IZU, Japon - Le rôle crucial que joue la technologie distingue le cyclisme de la majorité des autres sports olympiques.

À part peut-être des sports comme la voile et l'aviron, la plupart des compétitions qui se déroulent dans le cadre des Jeux d'été dépendent exclusivement de la performance de l'athlète.

Ils essaient de courir ou de nager plus vite, de sauter plus haut ou plus loin, de soulever une charge plus lourde ou de frapper plus fort, et c'est ce qui déterminera s'ils rentrent à la maison avec une médaille ou non.

Mais en cyclisme, la compétition est si serrée, on parle parfois d'une différence de quelques centièmes de seconde, que l'issue pourra dépendre du vélo, des roues ou même du casque que portent les athlètes.

Vous en doutez? Après six heures de course, on a eu besoin d'une photo au fil d'arrivée pour départager les médailles d'argent et de bronze lors de l'épreuve des hommes sur route, samedi.

« Il faut aller vite et il faut gagner », a résumé Bouker Pool, le responsable du marketing de USA Cycling, qui collabore depuis plusieurs années avec le fabricant américain de vélos Felt pour développer les montures utilisées lors des Olympiques.

C'est pourquoi les fédérations et leurs partenaires consacrent l'intervalle de quatre années entre les Jeux à faire tout ce qu'ils peuvent pour retrancher quelques grammes à leurs vélos, les rendre plus aérodynamiques et, peut-être plus important que tout, transférer le moindre watt des pédales jusqu'au sol pour aller toujours plus vite.

Pour des équipes bien en vue comme celles des États-Unis et du Royaume-Uni, on parle d'une course aux armements dont la facture ne cesse de grimper.

Les États-Unis ont semé l'émoi il y a cinq ans, aux Jeux de Rio, quand ils ont dévoilé un vélo de piste complètement différent, sur lequel le système d'entraînement avait été déplacé du côté gauche. Les experts de Felt ont expliqué que le vélo se comportait mieux dans les virages serrés du vélodrome, ce qui conférait un grand avantage aux Américains lors des épreuves d'endurance.

Si le cycliste moyen ne sait probablement pas de quel côté de son vélo se trouve le système d'entraînement, le changement avait consterné l'Union cycliste internationale (UCI), l'organisme qui encadre le sport à l'échelle mondiale et qui n'apprécie pas toujours l'originalité dont font preuve certains pays.

« On repousse les frontières de l'excellence athlétique, a dit le vice-président du marketing de Felt, Eric Sakalowsky. On se préoccupe de la ligne d'arrivée, pas de la facture. Nous sommes passionnés par la compétition chez Felt, et nous continuerons à participer à des projets comme celui-ci pour partager la passion des athlètes à repousser les limites du sport. »

M. Sakalowsky ne blague pas quand il parle de la facture. Les règles olympiques exigent que tout vélo utilisé lors des compétitions soit aussi disponible pour le public. Felt s'attend à vendre une poignée de son vélo le plus sophistiqué, à 25 999 $ US.

« Nous ne prévoyons rien de tel cette année, a dit Jim Miller, de USA Cycling. Mais on verra. »

Les Britanniques, de leur côté, ont fait équipe avec le fabricant de vélos Hope Technology et avec Lotus Engineering, oui, ceux qui conçoivent les voitures ultrarapides, pour dessiner quelque chose d'entièrement nouveau.

Leur vélo de piste révolutionnaire comprend une selle plus large, des roues à disque exclusives, des percées en ce qui concerne la fibre de carbone et d'autres progrès subtils. Et si l'allure du vélo en rebutera peut-être certains, l'esthétique n'est pas si importante.

Le but est d'aller le plus vite possible.

« J'adore ce vélo, a dit Katie Archibald, une membre de l'équipe médaillée d'or en titre de poursuite chez les femmes. C'est comme quand Felt a déplacé la chaîne du côté gauche de leurs vélos de piste. Quand quelque chose a une allure étrange, je dirais, oui, que ça met un peu d'attitude dans ta pédale. Et j'adore l'utiliser. Il va vite. Il est agréable. »

Il est aussi dispendieux. Le cadre coûte à lui seul 23 500 $ US, et on ajoute 6000 $ US pour les roues.

Et on ne parle pas seulement du vélo sur piste. Si les nouvelles technologies du vélo sur route ont été dévoilées il y a quelques semaines lors du Tour de France, certaines verront le jour dans le cadre des Olympiques. En vélo de montagne, le fabricant Specialized a créé il y a cinq ans à Rio une nouvelle peinture qui passe du jaune au orange au rouge en fonction de la température.

Ajoutons les maillots faits de matériaux sophistiqués pour réduire la résistance, les lubrifiants perfectionnés pour les chaînes, et les casques, les lunettes et les chaussures haut de gamme, et l'investissement nécessaire pour avoir la chance de ramener une médaille à la maison est exorbitant.

« C'est le moment le plus agréable du cycle (olympique) parce que toutes les nouveautés sortent, a dit le cycliste britannique Jason Kenny, qui a remporté six médailles d'or olympiques. Nous avons notre meilleur vélo, nos meilleurs pneus, notre meilleur équipement. C'est le moment. »