LAVAL – Il est arrivé à Josh Brook, durant sa dernière saison dans la Ligue junior de l’Ouest, d’être déraciné de son poste de défenseur pour être utilisé à l’attaque par son entraîneur Tim Hunter. « Pas si souvent, peut-être quatre ou cinq matchs, précise-t-il. On avait des blessés, ils avaient besoin de quelqu’un et ça a été moi l’heureux élu, j’imagine! »

 

Hunter n’a certainement pas choisi Brook en fermant les yeux et en pointant son index sur l’ardoise accrochée dans le vestiaire des Warriors de Moose Jaw. Cette saison-là, sa quatrième en Saskatchewan, l’espoir du Canadien l’a conclue avec 75 points en 59 matchs. S’il a été envoyé à une position qui ne lui était pas familière, c’est parce qu’il était à l’époque un homme parmi les enfants.

 

Ironiquement, c’est exactement pour les raisons contraires qu’il s’est de nouveau retrouvé dans un rôle d’attaquant en fin de semaine avec le Rocket de Laval.

 

De son propre aveu, Brook connaît une saison recrue inégale dans la Ligue américaine. « Mon jeu en zone défensive n’a vraiment pas été bon. J’ai besoin de travailler là-dessus », réalisait l’arrière de 20 ans mardi. Il a été rayé de l’alignement pour deux matchs récemment et devait en regarder un troisième des gradins samedi quand un imprévu de dernière minute a forcé Joël Bouchard à inscrire son nom sur la feuille de match à Winnipeg.  

 

Mais plutôt que de l’utiliser comme septième défenseur, Bouchard lui a donné son tour régulier au sein du quatrième trio aux côtés de Kevin Lynch et Michael Pezzetta. L’expérience a été assez concluante pour être répétée le lendemain. Bilan du week-end : récipiendaire du titre d’homme du match décerné par ses coéquipiers dans une victoire de 3-0 et auteur de l’unique but dans une défaite de 5-1.

 

« Je pense que dans la fin de semaine, il est à +5 ou +6 dans les chances de marquer provoquées par son jeu », plaidait Bouchard avec enthousiasme pour donner du poids à la défense de son expérience.

 

« J’aime bien comment la situation a été gérée, a clarifié Brook lorsqu’il lui a été suggéré qu’il aurait pu être froissé par la décision. Moi non plus, je ne suis pas satisfait de la qualité de mon jeu dernièrement, alors ce petit changement, pour essayer quelque chose de nouveau, a été agréable. »

 

Le but avoué de l’exercice était d’offrir un petit moment de répit à Brook dans un processus d’apprentissage éprouvant. Pour un jeune défenseur à vocation offensive, le hockey professionnel recèle de nombreux pièges dont il ne peut apprendre l’existence qu’en s’y faisant prendre. À mi-saison, Bouchard sentait que cette nouvelle vie de labeur commençait à laisser des marques.    

 

« C’est beaucoup de pression défensive pour Josh. On oublie que les gars qui jouent junior majeur à la défense ne sont pas challengés physiquement autant qu’ils le sont dans le pro. Dans le cas de Josh, il est beaucoup moins fort physiquement qu’un Cale Fleury l’était l’an passé. Donc dans ses batailles à 1 contre 1, dans son jeu physique, son jeu défensif, c’est beaucoup de pression. C’est une charge de travail pour lui de bien se positionner, d’apprendre tout ça. » 

 

« Quand on est défenseur, on ne décide pas vraiment comment le jeu physique va arriver, approfondit Bouchard. On doit s’ajuster à l’attaquant, c’est lui qui est en position de force. Donc les batailles à 1 contre 1, on peut dire que c’est 50-50, mais c’est habituellement 70 % pour l’attaquant et 30 % pour le défenseur. [Jouer à l’avant], ça lui a permis d’être physique, de vivre autre chose et de relaxer un peu aussi. »

 

Contrairement à la perception générale qui pourrait s’en dégager, Brook est d’avis que cette parenthèse dans sa jeune carrière pourrait lui être bénéfique. Vaut mieux jouer à n’importe quelle position que ne pas jouer du tout, raisonne-t-il. « S’il faut se poser la question, je pense que ça contribue plus à mon développement que ça ne lui nuit », réfléchit-il en haussant les épaules.

 

Le Rocket veut un Laurent Dauphin 2.0

Bouchard, après s’être fait un plaisir de rappeler qu’il avait lui-même été muté à l’attaque dans la Ligue américaine sans que ça ne l’empêche de jouer 364 matchs dans la LNH, est du même avis et invite les plus anxieux à la patience.

 

« Les gens et les médias ont des attentes, mais moi je deal avec la réalité. Les gens n’ont pas vu Josh jouer beaucoup. Vous voyez des flashs. Nous, on travaille avec eux pour qu’ils deviennent des joueurs de la Ligue nationale efficaces, pas juste des petits joueurs de la Ligue américaine qui ramassent des points et qui sont corrects. Et des fois, ça prend du temps. Je comprends que tout le monde veut que tout aille vite. On voit des noms, on voit des statistiques et on s’énerve. »

 

« Dans le cas de Josh, on aime beaucoup le potentiel que ce gars-là peut avoir pour la transition, sa capacité à bouger à la ligne bleue, à sauter dans le jeu et à transporter la rondelle. En contrepartie, on est capable de vivre avec les faiblesses d’un joueur quand on travaille avec lui. On ne se met pas la tête dans le sable, mais il a juste 20 ans aussi. Il a une capacité physique [qui va augmenter] à travers les années et rapidement, son jeu défensif va continuer à progresser. »​