LAVAL – Les plus beaux espoirs des Sabres de Buffalo avaient été fumants dans leurs deux premières séries contre Belleville et Utica. Ils étaient attendus avec méfiance à Laval après avoir surpris les champions de la division Nord en deuxième ronde.

Le Finlandais Arttu Ruotsalainen avait marqué huit buts en sept sorties. L’Allemand J.J. Peterka avait neuf points à sa fiche. Peyton Krebs, la pépite obtenue des Golden Knights de Vegas en retour de Jack Eichel, en avait autant. On redoutait qu’ils passent en tempête et ne laissent que des dégâts derrière eux.

Après deux matchs, c’est à peine si on les a vus.

Il y a eu quelques caméos, de brefs éclairs de génie qui sont venus rappeler au spectateur attentif à qui il avait affaire. Peterka a marqué le seul but des siens et obtenu cinq tirs dans le match numéro un. Ruotsalainen a été victime d’un vol ou deux de la part de Cayden Primeau le lendemain. Krebs lui a servi une passe lumineuse sur l’un d’eux.

Mais ce qu’on retient surtout au moment où la série se déplace à Rochester avec le Rocket à une victoire de passer au tour suivant, ce sont les signes de frustration de plus en plus nombreux chez ces talentueuses recrues.

Krebs a évacué la sienne sur le défenseur Tory Dello en troisième période lundi. Jack Quinn, un choix de première ronde plutôt invisible depuis le début des séries, s’est fait chasser pour avoir rudoyé Alex Belzile. Une fois au cachot, l’ancien des 67’s d’Ottawa a continué de s’énerver en invectivant Danick Martel assis sur le banc voisin.

Et les jeunes ne sont pas les seuls à avoir perdu la tête. Brett Murray a tenté de s’en prendre à Louie Belpedio après un arrêt de jeu. Brandon Davidson a cherché noise à Cédric Paquette. « Ça aurait pu dégénérer, mais il a gardé son sang-froid, a fièrement fait remarquer l’entraîneur-chef Jean-François Houle. Ça, c’est bon pour nous. C’est important de gérer nos émotions, surtout avec les foules qu’on a ici. Des fois ça peut basculer d’un bord pis de l’autre. »

Vingt-quatre heures plus tôt, la déroute des visiteurs s’était manifestée dans les comportements erratiques de Ben Holmstrom et Nick Boka. Depuis qu’ils ont décidé de sortir les gros bras dans la troisième période du premier match, les Americans ont les nerfs à fleur de peau. Devant cette perte de contrôle, les joueurs du Rocket tendent l’autre joue et sourient. Ils auraient pu, par exemple, s’enflammer en jurant de défendre Mattias Norlinder, visiblement blessé à la tête après avoir encaissé la mise en échec superflue de Holmstrom. Ils ont plutôt opté pour la discipline et l’agressivité contrôlée.

Ce qu’on pourrait décrire comme le triomphe de l’expérience et de la sagesse sur le talent et la jeunesse explique en bonne partie pourquoi leurs rivaux font déjà face à l’élimination.

« C’est sûr qu’on a des gars qui aiment le jeu physique dans notre équipe. En ce moment, il ne faut pas trop s’en faire avec ça, mais je pense que oui, on est un peu dans leur tête, ressent l’attaquant Brandon Gignac. Ils sont jeunes, ils ont beaucoup de talent offensif. Nous, notre style de jeu c’est de finir nos checks sur eux. »

Americans 1 - Rocket 3

« Quand les choses ne vont pas comment on le voudrait, c’est facile de perdre les pédales, approuve Belpedio. On fait du bon boulot pour garder la tête froide présentement. On ne reculera pas devant le jeu rude, c’est ce qu’il y a de mieux dans le hockey de séries. Mais notre état d’esprit est à point présentement. On reçoit des double-échecs, on se fait frapper après le sifflet et on s’en fout. On joue dur quand ça compte et plus leur frustration monte, mieux c’est pour nous. »

« Je te dirais que le match d’aujourd’hui, ça a été une confirmation qu’on est vraiment tous dans le même bateau, a illustré le défenseur Tobie Paquette-Bisson. Je pense que la troisième période, ça l’a prouvé un peu. »

Quand on lui a demandé s’il tirait les mêmes conclusions que Gignac, Houle a rapidement répondu par l’affirmative, comme s’il s’agissait d’une évidence. Puis il a pris une pause, a souri et a prudemment tempéré ses propos.

« Peut-être, peut-être qu’on est dans leur tête. Mais comme je l’ai tout le temps dit, chaque match est différent dans les séries éliminatoires. Le match d’avant ne veut plus rien dire. Alors on ne regarde pas trop en avant. On pense au prochain match. »