LAVAL – S’il y a un bon moment déjà qu’on ne prend plus la peine de calculer les probabilités mathématiques de voir le Canadien en séries éliminatoires, il saute maintenant aux yeux que le destin de son club-école n’est pas plus rose.

 

Le Rocket de Laval est de retour d’un voyage désastreux. Des dix points qu’il espérait glaner pendant la dizaine de jours qu’il vient de passer sur la route, il n’en a ramené qu’un seul. Au classement de la division Nord, il se retrouve désormais plus près de la cave que de la dernière position donnant accès aux séries.

 

Dans ce dérapage collectif, des individualités déçoivent. Matthew Peca a deux points à ses 13 derniers matchs. Laurent Dauphin a quatre points en 16 matchs depuis qu’il a été acquis dans une transaction. Ryan Poehling n’a aucun point depuis son renvoi dans la Ligue américaine. Jesperi Kotkaniemi, Charles Hudon et Lukas Vejdemo n’ont rien produit depuis trois matchs. Riley Barber et Phil Varone, deux vétérans embauchés durant l’été afin d’épauler les jeunes dans leur progression, ont été laissés dans les gradins lors du dernier match.

 

Voilà pour les faits.

 

Mardi, après un entraînement qui ne s’approchait en rien de l’intensité qu’on a l’habitude de voir d’une formation dirigée par Joël Bouchard, l’entraîneur a proposé ses explications pour justifier la vilaine séquence que traverse son équipe. Résumé de ses propos : le Rocket subit les conséquences normales d’un roulement de personnel plus accentué qu’ailleurs et doit vivre avec sa décision de confier des responsabilités accrues aux jeunes espoirs de l’organisation.

 

« On dirait qu’on est en camp d’entraînement ou en début de saison, compare Bouchard. Quand on change autant les joueurs de position et que certains arrivent dans des nouveaux rôles – tu sais, Kotkaniemi joue 20 minutes par match, il est de tous les combats - on a un manque de cohésion, mais aussi un manque d’identité qui est un peu normal. »

 

« Je change tellement souvent d’alignement depuis le début, à moment donné je veux bien moi aussi, mais... On a eu tous ces changements de personnel au mois de février, au moment où les équipes sont généralement le plus rodées. Moi il faut que je rode une équipe à mi-chemin dans la saison. Je pousse d’un bord sur une pédale, je pousse de l’autre... le bicycle va un peu croche. C’est normal. »

 

Pour Bouchard, le voyage qui vient de se terminer n’a pas été l’échec décrié par plusieurs. Deux des cinq matchs, ceux à Utica et à Providence, lui ont donné satisfaction malgré le résultat défavorable. « Pour les autres, ce n’était pas à la hauteur, concède-t-il. Mais c’est ça le hockey, des fois tu vas avoir des séquences plus difficiles. »

 

Au cours des dernières semaines, le Rocket a perdu son capitaine, Xavier Ouellet, ainsi que les attaquants Dale Weise et Jake Evans. En retour, ils ont hérité de Poehling, Kotkaniemi et du défenseur Cale Fleury. Dans l'optique où Laval est considérée comme un centre de formation, ça se tient. Dans un contexte où on s'attend à ce que l'équipe maintienne ou améliore sa position au classement, Bouchard estime qu'il perd au change. 

 

« Dites-vous qu’un joueur qui part de jouer 8-9 minutes à en jouer 19-20 avec plein de responsabilités, ça va venir avec beaucoup plus d’erreurs, prévient l'entraîneur dans la suite de son plaidoyer. On va se dire les vraies choses, depuis le début du voyage, les jeunes ont pris de la place. Et même si ça n’a pas été parfait, ils retournaient sur la glace. Pourquoi? Parce qu’ils ont une bonne attitude, ils travaillent fort et veulent bien faire. Moi je fais du hockey de la Ligue américaine. Si je faisais jouer tous les vétérans et que les jeunes n’étaient pas dans une situation pour jouer, est-ce qu’on serait bien plus avancé comme organisation? »

 

À travers toutes ces expériences en cours, Bouchard mise aussi sur la création d’un esprit de corps au sein de ses troupes, un élément qu’il décrit comme « l’un des plus importants » dans les succès d’une équipe de hockey. Cet objectif semble relever de l’utopie s’il n’a toujours pas été atteint avec une vingtaine de matchs à jouer au calendrier, mais il apparaît effectivement comme le seul espoir de réhabilitation pour une équipe qui se dirige encore une fois dans le mur.

 

Si les vétérans du Rocket ne se décident pas à accepter leur rôle dans le plan de développement de Bouchard, et si les plus beaux espoirs de l’organisation n’arrivent pas à en donner plus sous ses ordres, le club-école ratera les séries pour la huitième fois en neuf ans.

 

« Je comprends les gens, [ils pensent aux] playoffs, ils virent fou, dit Bouchard. Moi, je suis dans la Ligue américaine. Je ne peux pas aller à l’encontre de nos principes. On fait jouer des jeunes joueurs dans des situations importantes et ils vont échouer, on va se le dire. Mais ce n’est pas contre eux autres, au contraire, il faut que je leur donne. C’est pour ça qu’ils sont ici. Les vétérans doivent en prendre plus aussi, tout le monde essaie de trouver sa place. Mais il reste encore beaucoup de matchs et on joue beaucoup contre notre division, alors ce n’est pas quelque chose qui m’énerve. »

 

Le Rocket retrouvera ses partisans mercredi soir pour le premier match d’un programme double contre le Moose du Manitoba. Barber et Varone retrouveront leur place dans la formation pour l’occasion tandis que Keith Kinkaid devrait être devant le filet.