LAVAL – Le plus beau but de la saison du Rocket est né des mains, de la vision et de la créativité de Phil Varone.

 

Dans le premier match d’un programme double contre les Bruins de Providence, mercredi dernier, Varone a hérité de la rondelle en face du banc des locaux, a passé la rondelle entre les jambes de deux adversaires en route vers la zone adverse et a servi une passe parfaite à Riley Barber, qui n’a eu qu’à pousser la rondelle dans un filet ouvert.

 

Que Varone alimente les bulletins de nouvelles en faits saillants n’a rien de surprenant. Avant d’arriver dans l’organisation du Canadien via le marché des joueurs autonomes, cet été, l’attaquant de 28 ans avait récolté 396 points en 488 matchs dans la Ligue américaine. Au cours de cette période, il a dominé le classement des compteurs de trois équipes différentes et a reçu le titre de joueur par excellence du circuit une fois, en 2017-2018.

 

Ce qui étonne, donc, ce n’est pas la capacité de Varone d’épater la galerie. C’est plutôt que cette mention d’aide demeure, à ce jour, le seul point qu’il ait été en mesure d’inscrire à sa fiche avec sa nouvelle équipe. En sept matchs cette saison, l’ailier gauche n’a toujours pas trouvé le fond du filet et a généré autant d’attaque que des joueurs comme Michael Pezzetta, Kevin Lynch et Maxim Lamarche.

 

Il faut remonter à la saison 2016-2017, sa dernière avec les Senators de Binghamton, pour recenser la dernière léthargie de cette ampleur au portfolio de Varone. Cette année-là, il avait été limité à une passe lors d’une séquence de sept matchs au début février. Il avait aussi aligné quatre beignes dans la colonne des points pour terminer l’année.

 

Depuis, l’ancien choix de cinquième ronde des Sharks de San Jose a été un modèle de constance. En 2017-2018, il a été tenu en échec dans deux matchs de suite à seulement trois reprises. Puis l’an dernier, il a obtenu un point dans 19 des 22 parties qu’il a jouées avant d’être rappelé par les Flyers de Philadelphie. C’est dire à quel point la sécheresse qu’il traverse présentement est déconcertante.

 

« Pour être honnête, ça ne m’inquiète pas trop, affirme Varone, qui a fait face à la musique sans se défiler lundi dans le vestiaire du Rocket. Les gens vont toujours regarder les points en premier, mais je ne crois pas que ça soit mérité à chaque fois. Personnellement, je sais qu’il y a un tas de choses que je fais présentement qui ne se voient pas sur la feuille de pointage. Le reste viendra en temps en lieu et quand ça va débloquer, ça n’arrêtera plus. Les sept premiers matchs de la saison ne seront alors qu’un lointain souvenir. »

 

Varone ne tente pas de se dédouaner de tout blâme. Il sait qu’il a été embauché pour sa production offensive et accepte d’être jugé en conséquence. Il reconnaît la validité des questions qui lui sont posées parce que certaines d’entre-elles sont les mêmes qu’il se pose lui-même. Seulement, il croit pertinent de soulever quelques circonstances atténuantes qui peuvent servir de début d’explication à cette situation qu’il espère passagère.

 

Déprogrammé et dépaysé

 

Varone estime qu’il jouait le meilleur hockey de sa carrière quand il a été rappelé par les Flyers il y a bientôt un an. Et une fois à Philadelphie, il a assez bien fait pour y passer le reste de l’année et participer à 47 matchs. Mais son rôle n’y était évidemment pas le même qu’avec le club-école et il a aujourd’hui l’impression que ce long stage dans la LNH l’a déprogrammé et éloigné de sa vraie nature.

 

« Je crois que le fait d’être resté en haut pour une si longue période tout en jouant si peu, ça a changé mon approche et affecté mon jeu en général. Et ça peut sembler étrange à dire, mais j’y ai probablement laissé un peu de mon swag, un peu de ma confiance », craint celui qui n’avait jamais passé plus de 28 matchs dans la LNH dans une même saison avant l’an dernier.  

 

Varone plaide aussi l’absence de familiarité avec ses nouveaux coéquipiers. Depuis le début de la saison, Joël Bouchard l’a utilisé en compagnie de Barber, un autre vétéran qui tarde à répondre aux attentes, sur un trio pivoté par Jake Evans. À l’entraînement lundi, l’entraîneur-chef avait brisé cette combinaison en déplaçant Varone avec Ryan Poehling et Alex Belzile.

 

« Durant mes deux années à Lehigh Valley, j’avais développé une chimie assez spéciale avec un gars qui s’appelle Greg Carey. Je pouvais savoir où il se trouvait sur la glace en tout temps, je n’avais même pas besoin de regarder. Je lui refilais la rondelle et lui, il a l’un des tirs les plus puissants de la Ligue américaine, il faisait le reste. L’entraîneur aussi me connaissait bien. Ici, tout est à recommencer. »

 

Et puis il y a bien sûr tous ces petits jeux banals qui n’ont pas abouti et qui, lorsqu’il y repense et les additionne, s’accumulent pour former un gros tas de malchance.

 

« Ça peut devenir frustrant, mais quand on regarde ça à tête reposée, je pourrais facilement avoir quatre ou cinq points à ma fiche et on ne serait pas ici en train d’en parler »,

 

« Ils ont eu des chances pareil, confirme Bouchard au sujet de Varone et Barber. Trois points de plus chacun, ça serait réaliste avec la façon dont ils ont joué. Dans le cas de Varone, je l’ai trouvé beaucoup plus impliqué. On leur donne beaucoup de temps de glace - ils ne peuvent pas se plaindre là-dessus - parce que justement on veut qu’ils s’adaptent, on veut qu’ils soient performants, on veut qu’ils se sentent bien. Mais on est une équipe qui s’améliore et il y a encore plein de joueurs qui ne sont pas à leur plein potentiel.

 

« Phil n’a pas une mauvaise attitude. J’ai beaucoup aimé son leadership sur le banc et sur la glace en fin de semaine. J’ai trouvé qu’il était investi. S’il est pour avoir un slump, c’est mieux là que plus tard dans la saison », raisonne l’entraîneur.

« Reviens me voir en février, on verra où j’en suis. Cette situation ne durera pas éternellement », promet Varone.