(RDS.ca) - Frank Dancevic. Retenez bien ce nom. Le jeune n'a que 18 ans, mais il est déjà le joueur classé numéro un au Canada et il est déjà la 190e raquette mondiale. Ses pairs considèrent qu'il a tous les atouts nécessaires pour réussir et qu'il sera, et de loin, le meilleur joueur de l'histoire du pays de la feuille d'érable.

Même s'il a perdu son match de premier tour au Masters du Canada contre le Russe Nikolay Davydenko (7-6 (3), 4-6 et 6-3), celui-là même contre qui il a remporté son tout premier match à vie sur le circuit ATP en août 2002, Dancevic est sur une lancée. À sa première année complète sur le circuit de l'ATP, le joueur originaire de Niagara Falls, en Ontario, a remporté ses deux premiers tournois professionnels en juillet, à Granby et à Lexington, au Kentucky, deux tournois Challenger.

Depuis le début de l'année 2003, le récipiendaire des Prix d'excellence de Tennis Canada dans les catégories Athlète junior masculin de l'année et joueur le plus amélioré a gravi près de 250 échelons au classement de l'ATP (de 434 à 190).

Malgré tout, le jeune tennisman, un homme de peu de mots, demeure très, très humble…

"Il y a encore beaucoup d'aspects de mon jeu que je dois peaufiner puisque je suis encore jeune, et je considère que j'ai encore plusieurs faiblesses", résume-t-il.

Mais les gens qui le voient jouer régulièrement ne semblent pas avoir le même point de vue que Dancevic. En fait, ils ne tarissent pas d'éloges à son égard.

Martin Laurendeau, entraîneur du Canada de la Coupe Davis, croit sans l'ombre d'un doute que Dancevic sera, dans quelques années, le meilleur joueur de l'histoire à avoir joué pour le Canada.

"Il sera bientôt le meilleur joueur à avoir représenté le Canada sur la scène mondiale. Personnellement, je n'ai jamais vu un Canadien aussi talentueux que Frank… c'est un talent brut. L'an dernier, il est devenu, à l'âge de 17 ans, le plus jeune Canadien à remporter un match sanctionné par l'ATP. Il a déjà représenté le Canada à deux reprises en Coupe Davis. Il a tout pour réussir, absolument tout. Et en plus, il est doté d'un professionnalisme comme on en voit rarement".

Sébastien Lareau, champion olympique en double à Sydney, en est un autre qui n'a que de bons mots pour le jeune Ontarien. "Il possède un talent exceptionnel et il a une très bonne tête sur les épaules. Il est sans contredit le meilleur espoir du Canada depuis des lunes. Il est de loin supérieur à Daniel (Nestor) et moi à l'époque. Lorsque j'avais le même âge que lui, j'occupais le 325e rang mondial. Lui, il a déjà percé le top 200 et ce n'est pas fini".

"Il a tout ce qu'il faut pour devenir un joueur de tennis d'exception : service, coup droit, revers, jeu en fond de terrain. Maintenant, il doit trouver son identité en tant que joueur de tennis et il doit bien identifier ses forces et ses faiblesses afin de devenir le meilleur possible".

"La dureté du mental, pour reprendre une expression populaire, c'est Frank. Il ne panique jamais et ne se laisse pas influencer par les propos que tiennent les autres à son endroit. Tout le monde dit qu'il est la future grande vedette du tennis au Canada, mais il demeure réaliste et il ne change pas ses objectifs en fonction de ce que les autres disent. Il est très terre-à-terre".

Une chance en or

À l'instar de Simon Larose, Frédéric Niemeyer et Daniel Nestor, Dancevic a bénéficié d'un laissez-passer des organisateurs du Masters de Montréal. Recevoir une telle invitation constitue une chance en or pour un joueur en pleine période d'apprentissage.

"C'est primordial pour moi de prendre part au Masters de Montréal. Le fait d'affronter et de voir des joueurs qui me sont supérieurs me permet de m'améliorer. Je n'apprendrais pas autant si je jouais dans des tournois de moins grande qualité. Je remercie les organisateurs de me donner la chance d'affronter les meilleures raquettes de la planète. Qui plus est, ça me donne beaucoup de visibilité", estime Dancevic.

Dans le monde du sport, il y a souvent deux types d'athlètes : ceux qui se fixent des objectifs précis et ceux qui ne le font pas. Et ça ne prend pas la tête à Papineau pour constater que Dancevic fait partie la deuxième catégorie.

"Je ne vise aucun rang en particulier. Je veux seulement donner tout ce que je peux pour être le meilleur joueur possible. Si je donne tout et que je suis le cinquième meilleur joueur au monde, je serai heureux. En revanche, si je suis le 30e sur la planète et que j'ai tout donné pour y parvenir, je serai tout aussi heureux", précise-t-il.

De son côté, Sylvain Bruneau, entraîneur national en chef de Tennis Canada, semble très bien savoir où se retrouvera Dancevic dans cinq ans. "Frank fera partie des 30 meilleurs joueurs de la planète… et je suis conservateur".

Martin Laurendeau tient pour sa part sensiblement les mêmes propos que son collègue entraîneur. "Je suis convaincu qu'il percera le top 50 d'ici quelques années. Je ne sais pas où dans le top 50, 29e, 15e, 42e, mais je suis sûr qu'il y sera".

Pour vous donner une petite idée, le meilleur classement final de Lareau est une 79e place mondiale en 1998. Pour ce qui est de Nestor, il a terminé l'année 1999 en 86e place.

Dancevic a beau être un jeune homme très brillant et mature pour son âge, il n'a pas atteint ces sommets uniquement par lui-même. Son entraîneur Jon Sorbo a grandement, et le mot est faible, contribué au développement du jeune joueur.

D'ailleurs, le principal intéressé ne s'en cache pas… sans Sorbo il ne serait rien.

"Je ne serais pas ici aujourd'hui sans lui. Je lui dois tout. Il est mon mentor. Il m'a pris sous son aile et il m'a tout enseigné".

En fait, Frank a eu une chance que plusieurs autres joueurs n'auront jamais : il ne paie pas son entraîneur. Selon plusieurs observateurs de la scène du tennis, Sorbo, un Américain qui vit dans la région de Toronto, est indépendant de fortune et il dirige Dancevic de manière bénévole. C'est donc dire, qu'au bas mot, Dancevic économise plus de 100 000 dollars US par année en frais d'entraîneur.

"Jon a décelé chez Frank un talent rare et il a décidé de s'en occuper et d'en faire une vedette. Il a tout misé sur le même cheval et il serait surprenant qu'il se soit trompé", d'ajouter Laurendeau.