Justin Kripps a négocié la piste de bobsleigh de Pékin des dizaines de fois avant même d'y mettre les pieds.

Parce que la pandémie de la COVID-19 a retardé pendant des mois les épreuves préparatoires et les séances d'entraînement au nouveau Centre de glisse de Yanqing, le pilote canadien s'est régulièrement équipé d'un casque de réalité virtuelle pour effectuer ses répétitions.

La piste olympique a été inaugurée en 2020, mais au fil de l'année suivante, seuls les athlètes chinois ont pu l'expérimenter en raison de la pandémie. Pour compenser, les dirigeants des fédérations de bobsleigh et de skeleton ont distribué des vidéos de point de vue aux glisseurs internationaux.

Kripps estime qu'il a complété environ 250 descentes virtuelles avant que lui et ses coéquipiers ne se pointent à la piste de Yanqing pour une épreuve préparatoire en octobre dernier.

« J'ai mémorisé la piste, assure Kripps.

« Je peux utiliser (le casque), parcourir la piste et avoir une petite idée au sujet des virages, leur direction, évidemment, et le nombre. C'est en voyant les virages en personne et en négociant la piste sur un bobsleigh que vous allez vraiment réaliser ce que vous allez devoir faire. Mais c'est bien d'avoir un petit aperçu. »

Le nécessité de s'adapter

À l'instar de leurs compatriotes en prévision des Jeux olympiques d'été de Tokyo, repoussés de 2020 à 2021, chacun des athlètes canadiens qualifiés pour Pékin a dû s'adapter et, du coup, a peut-être découvert des traits de leur personnalité qu'ils ne connaissaient pas.

« La pandémie a été un défi pour tout le monde, note Kripps. Lorsque j'ai réalisé à quel point ce serait une grosse affaire, j'ai pensé à une citation de Darwin, qui dit que ce ne sont pas nécessairement les plus forts qui survivent, mais ceux qui s'adaptent le mieux. »

Certaines de ces adaptations sont devenues permanentes.

Ben Coakwell, le coéquipier de Kripps au sein de l'équipe de bobsleigh, calcule avoir dépensé 15 000 $ pour transformer son garage en un gymnase qui a servi pas seulement à ses coéquipiers, mais aussi à des cyclistes, des joueurs de soccer et de hockey de la région de Calgary pendant que les salles d'entraînement étaient fermées en 2020.

« C'est là en permanence, c'est sûr. Ç'a été un exercice coûteux, mais d'un autre côté, je ne savais pas ce qui était accessible aux athlètes d'autres pays. Je ne pouvais quand même courir le risque de m'entraîner uniquement avec des bidons à lait, illustre Coakwell.

« Régulièrement, ajoute-t-il, je recevais des messages me disant 'J'ai su que tu as ce gymnase. Est-ce que ça t'ennuierait si je m'entraîne?' J'ai dit oui à tout le monde, parce que j'étais conscient de l'importance d'y avoir accès, et des répercussions à ce moment-là. »

En meilleure forme

Pendant six mois en 2020, le Québécois Mikaël Kingsbury, champion olympique en titre en bosses, n'a presque pas touché à ses skis. Cela ne l'a pas empêché de décrocher des titres mondiaux en bosses et en bosses en parallèle en 2021.

« J'ai commandé beaucoup d'équipement, et je me suis bâti une très bonne salle d'entraînement à la maison. J'ai acheté un trampoline olympique », a raconté l'athlète de Deux-Montagnes.

« Mon corps était en meilleure condition qu'il ne l'a jamais été. Je peux être très efficace en m'entraînant seul à la maison. »

De leur côté, les membres de l'équipe de patinage de vitesse longue piste ont été confrontés à deux problèmes: la pandémie, mais aussi une défaillance mécanique qui les a privés d'un accès à l'Ovale olympique de Calgary de septembre 2020 à juin 2021.

En juillet, l'équipe nationale a organisé des courses pour ses athlètes à l'Ovale pour reprendre une partie du temps perdu. Cette pratique pourrait se perpétuer, a laissé sous-entendre l'entraîneur Bart Schouten.

« Nous voulions vraiment nous donner une journée additionnelle de courses parce que nous n'avons pas compétitionné tant que ça l'année dernière. Nous avons l'impression que c'est quelque chose qui, par la suite, a aidé à aiguiser le niveau de concentration des athlètes, a précisé Schouten.

« Les mois d'août et de septembre ont été plus productifs parce qu'ils ont de nouveau pris conscience de ce qui était nécessaire pour courir. C'est quelque chose que nous envisageons de garder. »

Laurent Dubreuil, un spécialiste en longue piste, ne pouvait compter sur un ovale dans son patelin de Lévis, où une telle piste était en construction, ni à Calgary en 2020-2021.

Parce que la pandémie avait provoqué la fermeture des salles d'entraînement au Québec au printemps de 2020, Dubreuil a été limité à des flexions avec poids et des fentes avant afin de renforcer ses jambes. Néanmoins, il a remporté le titre mondial au 500 mètres et la médaille de bronze au 1000 mètres l'année suivante.

« L'importance accrue accordée à la musculation a été bénéfique pour moi, a affirmé Dubreuil.

« Le fait de ne pas pouvoir patiner du tout a rendu les choses difficiles pendant la pandémie, mais comme je suis un sprinter, je ne pouvais pas monter plus souvent sur le vélo. Je faisais beaucoup de musculation et je suis devenu beaucoup plus fort. »