C’est parce qu’ils étaient ou sont encore d’excellents joueurs, brillant entraîneur-chef et directeur général aussi rusé que visionnaire et non pour leur qualité d’orateur que Sergei Zubov, Vaclav Nedomansky, Jerry York et Jim Rutherford ont fait leur entrée au Temple de la renommée du hockey lundi.

 

Heureusement pour la cuvée 2019, Guy Carbonneau et Hayley Wickenheiser qui a été la toute dernière à prendre la parole ont sauvé la soirée.

 

La grande dame du hockey a d’ailleurs lancé une bouée de sauvetage à Vaclav Nedomansky afin que le premier joueur du Bloc de l’Est à avoir franchi le Rideau de fer pour venir jouer en Amérique du Nord puisse revenir sur scène afin de compléter sa liste de remerciements.

 

Après un très long discours aussi sinueux que le parcours qui lui a permis de passer à l’Ouest, Nedomansky s’est rendu compte qu’il avait omis de remercier son épouse et ses enfants. Un premier sacrilège. Qu’il avait aussi omis de remercier tous les coéquipiers avec qui il avait joué au cours de son illustre carrière. Un plus gros sacrilège encore.

 

Après s’être repris et confondu en excuses, Nedomansky a conclu son rappel en lançant à ses trois enfants : « Il n’y a pas que mon corps qui a vieilli. Ma tête a vieilli elle aussi. Mes enfants, votre père est un véritable nono », a-t-il plaidé visiblement mal à l’aise avant de regagner son siège et d’embrasser longuement son épouse qui a bien ri de la situation.

 

Hayley Wickenheiser a pour sa part été parfaite. Rien de moins.

 

« Je tiens d’abord à remercier mes parents. Mon père parce qu’il a été un de mes premiers entraîneurs et aussi ma mère qui s’est battue pour que moi et les autres jeunes filles puissions nous rendre à l’aréna sans être regardées comme des exceptions », a amorcé Wickenheiser.

 

« Quand j’ai commencé à gravir les échelons du hockey mineur et à prendre la place de garçons, j’ai développé des ulcères. Pas parce que je craignais la compétition ou les mises en échec. Au contraire, j’étais tout à fait à mon aise dans ce genre de situation. Ce qui m’inquiétait, c’était les commentaires négatifs quand je rentrais ou que je sortais de l’aréna », s’est souvenue la septième femme à faire son entrée au Temple de la renommée du hockey.

 

Hayley Wickenheiser s’est ensuite tournée vers les autres grandes dames du hockey féminin. Ses premières coéquipières avec l’équipe canadienne.

 

« J’ai découvert dans cette équipe des femmes sensationnelles. Des femmes qui ne se demandaient pas ce que le hockey pouvait faire pour elle, mais ce qu’elles pouvaient faire pour faire avancer le hockey féminin. J’étais encore adolescente. Je me souviens d’avoir croisé à ma première année avec l’équipe une enseignante de mathématique de 10e année alors que j’étais une étudiante de math de 10e année. »

 

Malgré tous les succès personnels qu’elle a remportés au fil de sa carrière, Hayley Wickenheiser a assuré les amateurs de hockey canadiens qu’elle n’a jamais ressenti rien d’aussi fort que la satisfaction de bien les représenter. « C’est bien d’être les meilleurs au monde, mais c’est bien mieux d’être les meilleurs pour son monde! »

 

Hayley Wickenheiser a aussi remercié Bobby Clarke de l’avoir invité à un camp d’entraînement des Flyers pour qu’elle peaufine ses qualités. « Bobby voyait en moi un simple joueur de hockey et non une femme qui jouait au hockey. Brendan Shanahan et Kyle Dubas – respectivement président et directeur général des Maple Leafs de Toronto – m’ont offert le même genre de respect en voyant en moi une personne qui pouvait aider notre équipe à s’améliorer lorsqu’ils m’ont offert de me joindre à l’équipe de développement de nos jeunes joueurs .»

 

« Je fais mon entrée ici ce soir en pensant à toutes celles qui ont rendu mon parcours un peu plus facile que celui qu’elles ont emprunté. J’espère que ma contribution rendra le parcours des jeunes filles d’aujourd’hui plus facile encore. Qu’elles n’auront plus à couper leurs cheveux très courts afin de se confondre dans les groupes de garçons et d’attirer le moins possible l’attention sur leur différence. Parce que le hockey dans le monde d’aujourd’hui est vraiment pour tout le monde. »

 

L’idole de Stastny et d’un peuple tout entier

 

C’est des mains de son ancien coéquipier avec les Red Wings de Detroit Frank Mahovlich que Vaclav Nedomansky a reçu sa plaque d’intronisation.

 

Plus encore que le discours qu’il a prononcé, ce sont les hommages lancés par Peter Stastny à l’endroit de « Big Ned » qui ont permis de souligner son entrée au Temple du hockey.

 

« Pour moi et les jeunes joueurs de hockey de ma génération, Vaclav Nedomansky était une inspiration. Une idole. Il était Wayne Gretzky. Il était Jean Béliveau. Il était excellent sur la patinoire. Il possédait un tir très, très puissant », a lancé Peter Stastny en indiquant avec un enthousiasme débordant qu’il pourrait parler de « Big Ned » pendant des heures.

 

« J’ai eu trois idoles dans ma jeunesse : mon frère Marian, Stan Mikita pour des considérations plus mythiques et Vaclav Nedomansky. Il est de ma ville. Il est de Bratislava. Quand j’étais jeune, je voulais être Vaclav Nedomansky. Je suis très, très, très content qu’il fasse enfin son entrée au Temple de la renommée. Je suis très, très fier », a conclu Stastny.

 

Motivé par les doutes et les critiques

 

Deuxième directeur général de l’histoire de la LNH à avoir remporté la coupe Stanley avec deux organisations différentes, Jim Rutherford avait un message de détermination à lancer dans le cadre de son discours d’intronisation.

 

« Ma famille vivait d’une paye à une autre, mais j’ai toujours pu bénéficier de l’appui de mes parents et de mes sœurs pour avoir l’équipement nécessaire pour jouer et gravir les échelons. Les sacrifices de tous les membres de ma famille m’ont toujours servi d’inspiration. Tout comme les doutes et les critiques dont j’ai été l’objet pendant mon ascension vers la LNH. Ne vous laissez jamais décourager par ceux qui vous lancent que vous n’arriverez jamais à vos fins. J’ai entendu souvent ce genre de remarque et plutôt que de me faire plonger, elles m’ont servi de tremplin », a indiqué Rutherford qui a vécu de grands moments dans la construction des Hurricanes de la Caroline, mais qui en vit de plus grands encore avec les Penguins de Pittsburgh.

 

« C’est remarquable de pouvoir travailler pour des propriétaires comme Mario Lemieux et Ron Burkle. C’est tout aussi remarquable de pouvoir être témoin du quotidien de Sidney Crosby en tant que joueur de hockey. »

 

Opéré la semaine dernière, Crosby n’a pu accompagner Mario Lemieux et l’imposant contingent de membres des Penguins venus à Toronto pour l’occasion. Croisé à son arrivée au Temple du hockey, Mario Lemieux a simplement indiqué qu’il se considérait chanceux d’avoir pu procéder à l’embauche de Jim Rutherford dont l’expérience à permis de remettre les Penguins sur les rails et de les aider à gagner deux coupes Stanley consécutives en 2016 et 2017.

 

Hommage à Karpotsev

 

Fidèle à lui-même, Sergei Zubov était beaucoup moins à l’aise sur la scène que sur la patinoire. Rien à voir avec l’éloquence de son ancien coéquipier Brett Hull qui est venu lui remettre sa plaque de nouvel intronisé.

 

« Brett était celui qui parlait aux médias sans arrêt et au nom de tout le monde. C’est pour ça que je manque un peu de pratique », a lancé Zubov en guise de tentative de blague.

 

Si son humour n’a pas fait mouche, le témoignage émouvant qu’il a rendu à Alexander Karpotsev a quant à lui touché droit au cœur. 

 

« Comme tous les jeunes garçons de Moscou, j’ai vite été mis en contact avec le hockey. Mais c’est Alexander Karpotsev, avec qui j’étais ami à l’école primaire, qui m’a amené pour la première fois dans un aréna. C’est lui qui m’a incité à m’impliquer dans le hockey organisé et non seulement dans le hockey qu’on jouait à l’extérieur, dans les parcs. Nous étions loin de nous douter que plusieurs années plus tard nous allions nous retrouver dans le vestiaire des Rangers, à New York, où nous avons gagné la coupe Stanley ensemble en 1994. J’espère qu’il est témoin de ce qui m’arrive ce soir et qu’il est fier, peu importe où il soit », a lancé Zubov avec une émotion évidente.

 

Alexander Karpotsev, est-il besoin de le rappeler, est décédé en septembre 2011 lors de l’écrasement qui a décimé le Lokomotiv de Yaroslavl dont l’ancien coéquipier de Zubov était l’un des entraîneurs adjoint.

 

York : des bancs d’école à la LNH

 

Parce qu’il enseigne le hockey et dirige des équipes de la NCAA depuis près de 50 ans, Jerry York s’est fait offrir une place au Temple de la renommée du hockey.

 

« Je me souviens d’être allé dans le Nord de l’Ontario pour recruter le premier joueur d’impact qui s’est joint à mon programme dans les années 1970. Ce joueur s’appelait Dave Taylor. Son père, que j’avais rencontré à son retour d’une mine de nickel où il travaillait était couvert de poussière et m’avait dit : le hockey c’est bien beau. Mais je veux que mon fils ait une éducation afin que je sois sûr qu’il n’aura pas à faire le même métier que le mien un jour », s’est rappelé York qui a passé sept saisons à la barre de l’équipe de hockey de l’université Clarkson dans l’État de New York, 15 à Bowling Green et qui dirige depuis 26 ans déjà les Eagles de Boston College.

 

« Dans le monde d’aujourd’hui on oublie d’être reconnaissant et d’apprécier ce qui nous arrive. Je peux vous assurer que je suis très reconnaissant de l’honneur que vous me faites ce soir. Nous ne dirigeons pas des rondelles, nous dirigeons des joueurs, des personnes. Je pense ce soir à tous ces jeunes qui sont passés au sein de mes équipes. À tout ce qu’ils m’ont apporté. Je pense à Dave Taylor, à George McPhee, à Rob Blake, à Brian Gionta et je vous assure que je suis très reconnaissant. Je me joins ce soir à une très grande équipe », a confié Jerry York qui a raté les deux premiers jours de festivités parce qu’il tenait à être à la barre de son équipe.

 

« Jerry, tu es le genre de coach pour qui j’ai toujours aimé jouer. Un entraîneur qui donne l’exemple en mettant le bien de son équipe devant le sien », a d’ailleurs témoigné Hayley Wickenheiser lors de son discours.

 

Dernière visite officielle de Fassel

 

René Fassel a effectué sa dernière allocution à la soirée d’intronisation du Temple de la renommée à titre de président de la Fédération internationale de hockey sur glace (IIHF). Il tire sa révérence après un règne de 25 ans. « Il y a plus de joueurs européens dans la LNH aujourd’hui que jamais auparavant. Notre fédération a aussi tissé des liens très étroits avec le Temple de la renommée qui rend hommage aux joueurs évoluant outre-mer », a lancé Fassel qui avait un message personnel réservé à son bon « ami » le commissaire Gary Bettman. « Ce fut un réel plaisir de travailler avec toi Gary et j’espère que je te reverrai à Beijing aux Jeux olympiques de 2022 », a lancé Fassel dont les relations avec le commissaire de la LNH ont toujours été, disons aigres-douces. Bettman a accueilli le message et l’invitation avec un large sourire…

 

Iginla, Hossa et qui d’autre l’an prochain?

 

Maintenant que la cuvée 2019 est officiellement intronisée, il est déjà temps d’amorcer les discussions et les débats sur l’identité de ceux et celles qui leur succéderont l’an prochain.

 

Il ne devrait pas y avoir beaucoup de débats sur la candidature de Jarome Iginla qui sera – le contraire serait une grave injustice – invité au Temple dès sa première année d’éligibilité.

 

Marian Hossa pourrait bénéficier du même privilège. Vrai que l’ancien des Sénateurs, des Penguins, des Red Wings et des Blackhawks de Chicago est toujours officiellement sous contrat jusqu’en 2021. Un contrat que les Coyotes de l’Arizona ont acquis des Hawks afin d’utiliser le salaire de Hossa pour respecter le plancher salarial.

 

Mais Hossa est inactif depuis deux ans. Il a été poussé à la retraite par une forme d’eczéma qui l’empêche de revêtir son équipement. À l’image de Chris Pronger qui a lui aussi terminé sa carrière sur la liste des blessés, Hossa pourrait donc être considéré dès l’an prochain malgré qu’il soit toujours sous contrat.

 

Derrière eux, les noms de Daniel Alfredsson, Jeremy Roenick, Theo Fleury, Vincent Lecavalier pour ne nommer qu’eux reviendront sans le moindre doute dans l’équation.