L'ancien enfant terrible du tennis masculin John McEnroe sait mieux que quiconque ce que vit présentement le numéro un mondial Novak Djokovic.

Djokovic s'est emparé pour une première fois du premier rang du classement de l'ATP à la suite de son triomphe à Wimbledon et son début de saison fulgurant marqué par 8 titres et un surréel dossier de 48-1. Mais plus important encore, il a mis fin à la domination de Roger Federer et Rafael Nadal qui occupaient le sommet de la pyramide sans interruption depuis février 2004.

« Ça me fait penser à l'époque où je tentais de faire ma place aux côtés de Björn Borg et Jimmy Connors », s'est remémoré McEnroe à l'occasion d'une conférence téléphonique tenue mardi. « Djokovic semble aujourd'hui tellement plus affamé que par le passé. »

« Je crois que le déclic s'est produit à la Coupe Davis (NDLR : qui a été remportée par la Serbie aux dépens de la France au mois de décembre dernier). Il a enfin réalisé ce que ça prenait pour gagner et devenir le meilleur. »

Celui qui a gagné sept tournois du Grand Chelem pendant sa carrière pense cependant qu'un concours de circonstances a également permis à Djokovic d'enfin se tailler une place au sommet.

« Il a vraiment su profiter du léger déclin de Federer », explique McEnroe. « Mais en même temps, c'est tout à l'avantage du tennis masculin qui est en excellente santé. »

Le membre du Temple de la renommée du tennis international refuse toutefois de compter l'ancien numéro mondial pour battu. Federer sera toujours un aspirant au titre des compétitions auxquelles il participera jusqu'au moment où il décidera d'accrocher sa raquette.

« Trop de gens oublient qu'il est le seul à avoir vaincu Djokovic cette année », rappelle McEnroe. « Et c'est tellement difficile de maintenir ce niveau de jeu lorsque tu as été aussi dominant. »

« Je crois qu'il peut encore gagner un ou deux tournois majeurs. Mais je ne pense pas qu'il pourra à nouveau régner comme il l'a fait dans le passé. »

L'Américain a également eu de bons mots pour le Canadien Milos Raonic, qui s'est hissé jusqu'à la 25e place du classement mondial avant d'être mis knock-out par une blessure à une hanche subie lors de son match de deuxième tour à Wimbledon.

« Raonic est arrivé de nulle part. J'aurais aimé le voir contre Nadal à Wimbledon », regrette McEnroe. « J'espère qu'il sera capable de rebondir. Mais je ne m'inquiète pas trop à ce sujet. »

Un sport en déclin aux États-Unis

Évidemment, celui qui a remporté 77 titres pendant sa carrière est énormément préoccupé par l'état lamentable du tennis masculin américain. En effet, les États-Unis ne comptent qu'un seul représentant - Mardy Fish - dans le top 10 et trois - Andy Roddick et John Isner - dans le top 50 du classement.

Il n'y a encore pas si longtemps, il était possible d'en dénombrer jusqu'à quatre dans le top 10 seulement. La situation n'est pas plus rose chez les femmes, alors qu'il faut attendre la 31e position avant de trouver une Américaine - Bethanie Mattek-Sands.

« Ce n'est pas un problème unique à mon pays », relativise McEnroe. « Le sport est devenu tellement difficile et physique à l'image du baseball, du football et du basketball. »

Le double vainqueur des Internationaux du Canada en simple croit néanmoins savoir comment redonner une fierté à son pays qui a remporté à 13 reprises la Coupe Davis, mais une seule fois - en 2007 - au cours des 15 dernières années.

« Les jeunes doivent s'identifier à des modèles gagnants », lance McEnroe. « Nous avons probablement été aveuglés par nos succès passés. »

Celui qui a pris sa retraite en 1992 a d'ailleurs créé il y a environ un an une académie dans la région de New York afin de proposer une approche différente aux enfants qui souhaitent pratiquer ce sport.

« Les jeunes ne doivent pas vivre que pour le tennis », philosophe McEnroe. « Le soccer par exemple leur apprend à interagir avec les autres. Il faut trouver un juste équilibre. »

Notons que McEnroe participera à un minitournoi des légendes en compagnie de ses compatriotes Andre Agassi, Michael Chang et Jim Courrier en marge de la portion féminine de la Coupe Rogers présentée à Toronto du 6 au 14 août.