Nous avons franchi une troisième étape vers l'atteinte de notre objectif en fin de semaine en disposant des Flyers de Philadelphie devant nos partisans. C'est un bel accomplissement que d'atteindre la finale de la coupe Stanley et on est très fier du chemin parcouru jusqu'à maintenant, mais en même temps, on n'est pas entré dans les séries pour gagner le trophée Prince-de-Galles. En fait, je n'avais aucune idée du nom que portait ce trophée avant qu'on me le fasse remarquer aujourd'hui. Ce n'est pas celui-là auquel les joueurs rêvent.

D'ailleurs, à l'image des équipes qui l'ont mérité au cours des dernières années, c'est tout juste si on n'a pas complètement ignoré ce trophée quand ils nous a été remis après l'élimination des Flyers. Tout le monde était au courant de cet espèce de rituel qui veut qu'on ne touche pas au trophée dans le but d'éviter la malchance en finale. Sidney étant à peu près la personne la plus superstitieuse que je connaisse, personne n'a eu à lui rappeler cette tradition et ça ne m'a pas surpris le moins du monde quand je l'ai vu la respecter.

Quant aux casquettes et chandails remis aux champions d'association, personne ne les a enfilés. Pascal Dupuis a lancé tout ça dans les gradins. De mon côté, j'ai mis ça dans une boîte et j'ai l'intention de les donner à mes frères ou à des amis. Je suis certain qu'ils seront tous heureux de les porter mais moi, il n'est pas question que je porte ça!

Notre but ultime, c'est de tout rafler et pour ça, il nous manque encore quatre victoires, les quatre qui seront les plus difficiles à arracher.

Même si je suis plus près que jamais de réaliser mon rêve de jeunesse, je vous assure que j'ai encore les deux pieds solidement ancrés sur terre. Je suis sincèrement habité par le sentiment que nous n'avons encore rien accompli et je reste concentré sur le travail qu'il reste à faire. Notre devoir n'est pas terminé et mes coéquipiers et moi sommes encore loin d'être satisfaits. C'est le fun ce que je vis actuellement et je suis vraiment dedans, mais en même temps on dirait que je ne réalise pas totalement ce qui m'arrive et vous savez quoi? Je ne veux pas le réaliser.

Comprenez moi bien : je suis bien concentré sur le travail qui nous attend, mais ça ne m'empêche pas de profiter de la vie et d'apprécier l'expérience unique que je vis. Récemment, avant un match contre Philadelphie, les entraîneurs nous ont fait visionner une vidéo de motivation dans lequel Wayne Gretzky conseille aux joueurs de ne pas avoir peur de partager leurs états d'âme avec les gens qui les entourent, de bien savourer le moment présent.

Depuis que j'ai écouté ça, j'ai un peu changé mon comportement. J'en parle plus avec les boys, on réalise à quel point gagner la coupe Stanley peut changer une vie et une carrière. C'est le fun. Je vis quelque chose de spécial et je me sens vraiment privilégié d'être là.

Hommage à Michel Therrien

On n'a subi que deux défaites depuis le début de séries et certains pourraient être portés à croire qu'on l'a eu facile, que nos adversaires n'étaient pas de calibre, mais rien n'est plus faux! En fait, je crois que le mot « facile » n'a pas sa place dans une conversation portant sur les séries éliminatoires.

Même si ça ne paraît peut-être pas au premier coup d'œil, nos adversaires nous donnent du fil à retordre depuis le début des séries. Même le match de dimanche, que nous avons remporté 6-0, a été plus difficile que le pointage ne l'indique. La facilité, si vous me permettez d'utiliser ce terme, c'est nous-même qui l'avons créée en travaillant fort et en suivant le plan établi par notre personnel d'entraîneurs. On est sharp comme jamais, on est relax et on a beaucoup de plaisir.

Au cours des dernières semaines, certaines personnes ont laissé sous-entendre que Michel Therrien avait un job facile parce qu'il dirige une équipe bourrée de talent. Franchement, ceux qui avancent cette hypothèse ne connaissent pas grand-chose au hockey. On n'a qu'à regarder notre évolution depuis qu'il est derrière le banc pour comprendre qu'il est la cause principale de nos succès. Le système qu'on pratique présentement fonctionne à la perfection et le cerveau derrière ça, c'est Michel.

Vous savez, un ensemble musical est composé d'un paquet d'excellents musiciens, mais sans chef d'orchestre, ça sonnerait tout croche. C'est exactement la même chose avec nous. Michel a construit le plan idéal pour les joueurs qu'il a à sa portée. Chaque fois qu'il jongle avec ses lignes, les résultats suivent. Il a vraiment un talent pour aller chercher le maximum de chacun de ses joueurs.

Depuis quelques années, les Penguins de Pittsburgh étaient synonymes de machine offensive. Tout le monde savait qu'on était capable de marquer des buts, mais plusieurs remettaient en question notre jeu défensif. Cette époque est révolue, mes amis…

On forme maintenant une équipe plus complète et le meilleur exemple pour l'illustrer, c'est le début de notre série contre les Rangers de New York. Après avoir remporté un festival offensif dans le premier match, nous avons resserré notre jeu et signé une victoire de 2-0 dans le deuxième. On a prouvé qu'on avait une équipe qui pouvait gagner n'importe quel genre de rencontre et ça, c'est encore le résultat du système implanté par l'entraîneur.

Ce qui est doublement intéressant, c'est de voir des gars comme Sidney, Malkin et Hossa y adhérer à 100%. Tout le monde retire une grande fierté de pouvoir limiter les chances de l'adversaire dans notre territoire.

Les talents cachés de Marian Hossa

Parlant de Hossa, je crois qu'on s'entend tous pour dire qu'il fait mentir ceux qui prétendaient qu'il n'était pas un joueur de séries. C'est clair qu'on était allé le chercher pour ses qualités de joueur offensif, mais à mon avis, il est probablement l'un des meilleurs joueurs défensifs de la Ligue. Pas de farce! Il est dédié à la cause, toujours bien positionné… J'en parlais justement avec Ryan Whitney tout à l'heure. Selon nous, Marian adore jouer à Pittsburgh. Il est un gars simple, super sympathique et il s'est vraiment bien fondu dans le groupe à son arrivée. Il aime beaucoup l'atmosphère qui règne autour de l'équipe et ça paraît sur la glace. Sidney et lui ont fini par développer une chimie incroyable et ils n'ont pas fini de nous en faire voir de toutes les couleurs.

D'ailleurs, notre esprit d'équipe impressionne tous ceux qui sont appelés à graviter autour de notre groupe. C'est sans aucun doute l'une de nos forces. Je jasais dernièrement avec Luc Gélinas et il me disait que pour un journaliste, on était l'équipe la plus plaisante à couvrir. Quand c'est le temps d'être sérieux, on l'est et on va à la guerre, mais notre façon d'aborder la vie se reflète dans nos performances sur la patinoire.

Le travail de Jordan Staal

Jordan Staal est un joueur qui a essuyé sa part de critiques cette année. De la façon dont il avait début sa carrière dans la Ligue nationale l'an dernier, plusieurs personnes s'attendaient à une grande saison de sa part et ont l'impression qu'il a arrêté de progresser simplement parce qu'il n'a pas montré des statistiques aussi impressionnantes qu'à son année recrue.

Pourtant, à mon humble avis, Jordan a été notre joueur le plus constant cette saison. Il est un joueur complet qui apporte tellement à notre équipe. On savait tous qu'offensivement, ça allait finir par débloquer et c'est ce qui est arrivé contre Philadelphie.

J'ai eu la chance de jouer avec lui lors des deux derniers matchs et ça a vraiment cliqué. Il est tellement fort avec la rondelle et on a tendance à l'oublier, mais on lui demande souvent de surveiller le meilleur trio adverse.

Wings ou Stars? Peu importe…

Pendant que dans l'Ouest, les Red Wings se battent pour empêcher les Stars de remonter la pente et de pousser la série à la limite, nous avons le luxe de pouvoir prendre un peu de repos en attendant de connaître l'identité de notre prochain adversaire.

On n'accorde aucune importance à l'équipe qu'on va affronter en finale. C'est certain que les petits ajustements à apporter à notre plan de match seront différents dépendamment de l'équipe à laquelle on va se frotter, mais reste que je le dis et je le répète depuis longtemps, on veut continuer à jouer le Penguins style of hockey. On se fiera sur notre style, notre système et on tentera d'imposer tout ça à notre adversaire.

Je ne suis évidemment pas sans savoir qu'il y a des Québécois qui se battent pour l'autre place disponible en grande finale. Même si je ne communique pas régulièrement avec eux, je connais quand même bien Stéphane Robidas et Mike Ribeiro pour avoir joué avec eux au tournoi À bout de souffle l'été dernier. C'est toujours le fun de voir des compatriotes avoir la chance de se rendre aussi loin et connaître du succès.

Je ne vous reparlerai pas d'ici la fin de la saison. J'aime beaucoup vous donner des nouvelles entre nos séries, mais pendant que celles-ci battent leur plein, j'aime mieux me concentrer sur mon jeu et ne pas donner de munitions à l'adversaire avec mes commentaires.

On se reparlera donc après la finale, en espérant pour le mieux…

*Propos recueillis par Nicolas Landry