions en titre, le Metallurg de Magnitogorsk, au compte de 5 à 3 avant de vaincre l’Avangard d’Omsk par la marque de 3 à 1, le mercredi suivant. St-Pierre explique que ces deux victoires ont été bonnes pour le moral de l’équipe.

« Nous avons maintenant confiance dans nos capacités et nous avons la preuve que notre système fonctionne bien. Nous étions tannés d’être toujours sur la corde raide. Faire l’ascenseur entre le huitième et le neuvième rang, ça commençait à nous fatiguer. Après une bonne réunion d’équipe, tous les joueurs de l’équipe se sont entendus pour ne pas risquer une place en séries éliminatoires en perdant un match sur deux. C’est comme cela qu’on a trouvé la force de battre Magnitogorsk et Omsk avant la nouvelle année. »

Le Barys n’est pas seulement bien muni offensivement. Il peut compter sur deux excellents gardiens de but. Habitué de la KHL, le Suédois Henrik Karlsson a cumulé 20 victoires depuis le début de la saison. Il est assisté par un gardien de talent. Recruté en novembre dernier, le Québécois Kevin Poulin s’adapte bien au circuit eurasien comme en témoigne Martin St-Pierre.

« Kevin est un très bon gars et il est un gardien de talent. Ses deux premiers matchs ont toutefois été difficiles. Commencer contre le SKA de Saint-Pétersbourg, ce n’est vraiment pas évident. Son deuxième match, contre Admiral, il l’a échappé. Cela dit, depuis un mois, il joue très bien et on voit qu’il est en train de prendre le rythme. Il a beaucoup gagné en confiance et on peut maintenant dire que nous avons deux premiers gardiens dans l’équipe. »

De la Ligue nord-américaine à la KHL

L’acquisition de Kevin Poulin a fait beaucoup parler en novembre dernier. Le Montréalais est un gardien établi dans la Ligue américaine, mais il a décidé de se mettre en forme dans la Ligue nord-américaine de hockey (LNAH) avant d’aller jouer outre-mer. Au sein des Prédateurs de Laval, Kevin n’a joué qu’une seule joute, mais certains blogueurs russes ont seulement tenu compte de ce match dans leurs analyses.

Kevin Poulin« J’ai signé un contrat avec les Prédateurs pour me mettre en forme de match. Mon agent et moi cherchions un contrat en Russie. Plusieurs clubs ont montré de l’intérêt, mais la meilleure offre est venue du Barys. J’ai donc rejoint cette équipe et je suis très satisfait de mon choix. »

La KHL attire de plus en plus de joueurs nord-américains et Poulin est le cas type des hockeyeurs regardant vers le circuit eurasien. Repêché par les Islanders en 2008, le Québécois n’a jamais eu réellement sa chance dans la LNH. Totalisant 50 joutes dans la LNH, il a dû faire la navette entre la Ligue américaine et le circuit Bettman durant toute sa carrière professionnelle. Après six saisons d’ascenseur, un passage à l’Est lui a semblé salutaire.

« L’an dernier, j’ai été à Tampa Bay pendant un mois avant de me retrouver de nouveau dans la Ligue américaine. L’AHL, c’est surtout pour le développement des jeunes. Je voulais me retrouver dans une ligue où tout est axé sur la victoire. Dans la KHL, les clubs se donnent exclusivement pour but de remporter le championnat. C’est plus intéressant pour moi. »

Comme l’a expliqué Martin St-Pierre, Poulin ne l’a pas eu facile lors de son arrivée dans la KHL. À son premier match, il a dû se frotter à la bande d’Ilya Kovalchuk et de Pavel Datsyuk. Le SKA de Saint-Pétersbourg n’a fait qu’une bouchée du Montréalais en écrasant le Barys par la marque de 9 à 0. Une défaite dure sur le moral que Kevin a toutefois bien encaissée.

« Je n’avais pas joué depuis sept mois. Je m’étais certes entraîné, mais ça ne remplace pas les matchs. Commencer contre Saint-Pétersbourg n’était peut-être pas l’idéal. Je devais m’ajuster à la patinoire de dimension olympique. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, ça change beaucoup la routine des gardiens. Les angles de tir ne sont pas les mêmes et les déplacements sont plus longs. Le jeu est aussi beaucoup plus ouvert. Ça m’a rappelé nos matchs contre les Saguenéens de Chicoutimi. La glace était plus large et on y perdait nos repères. Cela dit, c’est une simple question de temps et d’effort avant que l’on s’y adapte. »

Le temps et les efforts ont effectivement été payants pour le cerbère québécois. À ses quatre derniers départs, le gardien de but montréalais a remporté trois matchs. On compte dans cette fiche la fameuse victoire contre le Metallurg de Magnitogorsk ainsi qu’un blanchissage contre le Spartak de Moscou.

Kevin PoulinKevin n’a pas dû seulement s’adapter à la dimension de la patinoire et au style de jeu de la KHL. Le mode de vie des Kazakhs est bien différent de celui des Nord-Américains. Il n’a toutefois pas eu de difficulté à s’adapter à Astana. Le Québécois est bien entouré dans l’ancienne République soviétique.

« Avec la barrière de la langue, ce n’est pas forcément toujours facile. Cela dit, je suis entouré de Nord-Américains. Nigel Dawes m’a beaucoup aidé à me retrouver dans la ville. Il est ici depuis plusieurs années. Martin m’a aussi donné un bon coup de main. C’est toujours plaisant de se retrouver entre Francophones à l’étranger. Au sein de l’équipe, il y a aussi Corey Trivino. On se connaît bien, car on s’est souvent rencontré lors des camps d’entraînement des Islanders. Ça n’a donc pas été très difficile de me retrouver rendu ici. »

En Amérique du Nord, le Kazakhstan est malheureusement connu pour le film Borat, une comédie douteuse et honnie dans l’ensemble du pays. La représentation peu flatteuse que l’on fait du pays et de ses habitants est loin d’être représentative de la réalité. Comme l’a constaté l’ancien des Tigres de Victoriaville, Astana est une ville moderne.

« Astana n’est pas aussi touristique que Dubaï, mais elle a beaucoup en commun avec cette ville. Tout est neuf. On ne voit aucun vieux bâtiment. Il y a beaucoup de centres commerciaux et d’excellents restaurants. Nous jouons dans un bel amphithéâtre et beaucoup de partisans se déplacent aux matchs. C’est vraiment une belle place pour jouer au hockey. »