MONTRÉAL - L'hypothèse d'une deuxième équipe de la LNH à Montréal et à Toronto de même que la viabilité de 12 équipes du circuit Bettman en sol canadien comme le suggère une étude torontoise paraît pour le moins démesurée.

C'est la conclusion qui s'impose lorsqu'on analyse l'étude réalisée par l'Université de Toronto à la lumière du marketing de sport.

« En prenant connaissance de la manchette selon laquelle le Canada pourrait avoir jusqu'à 12 équipes de la LNH, j'ai trouvé que c'est excessivement enthousiaste», a réagi André Richelieu, professeur titulaire au département de marketing de sport à la Faculté des sciences de l'administration de l'Université Laval.

« Soyons clair, j'appuie un retour de la LNH dans des marchés canadiens. Mais je dirais qu'on peut se permettre seulement deux ou trois équipes de plus qu'actuellement. »

Pour M. Richelieu, les marchés potentiels pour accueillir une équipe de la LNH sont Québec, Winnipeg et, peut-être, la grande région de Toronto, comme Hamilton.

« De là à envisager une deuxième équipe à Montréal, c'est un non sens. »

Selon l'étude du Mowat Center for Policy Innovation dont les résultats ont été publiés simultanément, mardi, dans les quotidiens La Presse et Toronto Star, une deuxième équipe de la LNH à Montréal serait plus rentable que les Oilers d'Edmonton, qui auraient réalisé des profits de 8,2 millions $ US en 2009-2010.

Les chercheurs ont basé leurs conclusions sur la population, la croissance de la population, le revenu moyen des ménages après impôts, le nombre de ménages à revenu élevé, le nombre de sièges sociaux et la disponibilité d'un amphithéâtre.

Mais ces chiffres ne tiennent aucun compte de variables plus intangibles, comme la marque, l'attachement des amateurs et l'enracinement historique du Canadien dans toute la province. Il s'agit de facteurs de succès indispensables pour assurer la survie d'une équipe de la LNH.

« L'étude soulève de bons points, notamment l'aspect oligopolistique de la LNH, qui entretient des disparités économiques qui n'ont aucun sens dans une véritable économie de marché, a poursuivi Richelieu. On préserve de manière artificielle certains marchés bancals aux États-Unis. Mais dire que Montréal pourrait avoir une deuxième équipe, c'est ignorer une dimension extrêmement importante en marketing de sport, soit la notion de marque et l'attention émotionnelle des fans.

« Les amateurs montréalais vibrent pour une équipe depuis 100 ans et c'est le Canadien de Montréal. L'équipe est imprégnée dans le tissu socio-économique de la ville. Et même si on peut penser sur la base des chiffres qu'une deuxième équipe pourrait survivre, cela ne tient pas compte de la réalité selon laquelle le Canadien est l'équipe de Montréal, de la région et pratiquement de tout le Québec depuis que le départ des Nordiques. »

L'étude avance aussi que les six équipes canadiennes représentent le cinquième des formations de la LNH mais génèrent le tiers des revenus du circuit.

Le mois dernier, une autre étude, initiée par le Conference Board du Canada, avait établi que le succès ou l'échec d'une concession de sport professionnel repose sur quatre conditions fondamentales : la taille démographique du marché; le niveau des revenus; une solide présence d'entreprises et l'égalité des conditions.

Le prochain volet de la série « Jouer dans les ligues majeures : Qu'est-ce qui fait le succès des équipes de sports professionnels? », dont la parution est prévue ce mois-ci, reprendra ces quatre conditions fondamentales pour expliquer les départs des Nordiques de Québec et des Jets de Winnipeg et établir si ces équipes pourraient être rentables aujourd'hui.