MONTRÉAL – Il y a autant de façons d’analyser une situation que de paires d’yeux pour la contempler. Le plus récent dénouement dans la carrière de Gabriel Bourque en est un bon exemple.

Depuis qu’il a signé un contrat d’un an avec le Rocket de Laval, le vétéran de 30 ans a senti de l’étonnement et de la déception autour de lui. C’est que même s’il a plus de 400 matchs dans la Ligue nationale à son compteur et qu’il n’a pas joué à temps plein dans la Ligue américaine depuis bientôt cinq ans, son entente avec le club-école du Canadien ne le rend pas admissible à un rappel dans la LNH.

Bourque aborde tout ça d’un autre angle. Sachant que les opportunités n’abondaient pas la dernière fois qu’il avait sondé l’intérêt d’éventuels employeurs et considérant qu’il venait de passer un an loin de la game, ses attentes étaient modérées quant à son éventuel retour au jeu. Un contrat d’essai, une invitation de dernière minute au camp d’entraînement, était pas mal le meilleur scénario qu’il envisageait.

Alors ce signe d’intérêt réciproque de la part du Rocket, il le voit comme un petit cadeau tombé du ciel.

« J’avais demandé à mon agent de regarder du côté de Laval, je lui avais dit que j’aimerais vraiment aller là. Ça a pris à peu près un mois et il m’a rappelé avec une offre. J’étais vraiment content, c’est pas trop long que j’ai signé, racontait Bourque quelques jours après l’annonce de son embauche. Le monde dit : "ouais, c’est juste un contrat à un volet", mais c’est pas grave. Je veux juste recommencer à jouer au hockey du bon pied et avoir du fun. Ça fait longtemps que j’ai pas été aussi motivé pour une saison. »

Bourque sort d’une sabbatique semi-imposée, semi-volontaire. Lorsqu’il a constaté, après son unique saison chez les Jets de Winnipeg, qu’on ne s’arrachait pas ses services, il a pris l’audacieuse décision de se retirer du marché pour amorcer une réflexion sur son avenir. Sa femme, ses quatre enfants et lui ont défait leurs boîtes au chalet familial, dans la région de Rivière-du-Loup, et s’y sont installés pour l’hiver.    

Pendant deux mois, il n’a pas chaussé les patins. Une fois la déception initiale encaissée, il a mis le nez dehors et a renoué avec l’hiver québécois et la nature qui l’entourait. Il a fait de la raquette, du ski de fond, de la planche à neige. Il s’est mis à patiner sur le lac gelé.

« Ça m’a rentré dedans un peu de ne pas avoir tant d’offres que ça, j’étais un peu malheureux. Mais après ça j’ai commencé à faire des activités, à décrocher du hockey. J’essayais de me mettre la tête ailleurs pis de vivre autre chose, résume-t-il. Je me suis ressourcé un peu. »

Avec sa femme, il s’est aussi penché sur des questions qu’il n’avait jusque-là qu’effleurées. Il a lu, beaucoup, pour tenter de défricher un peu ses projets d’avenir. Ses idées se sont éclaircies, il a fait des choix et commencé à placer ses pions.

« Tu y penses toujours un peu pendant que tu joues, mais là, on n’avait vraiment pas le choix de faire des plans », a-t-il réalisé.

Et quand il a recentré ses idées sur le court terme, il a réalisé que l’envie de jouer au hockey était revenue de vacances. Il a recommencé à s’entraîner plus sérieusement avec l’objectif de refaire son chemin vers les grandes ligues.

« On va arriver au camp et on verra, mais moi c’est sûr que je veux aller là et m’amuser. Le Rocket est une équipe gagnante et ça fait longtemps que j’ai pas gagné de championnat, alors ça serait le fun. Mais surtout, je veux me remettre à jouer, avoir du fun et être important pour une équipe. T’sais, quand tu joues deux, trois minutes par match, des fois tu te sens laissé de côté, c’est un peu plus dur. Cette année, je veux vraiment avoir du fun au hockey. »

« Après ça, on verra l’année prochaine. Si je peux me trouver un contrat à deux volets à quelque part, ça serait magnifique. Mais on va commencer par cette année. »

À Laval, Bourque devrait retrouver les conditions gagnantes pour remettre sa carrière sur les rails. Dans son souci de favoriser le développement des jeunes espoirs de l’organisation du Canadien, l’entraîneur Joël Bouchard a toujours fait une place de choix aux vétérans qui sont prêts à inclure l’avancement du projet collectif dans la poursuite de leurs objectifs individuels. Alex Belzile, un autre natif du Bas-St-Laurent que Bourque considère comme un ami, en est l’exemple parfait.

« J’ai joué avec lui à San Antonio et j’ai vu comment il a évolué depuis qu’il est ici. Ça fait une couple de fois que je jase avec lui et qu’il me dit que j’aimerais ça [à Laval], que [Bouchard] est mon genre de coach, que ça me ferait du bien. C’est sûr que c’est un point positif », dit celui qui est aussi familier avec le jeune défenseur Tristan Pomerleau.

Maintenant que le contrat est signé, la plus grosse question pour Bourque est la suivante : acheter ou louer? Celui qui a aussi évolué dans l’organisation des Predators de Nashville et celle de l’Avalanche du Colorado est arrivé au moment où il réalise que le marché immobilier n’est pas l’aspect le plus hospitalier de sa nouvelle ville d’adoption. Mais il y a du positif et c’est là-dessus qu’il désire se concentrer.

« C’est moins loin que d’habitude pour déménager. Ça va être le fun, un petit cinq heures de route! »