La participation des joueurs de la LNH aux Jeux olympiques d’hiver est un phénomène récent, le hockey olympique ayant longtemps été une compétition de type amateur. Ce n’est qu’en 1998 que la LNH a, pour la première fois, permis à ses joueurs de participer aux Jeux d’hiver de Nagano au Japon. Depuis, près de 150 joueurs de la LNH participent habituellement aux Jeux olympiques d'hiver.

Malgré le succès du hockey sur glace lors des Jeux de Sotchi en 2014, la participation des joueurs de la LNH aux Olympiques de 2018 à Pyeongchang en Corée du Sud est encore incertaine à ce jour. En effet, puisque la LNH n’en tire peu, voire aucun bénéfice lucratif immédiat, elle hésite à laisser son meilleur produit sur la glace s’envoler vers la Corée du Sud. Certes, la visibilité internationale dont bénéficie le hockey sur glace aux Olympiques est profitable à long terme pour la LNH, mais il lui est tout de même légitime d’avoir certaines réserves quant à son implication lors des prochains Jeux d’hiver.

La semaine dernière, des responsables de la LNH étaient en visite à Pyeongchang pour inspecter les installations où auront lieu les prochains Jeux d’hiver de 2018.

Pourquoi la participation des joueurs de la LNH est incertaine?

La situation était moins problématique avant l'entrée en vigueur de la nouvelle convention collective entre la LNH et l’AJLNH en 2013. En effet, l’ancienne convention collective de la LNH (2005-2012) prévoyait à son article 24.8 la participation des joueurs aux Jeux olympiques d’hiver. Or, la conclusion de la nouvelle convention collective en 2013 ne traite pas de la question des compétitions internationales impliquant les joueurs de la LNH. C'est pour cette raison que la participation de la LNH avait aussi été incertaine pour les Jeux de Sotchi en 2014.

La présente convention collective expirera le 15 septembre 2022 et par conséquent, la participation de la LNH aux Jeux d'hiver de Pékin en 2022 devra aussi être débattue au préalable. Quoiqu'en 2021-2022, cette question fera certainement partie des points qui feront l'objet des négociations collectives entre la LNH et l'AJLNH en prévision de la ratification de leur nouvelle convention collective.

Position des joueurs

Rappelons qu'en 2013, la participation de la LNH aux Jeux de Sotchi avait également posé problème. Plusieurs athlètes avaient revendiqué leur désir de concourir aux Olympiques de Sotchi, mais la LNH s'était montrée réticente.  Entre autres, Alexander Ovechkin et Evgeni Malkin avaient menacé à plus d’une reprise qu’ils allaient participer aux Jeux de Sotchi sans égard de la position de la LNH. La décision a été prise le 19 juillet 2013, soit moins de six mois avant le début des Jeux de Sotchi en février 2014. Il aura fallu des mois de délibérations, mais la présence des joueurs de la LNH à Sotchi a été confirmée à la suite d'une entente intervenue entre la ligue, l'Association des joueurs et la Fédération internationale de hockey (IIHF).

Cependant, en vue des Jeux de Pyeongchang en 2018, les joueurs sont moins enthousiastes à y participer. En effet, l'AJLNH soutient que ses membres ne veulent pas payer pour se rendre en Corée du Sud considérant que le Comité international olympique (CIO) n'assume pas les frais rattachés à la participation des athlètes aux Jeux. Plus particulièrement, les joueurs de la LNH dénoncent les frais reliés au transport, à l’hébergement et aux assurances des professionnels.

Position de la LNH

Quant à elle, la LNH est hésitante en raison de la possibilité des blessures chez ses joueurs étoiles, le renforcement de la fatigue en raison du décalage horaire ainsi que des nombreux coûts économiques découlant de la cessation de ses opérations pendant deux semaines en saison régulière.

De son côté, l’IIHF encourage fortement la participation de la LNH aux Olympiques 2018, mais la LNH ne permettra à ses joueurs de participer que dans la mesure où les profits surpasseront les coûts. En fait, ce que la LNH aimerait, c’est d’obtenir une compensation monétaire par le CIO et l’IIHF pour indemniser la perte financière d’une suspension de ses activités pendant deux semaines en mi-saison et au surplus une forme de dédommagement en cas de blessures chez ses joueurs. Tant le CIO que l’IIHF sont réticents à cette demande puisqu’ils ne veulent pas créer de précédents et ainsi encourager les autres ligues professionnelles à revendiquer de telles compensations.

Par ailleurs, au-delà d’une compensation financière, la LNH souhaite avoir des droits sur la propriété intellectuelle olympique. Elle désire notamment des droits télévisuels afin de pouvoir diffuser des vidéos olympiques sur leur NHL Network, sur leur site web NHL.com et sur les autres plateformes lui appartenant. Ceci étant dit,comme ces vidéos constituent de la propriété olympique, la LNH ne peut les diffuser. Notons que le célèbre clip du but gagnant de Sidney Crosby aux Jeux de Vancouver n’a jamais été présenté sur le NHL Network, ni sur NHL.com ou encore n’a fait l’affiche d’aucun aréna, car bien que la LNH a la chance d’avoir Crosby parmi ses talents, elle n’a pas pour autant de droits sur une victoire olympique. Tout ce qui découle de la victoire du Canada à la compétition de hockey sur glace en 2010 demeure propriété exclusive olympique et ce, même si elle émane d’un joueur de la LNH. De ce fait, la LNH ne veut pas simplement être une pourvoyeuse de talents, elle veut faire partenariat avec le CIO.

Bien entendu, advenant une telle situation, ce partenariat aura certes un impact sur les autres ligues professionnelles, notamment la NBA pourrait négocier des termes similaires pour les prochains Jeux d’été. Considérant que le CIO et l’IIHF constituent des organisations internationales non gouvernementales à but non lucratif, ils n’ont donc pas la capacité financière d’abdiquer aux demandes de la LNH et de là, la teneur du débat. Inversement, si la LNH investissait de l’argent en plus de fournir les joueurs, chacune des parties y trouverait possiblement son compte. Dans une telle optique, un partenariat pourrait être envisageable.

Somme toute, il n’y a pas meilleur véhicule pour assurer la visibilité internationale d’un sport que par les Olympiques. Toutefois, pour les Jeux de 2018, la LNH et ses joueurs sont fortement préoccupés par le long voyage et les nombreux frais qu'ils devront assumer pour se rendre à Pyeongchang. Qui plus est, la LNH évalue que l'important décalage horaire nuira aux cotes d’écoute. Dans la mesure où les parties ont des intérêts divergents, force est de constater que l’esprit olympique est malencontreusement subordonné à l’aspect économique.