Un juge ordonne au cabinet engagé par Hockey Canada de remettre ses dossiers
Un cabinet d'avocats de Toronto (Heinein Hutchinson), engagé par Hockey Canada pour enquêter sur les allégations d'agression sexuelle en 2018 qui impliquaient des joueurs du Mondial junior et une femme identifiée comme E.M. en Cour, s'est fait ordonner par un juge de London de remettre toutes les conclusions trouvées en lien avec les incidents. C'est ce qu'un nouveau document de la Cour a indiqué.
Dans une décision rendue le 21 octobre 2022, le juge de la Cour d'Ontario Joseph Carnegie a écrit une ordonnance à l'avocate Danielle Robitaille de remettre à la police « les fruits de l'enquête indépendante au sujet de l'agression sexuelle alléguée de E.M., qui a eu lieu le 19 juin 2018, par des membres d'Équipe Canada junior. Sans y être limité, cela devrait inclure tous les dossiers de l'équipe de hockey, de la victime E.M., de tout témoin indépendant et des membres du personnel. Cela devrait également inclure toute évidence électronique ou médicolégale, dont les vidéos de surveillances, les conversations par texto ou les conversations sur les réseaux sociaux ».
Il n'est toutefois pas clair à savoir si Robitaille s'est soumise à la requête du juge. Elle n'a pas répondu à un courriel envoyé par TSN pour recueillir ses commentaires.
Carnegie a écrit que lorsque la police allait recevoir les dossiers de la part du cabinet Heinein Hutchinson – engagé en juin 2018 par Hockey Canada pour enquêter sur les incidents – ils allaient devoir rester scellés jusqu'à ce qu'il puisse les analyser.
« La Cour devra ensuite examiner le matériel scellé et convoquer une audience pour recevoir les observations de la Couronne et des partis concernés qui pourraient avoir le privilège de se faire valoir, a écrit Carnegie. Le tribunal rendra une décision sur toute demande de privilège de l'avocat-client et décidera si certains documents seront remis à la police. »
Les dossiers de la Cour, qui sont rédigés pour protéger l'identité des personnes impliquées dans le dossier, incluent un sommaire de 94 pages du dossier écrit par le sergent du Service de Police de London David Younan qui offre le rendu le plus détaillé à ce jour au sujet des allégations d'agression sexuelle qui impliquent des joueurs d'Équipe Canada.
Les dossiers indiquent que la Police de London estime avoir des motifs raisonnables pour porter des accusations d'agression sexuelle contre cinq joueurs. Les allégations contre les joueurs n'ont pas été prouvées ni testées devant les tribunaux.
The Globe and Mail, qui a d'abord rapporté les dossiers dimanche, a appris leur existence et a déposé une requête à la Cour de London pour qu'ils soient descellés, a confirmé l'avocat de la Couronne Jason Miller dans un courriel à TSN.
Après que TSN ait rapporté en mai qu'une femme – identifiée comme E.M. par les documents de la Cour – avait réglé une poursuite de 3,55 M$ contre Hockey Canada, la LCH et huit joueurs anonymes de la LCH, un comité parlementaire a convoqué une série d'audiences pour demander plus d'informations à Hockey Canada au sujet de cette affaire et de la manière dont Hockey Canada a historiquement géré les allégations d'agression sexuelle.
Ce scandale a mené au départ du président de Hockey Canada, Scott Smith, ainsi que de l'entièreté des membres de l'administration. Une nouvelle administration de neuf membres a été élue samedi. La nouvelle administration par intérim va opérer pendant un an et sera responsable d'engager un nouveau président.
Les dossiers de la Cour de London démontrent également que plusieurs joueurs ont été interviewés à plusieurs occasions par la police de London, que d'autres membres de l'équipe du Mondial junior de 2018 pourraient devenir des suspects au fil de l'enquête, que la police a obtenu une vidéo de l'Hôtel Delta Armouries à London qui montre E.M. arriver dans l'hôtel avec un des joueurs, et que la police est toujours à la recherche d'un chauffeur Uber qui a conduit E.M. à sa demeure après les allégations d'agression sexuelle.
Après les allégations d'agression, « E.M. a eu de la difficulté à trouver son chemin pour sortir de l'hôtel Armouries, écrit Younan dans le sommaire du dossier. Elle s'est sentie perdue et pleurait. À un certain moment, elle était dans la salle à manger, jusqu'à ce qu'elle trouve la sortie. E.M. a commandé un Uber et pleurait pendant le retour jusque chez elle… le conducteur, qui a observé E.M. dans un état de frustration, a tenté de la consoler jusqu'à ce qu'il la dépose chez elle. L'identité du conducteur n'est pas connue par la police. Son identité est importante puisque la police aimerait l'interviewer et déterminer quelle conversation a eu lieu entre lui et E.M. Cette information pourrait corroborer ou discréditer la déclaration d'E.M. à la police ».
Carnegie a écrit qu'il accepterait une demande de la police de London pour une ordonnance de production à Uber Technologie pour fournir l'identité du conducteur.
Face à une montée de la pression publique, la police de London a rouvert son enquête en juillet, après l'avoir initialement fermée sans accusation en février 2019.
« Durant la nouvelle enquête, les officiers de police ont mené de nouvelles entrevues avec quelques personnes impliquées et ils ont aussi été capables d'interviewer de nouvelles personnes à qui ils n'avaient pas parlé auparavant », a écrit Younan.
Younan a écrit que la police a obtenu une déclaration supplémentaire d'E.M. au sujet des évènements du 19 juin 2018.
« Durant la nouvelle enquête, la police a aussi été en mesure de découvrir l'existence d'une conversation de groupe entre les joueurs qui ont constitué Équipe Canada junior. Depuis, les enquêteurs ont obtenu des clés USB portables de plusieurs joueurs, de leurs avocats, qui contiennent des messages textes de cette conversation de groupe. Ces clés USB n'ont pas été examinées par la police et elles sont scellées dans un casier en attente d'une autorisation judiciaire. »
Même si la police a obtenu ces clés USB de la part des avocats des joueurs lors des mois d'août et de septembre, Younan a écrit que les enquêteurs n'allaient pas examiner leur contenu sans mandat.
Younan a aussi écrit que cinq anciens joueurs d'Équipe Canada auraient commis des infractions criminelles. D'autres seraient des témoins, a-t-il écrit, ajoutant que « d'autres joueurs pourraient ou non devenir des suspects ».